Oui, les nouveaux droits de douane américains frappent d’abord l’économie américaine

© ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP

Le protectionnisme voulu par Donald Trump afin de défendre l’industrie américaine se retourne contre lui: il fragilise les entreprises américaines, accentue les retards de paiement et alimente une vague de faillites. Selon le Baromètre des paiements en Amérique du Nord d’Atradius, les nouvelles tensions commerciales entre les États-Unis, le Mexique et le Canada créent un effet boomerang qui menace non seulement la croissance américaine, mais aussi les exportateurs européens.

L’accord commercial passé entre les États-Unis, le Mexique et le Canada (USMCA pour United States–Mexico–Canada Agreement) a remplacé, en 2020, l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain) qui était en vigueur depuis 1994. L’objectif de l’USMCA était de moderniser et de rééquilibrer les échanges commerciaux entre les trois pays.

Cet accord prévoit aussi une révision automatique tous les six ans, afin d’évaluer sa pertinence et, le cas échéant, de le prolonger, ou de le renégocier.  

Sous tension

La prochaine date de révision de l’accord commercial entre les trois pays est prévue pour juillet 2026. Après l’instauration de nouveaux tarifs douaniers par les États-Unis cette année, son avenir est bien incertain et suscite déjà des inquiétudes.

Pour les entreprises belges exportant vers l’Amérique du Nord, les conditions commerciales se durcissent. C’est ce que révèle le Baromètre des paiements en Amérique du Nord publié par Atradius, qui analyse la solvabilité des entreprises américaines, canadiennes et mexicaines.

Croissance et confiance plombées

Les entreprises nord-américaines sont confrontées actuellement à un environnement économique instable, directement lié aux tarifs douaniers imposés par les États-Unis. Selon Atradius, ces mesures ont déjà un effet négatif sur le PIB américain, dont la croissance attendue pour 2025 a été révisée à la baisse de 0,7 point de pourcentage, pour atteindre 1,9 %.

Un tiers des entreprises américaines s’attend à une détérioration des délais de paiement. Aujourd’hui, 43 % des factures sont réglées en retard ou restent impayées, et 6 % des créances sont totalement irrécouvrables. Les perspectives de bénéfices s’assombrissent : les entreprises doivent supporter des coûts d’achat plus élevés dus aux droits de douane, mais peinent à les répercuter sur leurs clients. De plus, la confiance des consommateurs est en recul.

Le risque d’impayés ne se limite pas au marché intérieur américain : il s’étend aussi aux entreprises étrangères, notamment belges, actives dans la région.

Effet boomerang

« Tous les indicateurs montrent que les droits de douane élevés freinent la croissance de l’économie américaine », confirme John Lorié, économiste en chef chez Atradius. « Nous prévoyons une hausse des retards de paiement dans la région, ce qui mettra la trésorerie des entreprises sous pression. Bien qu’il soit difficile d’en quantifier précisément l’impact, il est clair que le nombre de faillites aux États-Unis augmente. »

Face à l’incertitude persistante du climat commercial, près de la moitié des entreprises américaines anticipent une nouvelle hausse des faillites cette année. Les chiffres le confirment : une augmentation de 6 % a déjà été enregistrée par rapport à 2024, et une progression supplémentaire de 7 % est attendue en 2026.

Des répercussions mondiales

À l’approche de la révision de l’accord USMCA en 2026, la nervosité grandit.

Pour les entreprises belges qui commercent avec les États-Unis, le Canada ou le Mexique, cela se traduit par des délais de paiement plus longs et un risque d’impayés accru.

Les entreprises des secteurs de l’automobile, de l’acier et de l’industrie manufacturière, intégrées aux chaînes d’approvisionnement nord-américaines, seront parmi les plus exposées. Atradius recommande aux exportateurs belges d’évaluer rigoureusement la solvabilité de leurs clients et de renforcer leurs dispositifs de protection de trésorerie.

Le protectionnisme américain, censé renforcer la compétitivité intérieure, semble donc provoquer l’effet inverse : une économie fragilisée, une confiance ébranlée et des partenaires étrangers désormais sur leurs gardes.

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