Historique: la politique budgétaire allemande fait demi-tour


Pour financer son réarmement, le nouveau gouvernement allemand devrait faire sauter le plafond de la dette, un revirement historique.
Les choses vont vite, très vite. Alors que le découplage des États-Unis et de l’Europe se poursuit – le Président américain Donald Trump a devant le Congrès américain réinsisté sur sa volonté de saisir le Danemark – l’Allemagne vient de mettre fin, discrètement, à plus d’un demi-siècle de rigorisme budgétaire en admettant que le pays devait s’endetter pour se réarmer.
Whatever it takes
La CDU/CSU et le SPD, qui négocient la constitution d’un niveau gouvernement, sont déjà d’accord sur une chose : faire exploser le plafond de la dette pour les dépenses de défense. « La situation internationale est telle que l’Europe et l’Allemagne doivent fournir très rapidement des efforts considérables », explique Friedrich Merz qui devrait être le prochain chancelier allemand. C’est ce que certains commentateurs appellent le moment « whatever it takes » ( quoi qu’il en coûte »), expression rendue populaire par Mario Draghi en 2012 pour calmer la crise de la zone euro, reprise par de nombreux pays européens au moment de la crise du covid, et qui réapparaît donc aujourd’hui au moment de cette crise géopolitique majeure.
Mais quel était le plafond de la dette allemande ? Ce« Schuldenbremse » (frein à l’endettement), qui a été décidé en 2009, empêche le gouvernement allemand d’augmenter annuellement la dette de plus de 0,35% du PIB. C’est une disposition constitutionnelle. Pour la modifier, il faut la majorité des deux tiers au parlement. Or, les nouvelles élections législatives ont doublé le poids de l’extrême-droite (l’AfD) qui, avec la gauche radicale (Die Linke) totalisent 216 sièges sur 608 et pourraient donc faire échouer cette modification constitutionnelle. Mais l’ancien parlement n’a pas encore été dissous et la majorité des deux tiers pourrait y être plus facilement acquise si les Verts apportent leurs voix. L’ancien parlement pourrait ainsi se réunir ce mois-ci, avant sa dissolution, pour voter cette nouvelle disposition.
Fonds de 500 milliards
Pratiquement, le nouveau gouvernement allemand ne tiendrait pas compte, dans le calcul de sa dette, des dépenses de défense dépassant 1% du PIB. Par ailleurs, les partenaires du nouveau gouvernement travaillent aussi à la constitution d’un fonds de 500 milliards destiné à développer et moderniser les infrastructures du pays.
Ce demi-tour budgétaire est d’autant plus important qu’il devrait permettre à l’Union européenne de se mettre d’accord plus rapidement sur l’initiative Rearm Europe, un plan de 800 milliards d’euros pour soutenir le réarmement européen et l’aide à l’Ukraine. Les marchés européens ont accueilli très positivement ce revirement budgétaire allemand, qui devrait donner davantage de commandes à l’industrie européenne et soutenir le PIB de la première économie de l’Union.
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