Le temps est-il écoulé pour Trudeau ?
Justin Trudeau a peu de chances de remporter les prochaines élections au Canada, qui semblent davantage promises aux conservateurs et à leur combattif leader, Pierre Poilievre.
Justin Trudeau a entamé ce qui est presque à coup sûr sa dernière campagne électorale. Le Premier ministre canadien cherche avec détermination à obtenir un quatrième mandat consécutif, malgré une année de baisse constante de son soutien. Le désamour envers Trudeau et son parti libéral est tel que les trois quarts des électeurs canadiens les désapprouvent, selon des sondages réalisés dans le courant de 2024. L’assouplissement des taux d’intérêt, la baisse constante de l’inflation à un peu plus de 2% et le ralentissement de la hausse vertigineuse des prix de l’immobilier n’ont guère contribué à enrayer le déclin du soutien envers Justin Trudeau.
En septembre 2024, des élections spéciales dans deux circonscriptions, qui avaient été des sièges libéraux fiables pendant des années, ont permis de tester directement l’attrait pour le parti de Justin Trudeau. Les libéraux ont perdu les deux… Ce qui a suscité des questions sur le leadership de l’actuel Premier ministre de la part de partisans autrefois fidèles. Nombre d’entre eux ont jeté des regards envieux de l’autre côté de la frontière sud, après le changement rapide et sans douleur opéré par les démocrates aux États-Unis sur leur ticket présidentiel. Certains libéraux, dont Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre, ont commencé à mettre sur pied des campagnes embryonnaires au cas où Justin Trudeau choisissait de se retirer.
Trudeau vs Poilievre
Mais Justin Trudeau n’a l’intention d’aller nulle part. Âgé de 52 ans, il est aujourd’hui le plus ancien dirigeant du G7. Trudeau est déterminé à accueillir le prochain sommet du groupe dans les Rocheuses canadiennes en juin. Selon ses partisans, c’est cette vitrine, ainsi qu’une série attendue de nouvelles baisses des taux d’intérêt susceptibles de relancer une économie anémique, qui l’incite à poursuivre son travail. De même que la perspective d’affronter le combattif leader des conservateurs, Pierre Poilievre.
Pierre Poilievre a été élu au Parlement pour la première fois il y a 20 ans. Il n’avait que 25 ans. Sa cour assidue envers les jeunes électeurs de la classe ouvrière, qui avaient propulsé Justin Trudeau au pouvoir en 2015, semble porter ses fruits. Les conservateurs obtiennent rarement de bons scores auprès de ces électeurs. Mais l’accent mis par Pierre Poilievre sur l’inflation et le coût exorbitant du logement lui a valu un soutien inattendu. Les sondages suggèrent que les conservateurs remporteront une large majorité lors des prochaines élections. Celles-ci doivent avoir lieu avant la fin octobre 2025.
Quel que soit le vainqueur, il n’y aura guère de temps pour les réjouissances. Le Canada est fortement tributaire du commerce avec les États-Unis. Les échanges de biens et de services entre eux ont été évalués à 909 milliards de dollars en 2022. Mais cette formidable activité économique repose sur un accord de libre-échange nord-américain qui doit être réexaminé en 2026… Les négociations devant débuter en 2025. Le mépris personnel de Donald Trump envers Justin Trudeau, ainsi que sa promesse d’imposer des droits de douane de 10 à 20% sur toutes les importations, rendront ces discussions particulièrement stressantes pour les entreprises canadiennes et leurs employés.
Par Robert Russo, correspondant au Canada de “The Economist”
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