Julien Compère et Hubert Védrine dissertent sur l’état du monde: “Que voulons-nous en tant qu’Européens ?”

Le patron du groupe belge FN Browning face à l’ancien ministre français des Affaires étrangères. À l’invitation de “Trends-Tendances”, le CEO Julien Compère et le diplomate Hubert Védrine ont croisé le couvert pour mieux disserter sur l’état du monde, l’Ukraine, l’Europe, l’industrie de la défense, Trump et Poutine. Action !
Il a été dans l’entourage très proche du président François Mitterrand à l’Elysée durant 14ans. Il est devenu ensuite ministre des Affaires étrangères sous le gouvernement socialiste de Lionel Jospin, de 1997 à 2002, en pleine cohabitation avec le président de droite Jacques Chirac. Diplomate de haut vol, Hubert Védrine est un expert en relations internationales qui a sorti, en 2001, Le Dictionnaire amoureux de la géopolitique.
Vu le succès public (plus de 40.000 exemplaires vendus) et surtout les dernières secousses sur l’échiquier mondial, les éditions Plon lui ont demandé de revoir son ouvrage (une première dans cette collection) et de l’adapter aux tourments de l’Ukraine, de Gaza et des États-Unis. C’est donc un Nouveau Dictionnaire amoureux de la géopolitique (608 pages) fraîchement sorti de presse que nous avons transmis à Julien Compère, CEO du groupe FN Browning (anciennement FN Herstal) pour cette interview croisée à La Villa Lorraine. Car l’industrie de la défense s’imprègne forcément de géopolitique…
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JULIEN COMPÈRE. J’ai un petit cadeau pour vous. C’est un livre sur l’histoire de notre société qui fête ses 135 ans.
HUBERT VÉDRINE. Impressionnant ! C’est gentil…
J.C. Nous sommes un groupe actif dans le secteur de l’armement, à la fois en défense et sécurité, en chasse et tir sportif. On a fait aussi des cycles et des véhicules au début du 20e siècle. Nous sommes détenus à 100% par la Région wallonne, le groupe emploie 3.000 personnes et réalise un petit milliard de chiffre d’affaires avec un footprint industriel en Europe et aux États-Unis.
H.V. Eh bien, bravo !
J.C. Historiquement, j’ai commencé ma carrière dans le domaine du droit. J’ai été directeur de cabinet du ministre wallon de l’Économie et puis, j’ai géré un hôpital, donc un secteur totalement différent…
H.V. Quel hôpital ?
J.C. Un hôpital universitaire à Liège. J’ai eu la chance de faire des choses assez différentes dans ma vie et là, avec FN Browning, nous sommes en train d’acquérir un groupe en France qui s’appelle Sofisport et qui est actif dans le domaine de la cartouche de chasse et du tir sportif. Le président du conseil de surveillance est Yves-Thibault de Silguy.
H.V. Ah oui ? Je le connais bien…
J.C. Vous étiez ensemble au conseil d’administration de LVMH, je pense…
H.V. Je l’ai connu avant ! Dans ses fonctions de conseiller d’Édouard Balladur, puis de Commissaire européen.
J.C. Ah voilà…
H.V. Et ce groupe français est à vendre ?
J.C. Oui. On va essayer de combiner les intérêts des deux groupes pour garder notre statut – ce n’est pas moi qui le dis – de leader mondial et de fleuron industriel belge dans un secteur qui revient sur le devant de la scène.
H.V. C’est vrai que l’invasion de l’Ukraine par Poutine a réveillé l’esprit de défense. Attention, pas l’Europe de la défense, mais l’esprit de défense en Europe dans le cadre de l’Alliance atlantique. Il y a énormément de pays qui étaient plus ou moins neutralistes, pacifistes, avec beaucoup de partis de gauche à l’ancienne qui étaient contre tout ça et qui ont été obligés de se réveiller. Donc oui, il y a un changement, il y a un esprit de défense qui est nouveau avec, à mon avis, une régression heureuse de tous les réflexes anti-armées, anti-armes, etc. Moi, je trouve ça plutôt bien, puisque ça fait très longtemps que je dénonce le fait que les Européens sont des Bisounours perdus dans Jurassic Park. C’est ma formule, tandis que Sigmar Gabriel, l’ancien ministre allemand des Affaires étrangères, disait : “Nous sommes des herbivores géopolitiques dans un monde de carnivores géopolitiques”. Alors, je ne suis pas plus pour la guerre que n’importe qui, mais je préfère que l’on soit réaliste.
J.C. Je pense que nous sommes aujourd’hui dans un monde qui se caractérise par un retour brutal du rapport de force. Je ne sais pas si le terme Bisounours est le bon, mais en tous les cas, les Européens n’ont pas maîtrisé cet aspect du rapport de force. On voit d’ailleurs comment Trump a amené la question sur l’accès aux minéraux des terres rares en Ukraine. Tout le monde a trouvé cette monnaie d’échange scandaleuse qui s’inscrit dans un rapport de force.
