Bernard Keppenne (CBC) : “Trump souffle le chaud et le froid sur l’attractivité des Etats-Unis”

Illustration © Belga
Sébastien Buron
Sébastien Buron Journaliste Trends-Tendances

Un tribunal commercial a estimé que le président américain avait outrepassé ses pouvoirs en imposant des droits de douane, mais la décision a été suspendue dès le lendemain par une cour d’appel, relançant l’incertitude autour de l’étendue exacte des tarifs douaniers.

Une bataille juridique qui complique encore un peu plus la donne pour les entreprises européennes qui envisagent d’investir aux Etats-Unis, analyse l’économiste de CBC.

Pourquoi les entreprises doivent-elles réfléchir à deux fois avant de s’installer aux États-Unis actuellement ?

Bernard Keppenne (CBC)

On observe aujourd’hui qu’un certain nombre d’entreprises européennes envisagent ou ont déjà annoncé de procéder à des investissements aux Etats-Unis. Ce mouvement pourrait faire partie des discussions entre Bruxelles et Washington sur un accord commercial montrant la volonté de l’Union européenne de rééquilibrer les échanges. Mais la bataille juridique qui s’est jouée en deux jours de temps crée encore plus d’incertitude sur la mise en application ou pas des droits de douane voulus par Trump, ce qui incite les entreprises à se montrer plus frileuses à poursuivre ce mouvement d’investissement étrangers aux Etats-Unis déjà observé et visant à contourner les tarifs douaniers.

Une incertitude à laquelle s’ajoute maintenant un risque fiscal ?

Une nouvelle taxe prévue dans la réforme budgétaire américaine pourrait pénaliser les entreprises étrangères dès l’an prochain. Une surtaxe de 5 %, augmentant jusqu’à 20 %, s’appliquerait aux revenus générés aux États-Unis par des entreprises françaises, britanniques, australiennes, et potentiellement d’autres pays de l’UE et du Canada. Sont visés les pays ayant instauré une taxe sur les services numériques ou soutenu la taxe minimale sur les multinationales, validée par le G7 et acceptée par les États-Unis eux-mêmes. Tout cela a de quoi refroidir les investisseurs étrangers, même si la fiscalité des entreprises est encore plus faible qu’en Europe. 

On nage quelque part en pleine schizophrénie ?

Trump souffle effectivement le chaud et le froid sur l’attractivité des Etats-Unis. D’un côté, il cherche à attirer les entreprises étrangères pour relocaliser la production aux États-Unis. De l’autre, il évoque des hausses d’impôts qui pourraient justement dissuader ces mêmes investisseurs étrangers. Il faut aujourd’hui être extrêmement prudent avant de s’installer ou d’investir aux Etats-Unis.

Et ce, alors que plane désormais aussi un risque monétaire…

Il y a un affaiblissement du dollar par rapport à de nombreuses devises. Ce recul alimente une défiance vis-à-vis de la monnaie américaine. Certes, le statut du dollar ne va pas changer du jour au lendemain. Mais il y a une vraie défiance par rapport aux actifs américains, et au dollar en particulier. Ce qui complique encore davantage les décisions d’investissement pour les entreprises étrangères, avec en plus un risque de dévaluation des revenus.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content