Sommet de crise à Bruxelles : l’Europe prépare son réarmement

Les dirigeants européens et le président ukrainien Volodymyr Zelensky se retrouvent ce jeudi à Bruxelles pour un sommet extraordinaire consacré à l’Ukraine. Cette réunion vise à rassurer Kiev et à renforcer la défense européenne, dans un contexte marqué par les déclarations spectaculaires de Donald Trump.
Convoqué par Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, ce sommet met en avant deux enjeux majeurs : le renforcement des capacités de défense du continent face à la menace russe et l’incertitude liée à un possible désengagement américain.
« L’Europe fait face à un danger clair et immédiat d’une ampleur inédite dans nos vies d’adulte », a averti Mme von der Leyen dans une lettre adressée aux dirigeants européens.
Le futur chancelier allemand, Friedrich Merz, a également mis en garde contre un « pire scénario » dans lequel l’Otan ne bénéficierait plus de la garantie de sécurité des États-Unis.
Mercredi soir, Emmanuel Macron a annoncé que des financements communs seraient mobilisés pour produire en Europe des équipements militaires tels que des munitions, des chars et des armes de pointe. De plus, les États membres pourront augmenter leurs dépenses militaires sans que cela soit pris en compte dans leur déficit budgétaire, une mesure soutenue par Paris et Berlin.
Le président français a également évoqué l’ouverture d’un débat stratégique sur le rôle du parapluie nucléaire français dans la protection de l’Europe, tout en précisant que toute décision en la matière resterait sous la seule autorité du chef de l’État français.
Un plan massif pour « réarmer l’Europe »
Face à l’évolution du contexte géopolitique, la Commission européenne a dévoilé un plan ambitieux visant à mobiliser 800 milliards d’euros pour renforcer les capacités militaires européennes.
Cette initiative, qualifiée de « première étape » par Bruxelles, devrait obtenir un accord de principe des États membres. À court terme, 30 milliards d’euros seront débloqués pour l’Ukraine dès 2025. Toutefois, certains pays estiment qu’il n’est pas nécessaire d’augmenter ce montant immédiatement.
Dans le même temps, Washington a durci sa position. Après un entretien téléphonique entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, les États-Unis ont gelé leur aide militaire à l’Ukraine, y compris le partage de renseignements, un élément pourtant crucial pour les forces ukrainiennes sur le terrain.
« Nous suspendons et réexaminons tous les aspects de notre relation avec l’Ukraine », a déclaré Mike Waltz, conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche.
Kiev, soucieuse d’apaiser les tensions, tente de rétablir le dialogue avec Washington. Le chef de l’administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak, a ainsi échangé mercredi avec Mike Waltz et annoncé que leurs équipes se rencontreraient prochainement.
Des négociations sous conditions
Volodymyr Zelensky réclame des garanties de sécurité solides avant toute négociation avec Moscou, afin d’empêcher une nouvelle invasion russe après un éventuel cessez-le-feu.
« Nous voulons une paix définitive, pas un simple répit temporaire. Avec des efforts coordonnés et le leadership des États-Unis, c’est réalisable », a-t-il affirmé sur les réseaux sociaux.
Mardi, il a proposé à la Russie une trêve dans les airs et en mer afin d’amorcer des pourparlers sous la médiation de Donald Trump. Il s’est également déclaré prêt à signer un accord sur l’exploitation des ressources naturelles de l’Ukraine avec les États-Unis, une exigence du président américain.
De son côté, Donald Trump a laissé entendre qu’il était ouvert au dialogue, déclarant devant le Congrès avoir reçu l’assurance de Zelensky qu’il était prêt à discuter d’une « paix durable » avec la Russie.
Une Europe divisée
Mercredi soir, Emmanuel Macron a averti que « la menace russe est bien réelle et touche directement les pays européens ». Il a dénoncé la stratégie du Kremlin visant à faire du conflit ukrainien un enjeu mondial, notamment par la désinformation.
« Cette agressivité ne semble pas connaître de frontières. Rester spectateur serait une folie », a-t-il martelé.
Cependant, cette position ne fait pas l’unanimité au sein des Vingt-Sept. Viktor Orban, soutien affiché de Donald Trump et de Vladimir Poutine, a menacé de bloquer le sommet. Il a été reçu à dîner mercredi soir par Emmanuel Macron.
Nouveaux bilans des frappes russes
Sur le terrain, la guerre continue de faire des victimes. Dans la nuit de mercredi à jeudi, quatre personnes ont été tuées dans des frappes russes : trois dans un tir de missile ayant touché un hôtel à Kryvyï Rih (centre), où quatorze blessés sont dans un état critique, et une autre dans une attaque de drone sur un entrepôt à Soumy (nord), selon les autorités locales.