Pascal Boniface: “Trump et Poutine veulent démontrer que ce sont les Européens qui ne veulent pas la paix”

Pascal Boniface, directeur de l'Iris. (Photo: Sophie Palmier)
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le célèbre politologue français est extrêmement sceptique au sujet des négociations entamées en Alaska et poursuivies à la Maison Blanche. “Les Européens ont été particulièrement amicaux, pour ne pas dire flatteurs, avec le président américain, constate-t-il. Mais j’ai envie de dire: tout ça pour ça…”

Pascal Boniface, fondateur de l’Iris à Paris, nous fait part de son scepticisme sur la séquence actuelle autour de la guerre en Ukraine après les pourparlers en Alaska et à la Maison Blanche.

Les Russes sont-ils en train de gagner du temps?

Oui. On met l’accent sur la tenue de Zelensky, on se réjouit qu’il n’y ait pas eu de catastrophe et que Trump n’ait pas explosé. Les Européens ont été particulièrement amicaux, pour ne pas dire flatteurs, avec le président américain. Mais j’ai envie de dire: tout ça pour ça… Rien de concret n’a été engrangé: ni un cessez-le-feu, ni les conditions de la paix, ni le cadre territorial, ni les garanties de sécurité… Trump et Poutine semblent avoir pour objectif de démontrer que ce sont les Européens qui ne veulent pas la paix.

Une rencontre Zelensky – Poutine pourrait avoir lieu dans les quinze jours, un bon signe?

Encore faut-il que cette réunion puisse avoir lieu, ce qui est loin d’être garanti. Si c’est le cas, comment concilier les demandes très différentes entre les Ukrainiens et les Russes? Si un sommet a lieu, il faut encore que Poutine ne claque pas la porte. Encore une fois, la stratégiste consiste à faire des Européens le camp de la guerre, tandis que les Etats-Unis et la Russie seraient le camp de la paix. C’est le monde à l’envers.

Les Européens sont revenus à table, une bonne nouvelle?

Ils sont dû littéralement forcer la porte de la Maison Blanche. Par contre, s’il y a une perspective de sommet à deux Zelensky – Poutine, voire à trois avec Trump, il n’est pas question d’une quadripartite comme le réclamait le président français, Emmanuel Macron. En revanche, les Européens sont bien gentils de payer les armements fournis par les Etats-Unis à l’Ukraine. De global player, l’Europe est devenue un global payeur.

On a le sentiment qu’il sera impossible de s’entendre sur le cadre territorial ou les garanties de sécurité…

On peut toujours tenter de trouver un accord en surmontant les obstacles, par exemple en veillant à une non-reconnaissance juridique des régions annexées. En réalité, tant les MAGA que les néo-conservateurs américains estiment que la guerre pourrait s’arrêter sur le front actuel. Moi, je me fais injurier en France quand je dis que les Ukrainiens ne pourront de toute façon pas reconquérir les territoires perdus. On me traite de défaitiste. Mais ce n’est pas la situation que j’appelle de mes voeux, c’est tout simplement le constat de la réalité.

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