Massacre du Hamas en Israël: la loi de la jungle
Les images de l’attaque terroriste, qui a fait plus de 700 morts du côté israélien, témoignent d’un monde sans foi ni loi. Sous la coupe de puissances régionales qui s’affrontent. Où cela nous mènera-t-il?
Tout le week-end, jusqu’à la nausée, les images en provenance d’Israël ont bouleversé, choqué, suscité la colère. On compare cette attaque-surprise du Hamas au 11 Septembre américain ou aux attentats de Paris, avec ce festival de musique électronique attaqué dans le Sud comparable au Bataclan. C’est l’affrontement de deux mondes, celui de l’insouciance et celui de l’emprisonnement endoctriné.
Le choc est provoqué par le barbarisme des actes et des exécutions. Plus de 700 morts côté israélien, dans des circonstances atroces faisant penser à une “chasse aux Juifs” de sinistre mémoire, à des pogroms”. La ripose israélienne a débuté dans la bande de Gaza, qui a déjà causé plus de 400 morts, mais son cours est perturbé par les nombreux otages détenus par les islamistes. La crainte de l’escalade régionale est réelle.
Tous les experts défilant sur les plateaux de télévision, dimanche, l’affirmaient en coeur: plus rien ne sera comme avant au Proche-Orient. Cela passera-t-il par une guerre régionale? Par une sécurisation accrue d’Israël, où les manquements politiques sont dénoncés? Par de nouvelles alliances?
L’Iran pointé du doigt
L’Iran, qui considère l’attaque du Hamas comme… de “la légitime défense”, est pointé du doigt. La puissance régionale soutient le Hamas depuis toujours et, comme lui, prône la destruction pure et simple d’Israël. Le régime des Mollahs se défend d’avoir activement soutenu l’opération, mais selon le Wall Street Journal, une réunion aurait bien eu lieu la semaine dernière pour valider le modus operandi et aider à planifier les incursions.
L’attaque atteint des sommets dans l’horreur. Elle fait songer à un djihadisme mortifère tel qu’il était exercé par Daesh. Il témoigne d’une banalisation de la violence, voire une valorisation de la cruauté avec ces images indicibles diffusées sur les réseaux sociaux. Les réactions des Palestiniens en teeshirt célébrant les lynchages ou les applaudissements dans d’autres pays du Proche-Orient ont accentué l’effroi. C’est l’objectif: démontrer la vulnérabilité d’Israël et l’incapacité occidentale à réagir.
Très directement, l’opération, que rien ne peut justifier, vise à remettre la conflit israélo-palestinien sur la carte du monde et, sans doute, à compromettre le rapprochement en cours entre Israël et l’Arabie Saoudite. Mais c’est surtout une piège, une provocation immonde, une déclaration de guerre à l’ordre mondial.
La loi de la jungle
Alain Frachon, chroniqueur au Monde et auteur du livre Un autre monde, soulignait sur LCI, dimanche, combien ce conflit serait difficile à résoudre car les grandes puissances se neutralisent. Ne parlons même pas des Nations unies en état de mort clinique. Ce drame a peut-être été possible, aussi, en raison de la crise politique grave que traversait Israël, tandis que les Etats-Unis, eux aussi, vivent des moments politiques délicats.
Ce sont désormais les puissances régionales qui dictent la loi, les zones d’influence qui se déterminent aux bruits des canons. “Le monde post-1945 s’efface”, écrivait Alain Frachon dans Le Monde, vendredi dernier. Il citait longuement Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères, qui posait récemment ce constat: plus les puissances régionales prennent le dessus, moins le monde devient “multiplaire”, il voit les règles de droit disparaître.
“Traduction, en termes non diplomatiques: la loi de la jungle s’installe, pour autant qu’elle ait jamais cessé d’exister”, résume Alain Franchon. C’était déjà le cas en Ukraine avec l’invasion russe, dans le Haut Karabakh avec l’intervention de l’Azerbaidjan ou dans le Sahel avec les coups d’Etat à répétition.
Il reste désormais à voir où cette “loi de la jugle” nous mènera. Le chaos menace, avec toutes ses conséquences imprévisibles, militaires, économiques et énergétiques. Dans ce contexte brûlant, n’allons-nous pas vivre une nouvelle crise pétrolière d’ampleur? Ces prochaines jours et semaines diront si la raison peut l’emporter, malgré tout.
En attendant, ce massacre en Israël nous glace d’effroi, tant le monde semble en perdition.
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