Les Européens sont des Bisounours perdus dans Jurassic Park.

Hubert Védrine, ancien ministre français des affaires étrangères
H.V. Je pense que le rapport de force n’a jamais complètement disparu. Il était dissimulé, enrobé d’une série de choses que les Européens ont acceptées. Il ne faut pas oublier que ce sont les Européens qui ont supplié les Américains de les protéger après la guerre. Aujourd’hui, on nous sert tout ce baratin “L’Europe, c’est la paix”, mais ce n’est pas vrai. L’Europe, ce n’est pas la mère de la paix, c’est la fille de la paix. La paix a été rétablie par les Soviétiques à Stalingrad et par les Américains avec le débarquement. Après, les Européens ont bien utilisé la paix. Et donc, ils sont la fille de la paix. Mais ils sont tellement convaincus de leur propre discours qu’ils sont sidérés par ce qui se passe aujourd’hui avec Trump et que ça va peut-être les obliger à prendre à bras le corps la question de…
TRENDS-TENDANCES. D’une Europe de la défense, enfin ?
H.V. Cela va être très très dur, parce que les Européens ont méthodiquement évité d’avoir à se prendre en charge comme puissance. Ça, c’est la réalité depuis 1945. Ce n’est pas un point de vue, mais une évidence historique. Combien de pays en Europe ont des armées capables ? Cinq ? Six ? On a inventé un commissaire européen à la Défense en 2024, mais il n’a aucun rôle car l’Union européenne n’a pas de compétence en la matière ! Donc si Trump dit maintenant “Débrouillez-vous !”, quels sont les pays qui vont accepter d’envoyer des troupes en Ukraine ? Pour faire quoi ? Comment le cessez-le-feu sera-t-il déterminé ? Où seront déployées les éventuelles troupes ? Et qui donnera les ordres ? Qui va dire au commandant en chef “Vous pouvez répliquer” ? Il n’y a aucune réponse à tout cela parce que ça fait 80 ans qu’on n’a pas à se poser ces questions. C’est vertigineux ! Alors, au lieu de parler d’une Europe de la défense, il faudrait plutôt renforcer le pôle européen au sein de l’Alliance atlantique.
J.C. Effectivement, je pense qu’on a aujourd’hui plus de questions que de réponses et c’est même le cas pour nous, industriels. Tout le monde considère que l’on doit rentrer aujourd’hui dans une économie de guerre, mais personne n’a encore déterminé ce qu’est une économie de guerre. Les termes qu’on emploie en Europe ne sont pas les vrais termes “économie de guerre” parce que ça voudrait dire que tout l’instrument productif ne sert plus qu’à ça et on n’en est pas là, tant mieux. Mais quels sont les réels besoins pour les cinq prochaines années? Personne ne nous donne suffisamment de visibilité là-dessus. La stratégie globale des Américains, c’est de rester la première puissance mondiale. Mais quelle est la stratégie des Européens ?
H.V. Les Européens devraient se dire que leur objectif commun est de préserver la civilisation européenne. Le mode de vie européen, c’est ce qu’on a inventé de mieux quand même, non ? À un moment donné, on a eu besoin d’alliés protecteurs. C’est fini ! Le moment est venu d’exister par nous-mêmes. Après, ce n’est que de la tactique. Faut-il être en guerre totale avec Trump ou bien faire semblant comme Macron ? Faut-il être plus souple avec la Chine comme le demande l’Allemagne ou pas ? Tout est tactique, en fait. Mais l’objectif numéro un, c’est de préserver la civilisation européenne. Donc, c’est le moment de s’affirmer. Mais ça nous oblige à faire des choix qu’on a récusés, parce que c’était trop compliqué, trop douloureux politiquement. C’est ça le sujet. Il faudrait des dirigeants européens très lucides, avec une immense culture géopolitique, historique – on en a de moins en moins – et qui prennent des décisions stratégiques en résistant aux mouvements quotidiens de l’opinion.
Le rapport Draghi qui invite à réindustrialiser l’Europe est un bon point de départ ?
J.C. Je pense que c’est le premier élément. Dans une entreprise, on détermine la stratégie à cinq ou 10 ans et en fonction de cette stratégie, on définit les moyens pour y aboutir. Donc, je répète : la stratégie des Européens, c’est quoi ? Je pense que, dans ce cadre-là, la réindustrialisation est un des moyens de préserver aussi ce mode de vie européen qui nous tient tous à cœur. Si demain, nous n’avons plus d’industrie en Europe, nous serons tellement dépendants des autres que nous ne pèseront plus sur le cours des choses. Dans ce cas, quelles perspectives offririons-nous alors à notre population ? Donc oui, le rapport Draghi est une base qui est plus que jamais nécessaire, mais il est sorti il y a tout juste six mois. Quelle est la suite ?
