Le président américain tente de capitaliser sur le cessez-le-feu à Gaza pour peser dans les négociations russo-ukrainiennes. Mais les experts restent unanimes : reproduire ce “triomphe” face à Moscou relève de l’illusion.
Après avoir orchestré un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, Donald Trump réattaque le dossier ukrainien, après le sommet qui a eu lieu le 15 août dernier en Alaska, sans résultats probants sur une issue du conflit. Il a eu un échange téléphonique ce jeudi avec Vladimir Poutine avant de recevoir Volodymyr Zelensky ce vendredi à la Maison Blanche.
“Nous avons convenu qu’il y aurait une réunion de nos conseillers puis le président Poutine et moi nous rencontrerons à Budapest pour voir si nous pouvons mettre fin à cette guerre ‘sans gloire'”, a déclaré Trump, rapporte l’AFP. Il espère que “le succès au Moyen-Orient aidera les négociations” en Ukraine. La rencontre aurait lieu “dans les deux prochaines semaines” selon Trump.
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L’équation Gaza impossible à reproduire
Concernant Gaza et l’Ukraine, “les deux ne sont pas comparables”, tranche Ulrich Bounat, analyste géopolitique spécialiste de l’Europe centrale interrogé par BFM TV. Les experts pointent des différences importantes entre les deux conflits.
D’abord, l’absence de levier économique. À Gaza, Trump disposait d’un moyen de pression majeur sur Israël via l’aide militaire américaine. Face à la Russie, ce levier n’existe pas. “Il ne reste plus vraiment de bâtons car les sanctions ont déjà été massivement utilisées”, commente, de son côté, Igor Delanoë, directeur adjoint de l’Observatoire franco-russe (IRIS), cité par le média français.
Ensuite, il n’y a pas de consensus international. À Gaza, les parrains des deux camps souhaitaient un cessez-le-feu. En Ukraine, la Chine, l’Iran et la Corée du Nord aident la Russie à tenir, souligne Ulrich Bounat. La méthode de Trump reste “extrêmement floue”, selon l’expert, qui doute que les Européens et Ukrainiens acceptent “un document vague au bénéfice de Moscou”.
Budapest : un sommet sous tension
La rencontre prévue “dans les deux prochaines semaines” à Budapest illustre ces difficultés. Comme l’explique Euractiv, la Hongrie n’étant pas membre de la Cour pénale internationale, elle ne sera pas tenue d’arrêter Poutine, visé par un mandat d’arrêt international.
Le dossier Tomahawk empoisonne aussi les discussions. France 24 rapporte que Poutine a averti que ces missiles “nuiront considérablement aux relations entre nos deux pays”. Trump reste prudent : “Nous ne pouvons pas appauvrir nos propres réserves”, a-t-il déclaré.
Zelensky, le grand absent
La rencontre ne devrait pas inclure le président ukrainien, faisant craindre un accord défavorable à Kiev. Zelensky, qui rencontre Trump ce vendredi à la Maison Blanche, a ironisé sur X : “Moscou se précipite pour reprendre le dialogue dès qu’ils entendent parler de Tomahawks.”
Selon certains experts, on peut s’attendre à des annonces d’envoi de matériel militaire sans financement américain et à des partenariats économiques.
Le seul gain de Trump : l’économie US
Si le pari diplomatique reste incertain, Trump a marqué des points économiquement. Depuis l’été, les Européens financent les armes américaines à l’Ukraine. “De son point de vue, il a réglé une partie du problème car ça rapporte de l’argent aux entreprises de défense américaine”, note Igor Delanoë.
“Rien ne laisse penser que Poutine soit réellement intéressé par la paix. Il ne peut y avoir de négociations sérieuses tant qu’il n’y a pas de parité sur le champ de bataille”, souligne Euractiv.
Sans pression militaire significative et sans changement du rapport de force, Poutine n’a aucun intérêt à faire des concessions. Cette approche par étapes est très loin de la promesse du président américain de régler le conflit “en vingt-quatre heures”. Le “triomphe” de Gaza ne semble donc pas transposable à l’Ukraine.