L’Amérique, premier exportateur d’armes au monde: l’Europe devrait s’en souvenir

F-35
A Lockheed Martin F-35A Lightning II. © Getty Images
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Sans surprise, l’Ukraine est devenue le premier importateur d’armes au monde au cours de la période 2020-2024. Dans le même temps, les importations européennes d’armes ont augmenté de 155 %, alors que les Etats-Unis ont encore augmenté leur part des exportations d’armement pour atteindre 43 % du volume mondial.

Selon les nouvelles données sur les transferts internationaux d’armes publiées aujourd’hui par le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri), les 10 premiers exportateurs d’armes en 2020-24 sont les mêmes qu’en 2015-19, mais la Russie (qui représente 7,8 % des exportations mondiales d’armes) chute à la troisième place derrière la France (9,6 %), tandis que l’Italie (4,8 %) passe de la 10ème à la 6ème place.

Aide à l’Ukraine

Au moins 35 États ont envoyé des armes à l’Ukraine depuis son invasion par la Russie en 2022. L’Ukraine a ainsi reçu 8,8 % des importations mondiales d’armes entre  2020 et 2024. La plupart des armes qui lui ont été fournies proviennent des États-Unis (45 %), suivis de l’Allemagne (12 %) et de la Pologne (11 %). L’Ukraine est le seul État européen figurant dans le Top 10 des plus grands importateurs en 2020-24, bien que de nombreux autres États européens aient considérablement augmenté leurs importations d’armes au cours de cette même période. « Nos données sur les transferts d’armement reflètent clairement une tendance au réarmement en cours des États européens face à la menace russe », souligne Mathew George, directeur du programme Transferts d’armes du Sipri.

Quelques chiffres :

Les exportations françaises d’armes vers l’Europe ont presque triplé (+187 %) entre 2015 et 2024.
Les importations d’armes majeures de l’Ukraine ont été multipliées par près de 100 durant la même période, faisant du pays le premier importateur mondial d’armes.
Les États-Unis détiennent 43 % des exportations mondiales d’armement en 2020-24, contre 35 % en 2015-19.
Les exportations d’armes de la Russie ont chuté de 64 % depuis 2015.

Dépendance des Etats européens membres de l’OTAN

Les importations d’armes des États européens membres de l’OTAN ont plus que doublé entre 2015 et 2024 (+105 %). Les États-Unis ont fourni 64 % de ces armes. Les autres principaux fournisseurs sont la France et la Corée du Sud (représentant chacune 6,5 %), l’Allemagne (4,7 %) et Israël (3,9 %). « Face à une Russie de plus en plus belliqueuse et à des relations transatlantiques tendues pendant la première présidence Trump, les États européens membres de l’OTAN ont pris des mesures pour réduire leur dépendance aux importations d’armes et pour renforcer l’industrie européenne de l’armement », précise Pieter Wezeman, chercheur principal au programme Transferts d’armes du Sipri. Pour la première fois depuis deux décennies, la plus grande part des exportations américaines d’armement en 2020-24 est allée à l’Europe (35 %) plutôt qu’au Moyen-Orient (33 %).

Le cas français


La France devient le deuxième plus grand fournisseur d’armement au monde en 2024, en livrant des armes à 65 États. Les exportations françaises d’armes majeures vers d’autres États européens ont presque triplé entre 2015 et 2024 (+187 %). Cela s’explique principalement par les livraisons d’avions de combat à la Grèce et à la Croatie, ainsi que par les livraisons d’armes à l’Ukraine. En outre, l’Inde a reçu de loin la plus grande part des exportations françaises d’armement (28 %), soit près du double de la part qui est allée à tous les destinataires européens réunis (15 %). Le deuxième plus grand destinataire d’armes majeures de la France est le Qatar (9,7 % des exportations françaises d’armement).

Les données du Sipri montre que  la relation entre les États-Unis et l’Europe en matière d’armement repose sur une forte interdépendance, où l’Europe reste largement dépendante des capacités militaires américaines, mais avec une volonté croissante de renforcer son autonomie stratégique.

Si l’Europe devait diminuer drastiquement ses commandes militaires vis-à-vis des Etats-Unis, une telle perte affecterait gravement les grandes entreprises de défense américaines, qui devraient compenser avec d’autres marchés (Asie, Moyen-Orient). Cela affaiblirait aussi l’influence stratégique américaine en Europe, qui pourrait se tourner vers des fournisseurs européens (France, Allemagne) ou diversifier ses sources (Corée du Sud, Israël, voire la Chine à long terme).

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