Comment des avocats belges, au départ de Charleroi et Seraing, secouent le football mondial

Gianni Infantino, président de la Fifa. Abdel Majid BZIOUAT / AFP
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Jean-Louis Dupont et Martin Hissel continuent leur croisade pour de meilleures règles dans le football mondial et gagnent des combats contre la Fifa. Une action collective en justice pourrait coûter très cher aux seigneurs du ballon rond.

Le cabinet d’avocats Dupont Hissel s’est forgé une solide réputation dans le monde du sport. En 1995, le dossier concernant un joueur du FC Liège, Jean-Marc Bosman, a révolutionné le monde du ballon rond, pour le meilleur et pour le pire. Celui-ci souhaitait un transfert vers le club de Dunkerque qui lui était refusé. La justice internationale a tranché en sa faveur.

“Cet arrêt a consacré la liberté des sportifs professionnels parvenus en fin de contrat et a jugé illégaux les ‘quotas de nationalité” limitant la  libre circulation des joueurs ressortissants de l’UE, rappellent les avocats sur leur site. L’arrêt Bosman a révolutionné le droit et l’économie du sport en Europe.” En effet. Et le duo Dupont – Hissel ne s’est pas arrêté là, multipliant les affaires, depuis.

Deux nouveaux dossiers, au départs des clubs de Charleroi et du FC Seraing, démontrent combien les Belges sèment le désordre dans le football mondial. Selon le Guardian, l’une d’entre elles pourrait d’ailleurs coûter très cher aux seigneurs du ballon rond.

Une gigantesque plainte collective

Le premier dossier concerne l’affaire Diarra et vise à permettre une meilleur régulation de ces échanges devenus sauvages. .

L’affaire concerne le joueur français Lassana Diarra, un international français qui avait été à deux doigts de rejoindre le Sporting de Charleroi en 2014. Sous contrat au Lokomotiv Moscou, il avait mis fin à sa relation avec le club russe, après avoir été l’objet d’une baisse salariale décidée unilatéralement pour “baisse de performances”. Le Lokomotiv Moscou réclamant des indemnités et la Fédération russe refusant d’octroyer le certificat, le transfert avait avorté, après un passage par la chambre des litiges de la FIFA. Finalement, Lassana Diarra a finalement prolongé sa carrière à l’Olympique de Marseille, plus tard.

L’affaire a abouti devant le tribunal du commerce du Hainaut, qui a posé une question préjudicielle à la Cour de justice européenne, estimant que la libre circulation des joueurs avait été entravée, par l’attitude du club et par le refus de la Fédération d’octroyer un certificat de transfert. Refrain connu, dans la lignée de l’affaire Bosman. Lassana Diarra aurait été, plusieurs mois durant, empêcher de pratiquer son métier. L’avocat général de la Cour européenne de justice a suivi: “Les sanctions sportives auxquelles sont confrontés les clubs embauchant le joueur peuvent effectivement empêcher un joueur d’exercer sa profession dans un club situé dans un autre État membre”. Il ajoute: “Limiter la capacité des clubs à recruter des joueurs, affecte nécessairement la concurrence entre les clubs sur le marché de l’acquisition des joueurs professionnels.”

La Cour a publié un arrêtc en ce sens, en octobre dernier. Pour les avocats, “cela constitue un nouveau jalon, essentiel, dans la modernisation de la gouvernance du football au sein de l’UE et peut-être au-delà, en permettant enfin aux partenaires sociaux, les syndicats de joueurs et les syndicats de clubs, de réguler leurs relations de travail“.

Selon le Guardian, une plainte collective est désormais en voie de constitution, initiée par une association néerlandaise réclamant la “Justice pour les joueurs”. L’objectif consisterait à attaquer en justice la Fifa et plusieurs fédérations nationales. Des dizaines de milliers de joueurs pourraient être concernés. Le montant en question s’éleverait à “plusieurs milliards.”

Le combat du FC Seraing

Cette annonce survient alors que le duo Dupont – Hissel a remporté une autre bataille de taille, dans un combat qui opposait depuis dix ans le FC Seraing et Doyen Sports à la Fifa. L’histoire remonte à 2015 et concerne un accord passé par le club avec la société Doyen Sports: pour soulager la masse salariale, celle-ci avait pris 30% dans les droits de trois joueurs de l’équipe sur le principe du tiers investisseur. La Fifa avait rejeté l’idée, infligeant une amende au club. Les avocats sont intervenus pour revendiquer ce droit pour les joueurs. S’en est suivi une longue bataille en justice, aboutissant à des questions préjudicielles posées par la Cour de cassation à la Cour européenne de justice.

Le verdict est favorable aux Liégoise, en ce qu’il redonne sa lettre de noblesse aux juridictions nationales. Les tribunaux des pays doivent pouvoir exercer un contrôle juridictionnel complet, y compris sur les sentences dites “définitives” du Tribunal arbitral du sport (TAS), basé en Suisse. C’est ce qu’a estimé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans un arrêt rendu vendredi, dans le cadre du litige opposant depuis 2015 le RFC Seraing à la Fédération internationale de football (Fifa) au sujet de l’interdiction de la tierce propriété des joueurs professionnels (TPO).

Cette décision, favorable au club liégeois, remet en cause le recours obligatoire au TAS, imposé par les statuts de la Fifa, de l’UEFA ou des fédérations nationales. Elle ébranle plus largement l’ensemble des mécanismes d’arbitrage sans véritable possibilité d’appel, souvent imposés par les instances sportives internationales. “La Cour consacre le droit, notamment pour les clubs et les joueurs, d’obtenir un contrôle juridictionnel effectif des sentences rendues par le TAS. Les juridictions nationales doivent pouvoir en vérifier la compatibilité avec les règles fondamentales du droit de l’Union”, précise l’arrêt.

Là encore, à Seraing, on pourrait songer à une action au sujet du préjudice subis…

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