France: le barrage républicain au Rassemblement National a de sérieuses fissures
Alors que l’extrême droite est aux portes du pouvoir, les macronistes, les partisans d’Edouard Philippe et les Républicains adoptent des stratégies à géométrie variable. D’autant que l’épouvantail Mélenchon effraie, à juste titre.
Le Rassemblement National est aux portes du pouvoir. La France se réveille groggy, mais sans que l’on ne puisse dire qu’il s’agit d’une surprise. Tous les sondages annonçaient une extrême droite largement au-dessus des 30%, ce qui est arrivé: au final, le RN obtient 33,2%, le Nouveau Front Populaire 28,1%, Ensemble pour la République 21% et les Républicains 10%.
Pour autant, le barrage pour empêcher le parti de Jordan Bardella d’obtenir une majorité absolue à l’issue du second tour est sérieusement ébréché. Le futur Premier ministre peut espérer obtenir des réserves de voix à droite, voire au centre-droit, pour faire barrage à une autre menace, celle de l’extrême gauche et d’un Jean-Luc Mélenchon qui ne cesse de défier jusque dans son propre camp, notamment en tenant le haut du pavé dimanche soir lors d’une manifestation à la Bastille.
La France, alors, pourrait bel et bien accueillir les Jeux Olympiques avec le Rassemblement National à sa tête.
Quel front républicain?
Dans une réaction ultra-rapide, le président Emmanuel Macron, décrié pour avoir provoqué ces élections législatives, a souligné dimanche soir la nécessité d’avoir un large front “démocrate et républicain”. Son Premier ministre, Gabriel Attal, souligne “le devoir moral” d’empêcher le Rassemblement National d’obtenir une majorité absolue. Mais derrière cela, que de nuances…
Les lieutenants du camp présidentiel ont souligné en soirée que l’Elysée analysait les résultats circonscription par circonscription et que le barrage se ferait de façon intelligente: désistement en cas de victoire possible d’un candidat du Nouveau Front Populaire “acceptable”, soutien aux Républicains, mais maintien lorsqu’il s’agit d’un candidat de la France Insoumise ayant tenu des propos contestables ou antisémites. Voilà la ligne officielle, version macroniste”.
Mais l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, qui a fait campagne sous sa bannière Horizons, estime de façon plus tranchée: “Aucune voix ne doit se porter sur les candidats RN, ni sur ceux de LFI“. Un “ni – ni” qui risque d’être favorable au RN. Quant aux Républicains “légitimes”, qui ne se sont pas alliés au RN, ils ne donnent aucune consigne de vote.
Le front “républicain et démocratie” risque d’être poreux alors que la dédiabolisation du RN est en marche. Et que Jordan Bardella prend déjà une posture de “Premier ministre de tous les Français”.
La responsabilité Mélenchon
Cette situation inédite est largement de la faute de Jean-Luc Mélenchon et de ses proches alliés. Le leader de la France Insoumise ne cesse de défier en se présentant comme candidat Premier ministre ou en étant omniprésent, jusque lors du rassemblement démocrate d’opposition à l’extrême droite, dimanche soir.
Or, l’ancien ministre de l’Intérieur est devenu un repoussoir jusqu’au centre-droit en raison de ses postures radicales ou des relents antisémites exprimés dans le cadre du conflit au Proche-Orient. Sur les plateaux télévisés, dimanche soir, les candidats du Nouveau Front Populaire rappelaient qu’il ne deviendrait en aucun cas leur candidat pour Matignon ou qu’aucun candidat LFI “n’a été condamné pour antisémitisme, alors que le RN est l’hériter du FN créé par un ancien Waffen SS”.
La rhétorique, toutefois, a du mal à passer dans un contexte de polarisation extrême. L’extrême gauche, a son corps défendant, pourrait-elle provoquer de l’arrivée de l’extrême droite à Matignon? Ce serait le comble de l’Histoire. Il reste une semaine au président et à ses alliés pour tenter d’éteindre l’incendie.
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