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Données effacées, censure, financements coupés : l’UCLouvain dénonce les menaces de Trump sur la recherche

Un projet de l'UCLouvain financé par USAID a été brutalement interrompu », confirme la prorectrice.

Depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, la recherche scientifique mondiale fait face à des restrictions alarmantes. À l’UCLouvain, comme dans de nombreuses autres institutions universitaires, l’inquiétude est palpable. Agnès Guiderdoni, prorectrice à la recherche, tire la sonnette d’alarme et dénonce une atteinte grave à la liberté académique.

L’UCLouvain collabore étroitement avec de nombreuses institutions américaines dans le cadre de projets de recherche, de publications communes et d’échanges académiques. Les mesures instaurées par l’administration Trump menacent désormais ces partenariats cruciaux. “Nous avons au sein de notre université de très nombreuses collaborations avec des institutions américaines ou avec des collègues américains”, explique Agnès Guiderdoni prorectrice à la recherche dans une interview publiée sur le site de l’université néolouvaniste. “Si nous ne pouvons plus compter sur les données fournies par les grandes agences fédérales comme la National Science Foundation (NSF) ou les National Institutes of Health (NIH), cela peut impacter, par ricochet, les recherches menées dans de nombreux pays.”

L’attaque est mondiale et affecte bien plus que les États-Unis.

Agnès Guiderdoni

prorectrice à la recherche à l’UCLouvain.

« Une attaque contre la science mondiale »

La revue Nature a résumé la situation par une phrase saisissante : « Assault on science anywhere is an assault on science everywhere” (ndlr: “Une attaque contre la science n’importe où est une attaque contre la science partout.”) Pour Agnès Guiderdoni, l’attaque est mondiale et affecte bien plus que les États-Unis. « Nos collègues américains vivent une situation extrêmement difficile, marquée par la peur de perdre leur emploi ou de voir leurs travaux censurés ou effacés », alerte-t-elle.

Pour les quelques projets financés directement par la recherche américaine, la conséquence est simple. « Hélas : c’est l’arrêt du projet », déplore la prorectrice à la recherche. « À l’avenir, il se pourrait aussi que certaines dépenses ne soient pas éligibles, que le développement de certains contenus scientifiques soit frappé d’interdiction comme c’est par exemple le cas pour les domaines de l’équité, diversité et inclusion (EDI), la climatologie ou l’épidémiologie. Mais l’impact va bien au-delà des financements directs. C’est toute la chaîne de la recherche qui est touchée », expose-t-elle.

Agnès Guiderdoni, prorectrice à la recherche de l’UCLouvain. Copy: Aurore Delsoir.

La réduction des financements des instituts fédéraux pour la santé, si elle est confirmée dans son entièreté, va avoir des effets partout dans le monde. Les 47 milliards de dollars, distribués chaque année, assuraient une partie essentielle de l’écosystème de la recherche biomédicale mondiale via de très nombreux partenariats, explique la responsable de l’UCLouvain.

Des financements menacés

Bien que peu de projets de l’UCLouvain soient directement financés par les États-Unis, certains ont déjà subi les conséquences des nouvelles directives. « Par exemple, un projet financé par USAID a été brutalement interrompu », confirme la prorectrice.

Ce qui est plus préoccupant, c’est que le rôle de très importantes agences fédérales de recherche telles que la National Science Foundation (NSF), les National Institutes of Health (NIH), la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) et d’autres organisations touchées par les mesures de la nouvelle administration américaine va bien au-delà du seul rôle de bailleur de fonds. Ces agences fournissent des données essentielles pour la qualité et la validité des recherches dans le monde entier. « Or, nous assistons à une purge et une censure des données qui y sont stockées, avec la disparition de milliers de pages web liées notamment à la santé, au changement climatique ou aux politiques d’égalité », alerte la responsable académique.

« La liberté académique ne doit en aucun cas être compromise »

Agnès Guiderdoni, prorectrice à la recherche à l’UCLouvain.

Des répercussions déjà visibles en Belgique

Les effets de cette politique américaine répressive pourraient s’étendre bien au-delà des frontières américaines. « La censure peut s’exercer indirectement sur les recherches en Europe et partout dans le monde », prévient Guiderdoni. Le risque est que, par volonté de maintenir les collaborations, les chercheurs européens finissent par se conformer aux injonctions idéologiques américaines, affaiblissant ainsi leur liberté académique.

L’université sur ses gardes

En Belgique, les répercussions sont déjà visibles. Des chercheurs des universités de Mons et de Liège rapportent que leurs abstracts soumis pour des congrès aux États-Unis ont fait l’objet de demandes explicites de mise en conformité avec les orientations idéologiques de l’administration Trump. Certains témoignent également de la disparition de publications scientifiques dans des bases de données comme PubMed (National Library of Medicine), en raison de l’utilisation de mots-clés désormais proscrits par l’administration américaine. Ces pressions idéologiques compromettent gravement la liberté académique et mettent en lumière un mouvement de censure inédit, selon l’UCLouvain.

Face à ces menaces, l’université dit rester sur ses gardes. Agnès Guiderdoni a demandé aux présidents d’institut de recenser les impacts concrets sur les projets en cours. Cependant, elle reste ferme sur un point : « la liberté académique ne doit en aucun cas être compromise ».

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