L’accord commercial UE – USA rassure certains secteurs, mais inquiète le Pharma en raison du flou entretenu par Trump

Médicaments, image d’illustration. © Getty Images
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Si l’aéronautique et certains secteurs agro-alimentaires poussent un soupir de soulagement, d’autres sont inquiets des flous entretenus par le président américain. C’est particulièrement le cas pour les médicaments ou les semiconducteurs. L’exemple d’AstraZeneca prouve qu’il y a de quoi être inquiet.

Alors que le Premier ministre français, François Bayrou, estime que l’accord commercial conclu entre l’Union européenne et les Etats-Unis est une “soumission”, les secteurs commencent déjà à décrypter ce qu’il leur en coûtera.

Il y a des soupirs de soulagement. L’aéronautique, par exemple, serait exemptée. Le GIFAS (groupement des industries françaises de l’aéronautique et du spatial) salue une “décision d’exemption, fruit d’un important travail de dialogue transatlantique à tous les niveaux, qui sera bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis”.

Le secteur des vins et spiritueux, pour qui les Etats-Unis représentent un débouché vital, espère: les spiritueux seraient exemptés, tandis que les organisations vinicoles croisent les doigts pour que ce soit aussi le cas pour leur production.

Le luxe se contente de ce qui se trouve sur la table. La directrice financière de LVMH, Cécile Cabanis, avait déclaré la semaine dernière que des droits de douane de 15 % seraient “un bon résultat”

L’inquiétude du Pharma

Pour d’autres secteurs, c’est la soupe à la grimace. Ainsi en est-il du Pharma, qui ne sait toujours pas à quel saint se vouer. Car les interprétations de l’accord divergent. Dès l’annonce faite, la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, et le président américain, Donald Trump, ont envoyés des signaux contradictoires.

Donald Trump a en effet laissé entendre que ce secteur du Pharma n’était pas concerné par l’accord. Or, il a déjà menacé de tarifs jusqu’à… 200%.

Le secteur est vital pour la Belgique: l’industrie pharma représente environ 50 % des exportations belges totales vers les États-Unis, pour environ 16,4 milliards d’euros.

La présidente de la Commission européenne, déjà fort critiquée par le résultat des négociations, insiste: ce sera bien 15%!

Des représentants américains ont affirmé à l’agence Bloomberg qu’une enquête pourrait être menée dans les trois semaines en vertu de la Section 232 du traité commercial de 1962 pour déterminer si des surtarifs pourraient être imposés, au-delà des 15%.

Cela vaudrait également pour les semi-conducteurs. Cette Section 232 concerne les domaines susceptibles de poser une menace pour la sécurité nationale américaine. Début juillet, Donald Trump avait déjà évoqué une possibilité d’augmenter les tarifs dans ces domaines d’ici la fin août.

Yves Verschueren, administrateur délégué d’essenscia, qui représente l’industrie, temporise : “Certes, un accord vaut mieux que pas d’accord du tout, et un tarif de 15 % est toujours préférable à un tarif de 30 %. Cela aurait donc pu être pire, mais cela n’en fait pas un bon accord pour autant. L’élément positif, c’est qu’on a évité une nouvelle escalade et qu’une certaine stabilisation semble possible. L’incertitude persistante a eu un impact négatif sur le climat d’investissement et le commerce mondial pendant des mois.”

Il ajoute: “Il faut néanmoins rester prudent: les modalités tarifaires pour les secteurs de la pharma et de la chimie doivent encore être précisées dans les prochaines semaines. Nous comptons sur le bon sens pour limiter au maximum les barrières commerciales. Mais la question de fond demeure : comment cet accord commercial va-t-il faire progresser l’économie européenne, renforcer le pouvoir d’achat et améliorer la compétitivité internationale de notre industrie?”.

L’incertitude, encore et toujours, comme une arme de chaos et de pouvoir.

“On espère évidemment d’avoir des nouvelles rapidement parce que l‘incertitude n’est jamais une bonne chose, surtout pour l’’investissement”, commente Caroline Ven, la CEO de pharma.be, l’association belge de l’industrie du médicament.

L’exemple d’AstraZeneca

Suite à la conclusion de l’accord commercial entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, le géant pharmaceutique britannique AstraZeneca avait annoncé le 22 juillet qu’il prévoit d’investir 50 milliards de dollars pour la fabrication de médicaments et la recherche et développement d’ici 2030 aux États-Unis, où plane la menace de droits de douane de Donald Trump sur le secteur.

Cet investissement “renforce notre confiance dans l’innovation américaine sur les produits biopharmaceutiques et notre engagement envers les millions de patients qui ont besoin de nos médicaments en Amérique et dans le monde”, a assuré lors de cette annonce le directeur général d’AstraZeneca, Pascal Soriot.

“Depuis des décennies, les Américains dépendent de l’approvisionnement étranger en produits pharmaceutiques essentiels, soulignait alors le secrétaire au Commerce américain, Howard Lutnick. Le président Trump et les nouvelles politiques tarifaires de notre pays visent à remédier à cette faiblesse structurelle”.

CQFD: il y a de quoi être inquiet.

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