Dans les îles grecques, l’épineuse quête d’un “équilibre” touristique

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Fraîchement descendue du ferry parti du Pirée, Nadia Romon, bob noir sur la tête, prévient être en quête d’”authenticité” pour ses vacances sur l’île grecque d’Hydra, qu’elle espère passer loin des autres touristes, pourtant nombreux à flâner sur le port.

Pour cette Française de 55 ans, hors de question d’opter pour les destinations reines, comme Mykonos ou Santorin. “On n’en profiterait pas! Trop de monde, trop de stress”, tranche-t-elle. Mais sa quête, partagée par beaucoup de vacanciers, est de plus en plus compliquée tant la Grèce et ses eaux cristallines attirent.

Une popularité devenue un défi pour ce pays, qui dépend du tourisme pour un quart de son PIB mais tient désormais à préserver son image alors que menace sur certaines îles le surtourisme. La ministre du Tourisme, Olga Kefaloyanni, assure à l’AFP qu’il faut “trouver un équilibre” entre les gains économiques et la “pression” imposée sur l’environnement ainsi que la population locale.

L’an dernier, 32,7 millions de touristes étrangers se sont rendus dans le pays, du jamais-vu, malgré des incendies meurtriers et une longue canicule. “2024 a commencé avec une importante augmentation” et devrait être “une nouvelle année record”, estime Olga Kefaloyanni.

Dans ces conditions, “pas facile” de s’éloigner des foules, juge Matei Paun, vacancier roumain de 52 ans qui regarde les baigneurs plonger dans le turquoise de la mer Egée. Ce grand amateur de vacances grecques donne une astuce, privilégier les îles n’ayant “pas d’aéroport”, comme Hydra, qui se trouve dans le golfe Saronique, à environ 1H30 de bateau du Pirée, le grand port proche d’Athènes.

“Inondé de touristes”

Comme leurs clients, plusieurs commerçants de l’île citent Mykonos et Santorin en contre-exemples surpeuplés. “Il faut maintenir l’élégance” d’Hydra, défend Nikos Daglis, restaurateur de 52 ans, dans la cour ombragée de son établissement, Plakostroto. L’île, où les voitures sont interdites, profite d’une image chic alimentée par les nombreux artistes tombés sous son charme, au premier rang desquels le chanteur Leonard Cohen.

Malgré ses prix élevés, Hydra est “inondée de touristes” depuis la fin des restrictions de voyage causées par la pandémie de Covid, déclare Harriet Jarman, qui organise des balades à cheval. Elle voit plutôt cela d’un bon oeil. “Ici on n’a aucune autre industrie. S’il n’y avait pas le tourisme, qu’est-ce qu’on ferait?”, avance cette Anglaise, installée sur l’île depuis une dizaine d’années.

Hilda Eksian, gérante de l’hôtel Phaedra, juge néanmoins que la situation est “un peu hors de contrôle”. Effarée, cette Grecque de 68 ans assure voir des chambres à louer pour 1.600 euros la nuit. L’été dernier, il était selon elle presque impossible de trouver “un transat à la plage” ou une table libre au restaurant. Hydra “ne peut pas supporter davantage de gens”, plaide Hilda Eksian, qui voudrait qu’on cesse de faire la promotion de l’endroit, “déjà plus (connu) qu’il ne le faudrait”.

Randonnée

Fin juin, des touristes ont provoqué un incendie à Hydra en faisant tirer des feux d’artifice depuis leur yacht, déclenchant une polémique internationale.

De nombreuses îles font face à d’autres périls liés au tourisme, allant des pénuries d’eau à la pollution en passant par les problèmes de gestion des ordures. Les autorités cherchent désormais à diversifier le tourisme, en le liant à des activités, comme la plongée, alternative à la classique formule “plage et soleil”, selon Olga Kefaloyanni. “Nous essayons de promouvoir des destinations moins connues à l’international”, notamment en Grèce continentale, explique également la ministre.

Autre piste, le développement d’un tourisme hors saison, rendu possible par le réchauffement climatique. Répartir les arrivées de touristes permettrait de protéger le secteur de l’impact “des vagues de chaleur et des feux” l’été, selon un rapport de l’Institut de l’Union des entreprises touristiques (Insete) publié en décembre.

Hydra a achevé il y a un an un réseau de sentiers de marche bâti avec l’organisation Paths of Greece, spécialiste de ce type de projets. Son dirigeant, Fivos Tsaravopoulos, est persuadé que la randonnée permettra à la Grèce de “montrer la qualité des paysages et de sa culture à des touristes qui y sont sensibles”.

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