Face à Trump et Poutine, l’Europe tente de sauver Kiev

L'Europe et l'Ukraine sont à un moment de tournant existentiel. Ici Ursula Von der Leyen et Volodymyr Zelensky en novembre 2023. © Belga
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé lundi travailler avec ses alliés européens à l’élaboration de “positions communes” afin de tenter de convaincre le président américain Donald Trump de prendre en compte leurs intérêts face à la Russie.

“Nous allons définir nos positions communes – ce que nous voulons obtenir et ce qui n’est pas négociable. Ces positions seront présentées à nos partenaires américains”, a-t-il déclaré sur Telegram après une rencontre à Londres dimanche avec ses alliés.

La priorité est de parvenir à “une paix solide et durable, ainsi qu’à un bon accord pour mettre fin à la guerre”, a souligné le chef d’État ukrainien.

Ébranlés par le rapprochement entre Washington et Moscou et secoués par les virulentes attaques dont M. Zelensky a fait l’objet vendredi, en mondovision depuis la Maison Blanche, les alliés de Kiev ont tenté dimanche de resserrer les rangs.

Invités par le Premier ministre britannique Keir Starmer, quinze dirigeants européens, dont le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz, ont affiché leur engagement à soutenir Kiev et à renforcer leurs capacités de défense face à la Russie.

Vendredi, devant les caméras du monde entier à la Maison Blanche, M. Zelensky s’était vu accuser par M. Trump de “s’être mis en très mauvaise posture” et sommer de pactiser avec la Russie, faute de quoi les États-Unis le laisseraient “tomber”.

Accord sur les minerais

En réponse, M. Zelensky avait écourté son séjour à Washington, et l’accord sur l’exploitation des minerais ukrainiens par les États-Unis, qui devait être signé à cette occasion, ne l’a finalement pas été.

Les dirigeants européens, rejoints à Londres par la Turquie, le secrétaire général de l’OTAN Mark Rutte et le Premier ministre canadien Justin Trudeau, ont convenu dimanche de la nécessité de maintenir les États-Unis à leurs côtés.

M. Zelensky s’est à cet effet dit prêt à signer l’accord sur les minerais “si toutes les parties sont prêtes”.

“Je suis prêt à envisager tous les formats constructifs dans les relations avec les États-Unis. Je pense que nous avons tout ce qu’il faut”, a-t-il déclaré face à la presse, ajoutant toutefois qu’il était essentiel de “comprendre certaines lignes rouges” ukrainiennes.

Kiev exige notamment des garanties de sécurité en cas de cessez-le-feu, que Washington a jusqu’à présent refusé de lui accorder.

Le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, a accusé dimanche soir M. Zelensky d’avoir “tout fait capoter” en refusant de signer l’accord en l’état.

Dans ce contexte, les alliés européens de l’Ukraine ont tenté dimanche de reprendre l’initiative. Paris et Londres ont proposé une trêve partielle d’un mois en Ukraine.

Il s’agirait d’une trêve “dans les airs, sur les mers” et concernant les frappes sur “les infrastructures énergétiques”, a précisé M. Macron dans le quotidien Le Figaro.

L’avantage d’une telle trêve, qui exclut les opérations terrestres, est qu’”on sait la mesurer”, alors que le front est immense, “l’équivalent de la ligne Paris-Budapest”, a-t-il ajouté.

M. Starmer a de son côté souligné qu’”un certain nombre de pays” avaient exprimé leur volonté de rejoindre “une coalition des bonnes volontés” pour défendre un futur accord de paix.

“L’Europe doit faire le gros du travail, mais pour défendre la paix sur notre continent et réussir, cet effort doit être fortement soutenu par les États-Unis”, a-t-il insisté.

“Pas l’intention de capituler”

Insistant elle aussi sur la nécessité de “garanties de sécurité globales” pour l’Ukraine, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé vouloir présenter un plan pour “réarmer l’Europe” jeudi, lors d’un sommet spécial de l’UE à Bruxelles.

“Davantage de pays européens vont augmenter leurs dépenses de défense”, a assuré M. Rutte, saluant une “très bonne nouvelle”.

“L’Ukraine est victime des agressions russes, et cette vérité demeure inébranlable pour tous”, a martelé M. Scholz, dont le pays est le deuxième fournisseur d’aide à Kiev depuis l’invasion russe, derrière les États-Unis, avec un total de 44 milliards d’euros.

Face au président russe Vladimir Poutine, il s’agit d’envoyer le message “que l’Occident n’a pas l’intention de capituler devant son chantage et son agression”, a déclaré son homologue polonais Donald Tusk.

Dimanche, Washington a encore fait monter la pression sur M. Zelensky en laissant planer l’idée qu’il pourrait devoir quitter le pouvoir. “Nous avons besoin d’un dirigeant capable de traiter avec nous, de traiter avec les Russes à un moment et de mettre fin à cette guerre”, a déclaré Mike Waltz, conseiller à la sécurité nationale de M. Trump.

Le président ukrainien a répliqué qu’il ne serait “pas si facile” de le remplacer, “vu ce qui se passe, vu le soutien” dont il bénéficie.

“Il ne s’agirait pas juste d’organiser des élections. Il faudrait aussi m’empêcher de me présenter”, a-t-il ajouté, répétant toutefois qu’il était prêt à quitter son poste en échange d’une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.

Washington et Moscou, qui se réjouit du changement radical de la politique américaine, ont entamé le mois dernier, sans inviter l’Ukraine ni les Européens, des négociations pour mettre fin à la guerre. Le président américain refuse d’ailleurs de considérer Vladimir Poutine comme responsable du conflit.

Évoquant les craintes suscitées par ce rapprochement, M. Trump a jugé dimanche soir sur son réseau Truth Social que “nous devrions passer moins de temps à nous inquiéter de Poutine et plus de temps à nous inquiéter des gangs de migrants violeurs”.

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