H.V. Une des voies ouvertes, c’est le pilier européen de l’Alliance. Il faut le renforcer.
J.C. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Je pense qu’il vaut mieux parler de pilier européen au sein de l’Alliance atlantique que d’Europe de la défense parce que, au moins, on a un cadre qui nous permet de travailler.
H.V. Le rêve européiste est un handicap. Il y a 30.000 mecs qui veulent faire des règlements sur les concombres. C’est à devenir cinglé ! Donc, il faut arrêter le rêve. Il n’empêche qu’on peut faire des choses énormes ensemble, y compris dans vos domaines. Le pilier européen de l’Alliance va encourager tous les industriels comme vous.
J.C. En Europe, on a parfois un problème de compréhension de la manière dont on pose le débat. Plus d’Europe, ça ne veut pas nécessairement dire plus d’Union européenne. Ça peut être plus d’Europe via des coopérations renforcées entre les pays membres sur certains projets spécifiques en dehors du cadre de l’Union européenne. Ça peut être effectivement le renforcement du pilier européen au sein de l’Otan.
H.V. C’est très important, cette distinction. Les coopérations renforcées, c’est une très bonne idée. Mais la Commission a tout fait pour qu’il n’y en ait pas, puisqu’elle veut garder le contrôle complet.
J.C. Quand la France et l’Allemagne concluent un accord sur le MGCS (un programme commun de char du futur, ndlr) et malgré le fait que ça prend du temps, ça se fait en dehors de tout cadre européen. C’est très bien ! Quand il y a un accord sur le SCAF (le système de combat aérien du futur, ndlr), ça se fait aussi en dehors du cadre européen…
Le changement de paradigme imposé par Trump, c’est bon pour les affaires ?
J.C. Ce n’est pas une question de business. C’est une question, en tant que citoyen, de se dire : il n’y a pas de paix sans sécurité, il n’y a pas de sécurité sans défense, il n’y a pas de défense sans industrie de la défense. Nous avons un outil de production qui est disponible. Il l’a été pendant des années, mais après la chute du Mur de Berlin, l’Europe a vécu sur les dividendes de la paix. Elle a peu investi dans le secteur militaire. Mais nous avons eu la possibilité d’aller à l’exportation…
H.V. J’ai une question à vous poser. En tant qu’industriel, pensez-vous qu’il peut y avoir un arrangement entre les producteurs européens pour se répartir des programmes, pour coopérer au lieu de se faire concurrence sans arrêt ?
J.C. Je pense qu’il y aurait la possibilité de trouver un arrangement qui convienne à tout le monde. Mais c’est toujours la même chose en Europe : il faut que chacun puisse un peu, à un moment donné, en retirer son propre avantage…
H.V. Ça ne vous paraît pas impossible ?
J.C. Intellectuellement, ça ne me paraît pas impossible. Je pense qu’on pourrait y arriver. Mais on en est tellement loin aujourd’hui. On est plutôt dans un schéma, qui m’inquiète parfois, où chacun voudrait avoir sa propre unité de production chez lui et relancer son propre type d’industrie. Et ça, c’est un peu le risque. Donc, il faudrait qu’il y ait un leadership sur ce sujet-là.
H.V. Il faut une Europe sérieusement réarmée, dissuasive, mais ça coûte cher et les gens ne sont pas demandeurs. Les électeurs veulent du social. En France, c’est la caricature “Ils veulent travailler moins et gagner plus”. En Belgique un peu aussi, je pense…
J.C. Oui, mais on sent qu’il y a un gros travail qui est fait de la part des autorités pour conscientiser sur l’importance de réinvestir dans la défense. C’est quelque chose qui n’est pas naturel, effectivement, pour nos populations et c’est d’ailleurs compréhensible parce qu’on préfère investir dans des services sociaux…

Mais la fabrication d’armes est moins taboue qu’avant, non ? Aujourd’hui, vous êtes fier de travailler pour FN Browning ?
J.C. J’ai toujours été fier parce que je sais que nous contribuons à quelque chose qui est nécessaire. Mais aujourd’hui, les gens sont effectivement plus fiers de ce que l’on fait.
H.V. Maintenant, c’est mieux compris ?
J.C. Oui, maintenant c’est moins tabou. D’ailleurs, Trends-Tendances m’a fait l’immense honneur de me nominer pour le titre de Manager de l’Année en 2024 et ça, je pense que ça n’aurait pas été possible il y a quelques années. Cela démontre l’importance du secteur de la défense qui est plus crucial que jamais.
Hubert Védrine, vous avez eu l’occasion de rencontrer Vladimir Poutine en 2000. Quels souvenirs gardez-vous de lui et faut-il avoir peur aujourd’hui du stratège ?
