La relocalisation des chaînes de production, amorcée dans les pays développés en réaction aux chocs internationaux de ces dernières années, pourrait s’avérer coûteuse sans nécessairement offrir une meilleure résilience face à ces perturbations. C’est l’avertissement formulé lundi par l’OCDE dans un nouveau rapport.
« Cela va à l’encontre de certaines idées reçues dans le débat public sur les risques liés aux chaînes de valeur mondiales », souligne l’organisation internationale, dont l’analyse porte sur l’état actuel des chaînes d’approvisionnement dans le monde.
Selon ses conclusions, une politique de relocalisation impliquant des droits de douane plus élevés, des subventions à la production nationale et des restrictions supplémentaires pourrait entraîner une baisse de plus de 18 % du commerce mondial et une chute de plus de 5 % du PIB mondial.
Les pertes économiques pour chaque pays développé varieraient entre 1,1 % et 12,2 % du PIB, en fonction de leur degré d’intégration dans les chaînes de valeur mondiales, précise encore l’OCDE.
Le Canada, le Royaume-Uni et l’Australie figurent parmi les pays les plus exposés, tout comme les États-Unis, la Corée du Sud et l’Afrique du Sud.
Au-delà des pertes de richesse liées à la réorganisation des chaînes de production, les modélisations de l’OCDE montrent qu’une économie relocalisée n’est pas nécessairement plus résistante aux chocs, qu’il s’agisse de la stabilité du PIB, de la production ou de la consommation.
L’externalisation des étapes de production a été l’un des moteurs de la mondialisation au cours des dernières décennies, contribuant à la réduction de la pauvreté grâce à la spécialisation. L’OCDE, qui promeut le libre-échange, rappelle cette dynamique de fond.
Cependant, ce modèle a été remis en question depuis la pandémie de Covid-19, qui a mis en lumière d’importantes dépendances industrielles — notamment avec la Chine pour les masques chirurgicaux — et incité les pays développés à envisager une relocalisation partielle de leur production, soit sur leur territoire, soit auprès de partenaires jugés plus fiables.
La guerre en Ukraine a également souligné la vulnérabilité de l’Europe face à sa dépendance énergétique envers la Russie, renforçant la tendance à privilégier des partenariats stratégiques plus sûrs.
Depuis quelques années, certains pays affichent leur volonté d’enrayer le processus de désindustrialisation, marqué par des décennies de délocalisations vers des pays à bas coûts. Cette stratégie vise notamment à rapatrier des emplois industriels, une orientation illustrée par les politiques commerciales de l’ancien président américain Donald Trump.