Entre l’Argentine de Javier Milei et le FMI, les astres pourraient s’aligner

Javier Milei remporte la présidentielle. (Photo by Tomas Cuesta/Getty Images)

Bailleur essentiel pour l’économie argentine, le Fonds monétaire international (FMI) peut-il s’entendre avec le nouveau président élu, l’ultralibéral Javier Milei? Difficile à dire mais de l’avis de spécialistes, le dialogue pourrait s’avérer “relativement facile” au final.

La victoire de cet économiste ultralibéral et antisystème a provoqué un véritable tremblement de terre dans le pays sud-américain, dont la relation avec le Fonds, venu à son secours plus de 20 fois depuis 1956, a toujours été complexe. Face à une inflation qui dépasse les 140% en rythme annuel et un taux de pauvreté de 40%, M. Milei a fait de l’économie sa priorité, promettant de larges coupes dans les dépenses publiques.

Ces derniers mois, il promettait même un ajustement “bien plus fort que celui demandé par le FMI”, qu’il définissait alors comme un “mécanisme pervers qui favorise les gouvernements irresponsables”.

“Hors-piste”

La situation est tellement mauvaise qu’un ajustement majeur se justifie pleinement, au moins sur le plan budgétaire“, estime Arturo Porzecanski, chercheur pour le Wilson Center et l’Université américaine, tous deux basés à Washington. Le programme d’aide actuel du FMI à destination de l’Argentine, d’un montant total de 44 milliards de dollars “est  totalement hors-piste car le gouvernement sortant n’a pas respecté les objectifs budgétaires, entre autres”, souligne M. Porzecanski, interrogé par l’AFP, notamment du fait de dépenses supplémentaires visant à soutenir la candidature de son ministre de l’économie, Sergio Massa, finalement battu dimanche.

La conséquence devrait être claire: “le FMI n’approuvera pas” le prochain déboursement, qui devrait être annoncé à la fin du mois, ce qui obligera le nouveau gouvernement à trouver les fonds nécessaires pour rembourser ses échéances. Dans l’immédiat, la victoire de Javier Milei “crée de l’incertitude car personne ne sait ce qu’il va faire”, estime pour sa part, auprès de l’AFP, Claudio Loser, ancien directeur du département hémisphère ouest du FMI et désormais président du cabinet Centennial America Latina, “il faut qu’il détaille son programme”.

Lundi, la directrice générale du Fonds, Kristalina Georgieva, a tendu la main vers M. Milei, espérant “collaborer étroitement” avec lui afin de “mettre en place un programme solide afin de maintenir la stabilité macroéconomique et renforcer une croissance inclusive pour tous les Argentins”, via un message sur X (ex-Twitter).

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Le dialogue entre l’institution et le président élu devrait cependant être “relativement facile”, estime M. Loser.

Javier Milei va rejoindre la Casa Rosada, siège de la présidence argentine, avec l’intention de tout remettre à plat mais ses plans pourraient être réduits à néant sans le soutien du Congrès, dans lequel son parti, La Libertad Avanza, ne détenant que 72 sièges au Sénat et 38 à la Chambre, est loin de la majorité.

Rien ne sera dès lors possible sans former d’alliances avec d’autres formations politiques.

Avec ou sans dollarisation

Une large vague de privatisations fait partie de ses priorités pour réformer l’Etat. “Tout ce qui peut être entre les mains du secteur privé le sera”, a répété lundi M. Milei, qui s’est montré cependant plus ambigu concernant une autre de ses promesses de campagne: la dollarisation de l’économie argentine. “Le point central est de fermer la Banque centrale, ensuite la monnaie sera celle que les Argentins choisiront librement”, a-t-il simplement déclaré.

Pour Claudio Loser, la “dollarisation n’est pas une solution aux problèmes de l’Argentine, comme elle ne l’a pas été en Equateur ou au Salvador” car “il manque un appui significatif de l’extérieur pour disposer des dollars suffisants”, il faut dès lors “concentrer son attention sur d’autres choses”.

A l’inverse, Arturo Porzecanski y voit une “bonne idée” mais rappelle que, dans les prochains mois, “le nouveau gouvernement ne disposera pas des dollars nécessaires”, qui devrait l’amener à envisager “un chemin intermédiaire”. Il s’agirait dès lors de légaliser “la détention, l’épargne et les transactions réalisées en dollar, avec un régime de change permettant la circulation simultanée du peso et du dollar et offrant aux Argentins le choix entre les deux monnaies en totale liberté”, détaille-t-il.

Pour l’heure, les dollars sont rares en Argentine, les réserves de la Banque centrale très faibles, voire négatives, selon certains économistes – dont le président élu – et plusieurs taux de change coexistent, selon les activités. Et l’accès au dollar reste très contrôlé.

Après avoir renversé le système politique argentin, M. Milei est désormais attendu sur ses premières décisions, et en premier lieu le nom de son ministre de l’Economie, que les marchés, comme le FMI, espèrent connaître prochainement.

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