H.V. C’est la première année où il était président. Il était intelligent, très rapide, très dialectique, très animé d’un patriotisme russe humilié. Mais j’ai tendance à rappeler que c’est Boris Eltsine, avant Poutine, qui avait mis dans le traité Russie-Ukraine que les Russes avaient un droit de regard sur la façon dont les russophones étaient traités là-bas.
J.C. Oui, vous le rappelez dans votre livre.
H.V. En gros, tous les Russes pensent que l’Ukraine, c’est un truc bidon. Je ne dis pas que c’est bien. Je dis qu’il ne faut pas faire comme les médias occidentaux d’Europe de l’Ouest et de Pologne qui présentent Poutine comme une sorte d’Hitler ou de monstre. Je pense que c’est un homme dangereux, mais les exagérations sur ses intentions en Europe ne sont pas convaincantes. Je pense que s’il avait voulu envahir un autre pays, il l’aurait fait il y a deux ans, quand l’Otan était affaiblie.
Plutôt que de pleurer sur ce qu’est devenue l’Amérique, posons-nous la question: que voulons-nous en tant qu’Européens ?”

Julien Compère, CEO de FN Browning
Donc aucun risque pour les pays baltes aujourd’hui ?
H.V. Je ne peux pas le démontrer. Mais ça me paraît aberrant d’imaginer que Poutine veuille le faire maintenant et pas il y a deux ou trois ans. Car l’Otan s’est réveillée, il y a d’énormes manœuvres à la frontière nord, les budgets de la défense sont en augmentation partout et il y a une sorte de mur entre les pays baltes et le reste. Alors, pourquoi se lancerait-il là-dedans maintenant? Il faut être cinglé ! D’autant plus qu’il a fait régresser la Russie. Il y a deux millions de Russes modernes qui ont quitté le pays. Poutine est dans la main de la Chine. C’est tragique pour lui.
L’Amérique de Trump, comme le dit Jacques Attali, est-elle en train de devenir une dictature ?
H.V. C’est le genre de réflexion qui ne sert à rien. Je ne dis pas que ce n’est pas fondé, mais c’est du temps perdu. Le peuple américain a donné la majorité à Trump, les gens ont demandé un coup d’arrêt à la mondialisation débridée, un coup d’arrêt au progressisme, un coup d’arrêt au wokisme qui est un véritable poison. Alors, même si ça devient la dictature américaine, qu’est-ce qu’on va faire ? On va faire la guerre contre l’Amérique ?
J.C. Je vais souvent aux États-Unis parce que nous avons beaucoup d’usines là-bas. Je vais dans un endroit que les Européens connaissent mal, le centre des États-Unis, le Missouri, mais aussi en Utah, en Caroline du Sud, etc. La base de Trump, elle est très forte. C’est un vote d’adhésion pour des questions qui sont liées à des thèmes socio-économiques : la fin de l’inflation, l’augmentation du pouvoir d’achat liée à des questions qui touchent à l’immigration, etc. C’est donc une vraie élection avec un président bien élu. Plutôt que de pleurer sur ce qu’est devenue l’Amérique, posons-nous la question : que voulons-nous en tant qu’Européens ?
H.V. C’est un bouleversement total. Donc, il faut dépasser rapidement le stade de la sidération, de l’indignation et des lamentations pour se dire “Que fait-on maintenant ?”. Sur la guerre commerciale, la régulation, la poursuite de l’écologisation, l’Ukraine et le Proche-Orient, ce ne seront pas les mêmes réponses. Ça nous oblige à des choix historiques qui seront compliqués pour nous. Je pense aussi que Trump va rencontrer beaucoup de difficultés. Il y aura la guérilla judiciaire contre lui, sa politique commerciale va relancer l’inflation et il sera confronté à de vraies résistances. Mais le traiter de fasciste ne sert à rien.
Hubert Védrine
• Né le 31 juillet 1947 à Bellegarde-en-Marche (France)
• Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris en 1968 et de l’ENA en 1974
• Conseiller diplomatique du président François Mitterrand de 1981 à 1986
• Porte-parole puis secrétaire général du même président de 1988 à 1995
• Ministre français des Affaires étrangères de 1997 à 2002 sous le gouvernement Jospin
• Auteur d’une vingtaine d’ouvrages.
Julien Compère
• Né le 3 août 1977 à Liège
• Diplômé en droit de l’ULiège en 2003
• Master of Laws à l’Université de Londres en 2012
• Conseiller puis chef de cabinet du ministre wallon de l’Economie Jean-Claude Marcourt de 2004 à 2013
• Directeur général du CHU de Liège de 2013 à 2021
• CEO du groupe FN Browning (anciennement FN Herstal) depuis octobre 2021
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