La centrale nucléaire de Gravelines, située en France et à une trentaine de kilomètres de la frontière belge, a été entièrement mise à l’arrêt… à cause d’une invasion massive de méduses.
Selon EDF, exploitant du site installé au bord de la mer du nord, quatre des six réacteurs à eau pressurisée de 900 mégawatts chacun — les unités 2, 3, 4 et 6 — se sont automatiquement arrêtés entre dimanche soir et lundi matin, conformément aux procédures de sûreté. Les deux autres étaient déjà hors service pour maintenance, entraînant la mise à l’arrêt temporaire de l’ensemble du site.
L’arrêt complet du plus grand site de production d’Europe occidentale a neutralisé temporairement une capacité totale de près de 5,5 gigawatts. Soit l’équivalent de plus de 10 % de la puissance nucléaire installée en France. Et tout cela à cause de méduses.
Des méduses dans le circuit de refroidissement
Les réacteurs de Gravelines sont refroidis par de l’eau pompée dans un canal relié à la mer du Nord. C’est là que les tambours filtrants ont été saturés par l’arrivée massive de méduses. Si leur présence saisonnière est connue sur le littoral, l’ampleur de l’incident surprend
Le biologiste Hans De Blauwe évoque sur la VRT la possible responsabilité de la méduse-lune asiatique (Aurelia coerulea), espèce invasive apparue en Belgique en 2022. Des vents récemment passés du nord-ouest au nord-est auraient facilité leur afflux dans la zone de pompage.
Selon les experts, la prolifération de ces animaux gélatineux s’explique par le réchauffement des eaux, la raréfaction de leurs prédateurs naturels comme le thon (due à la surpêche) et l’abondance de plancton. Des facteurs qui tendent à s’accentuer chaque été.
Un problème qui dépasse la France
Ce type d’incident n’est pas inédit. Des invasions similaires ont déjà affecté des centrales nucléaires dans les années 1990 en France, mais aussi aux États-Unis, en Écosse, en Suède et au Japon dans les années 2010.
Malgré cet arrêt complet, EDF assure qu’il n’y a aucun risque pour la sécurité d’approvisionnement, grâce à la production d’autres centrales et aux énergies renouvelables, notamment solaires. En Belgique, le gestionnaire de réseau Elia confirme qu’aucun impact n’est attendu sur la stabilité du réseau.
L’opérateur précise également que l’incident n’a eu « aucune conséquence sur la sûreté des installations, la sécurité du personnel ou l’environnement ».
L’impact des évènements naturels sur la production énergétique
Cet épisode rappelle tout de même que, même dans un secteur aussi hautement technologique que le nucléaire, des phénomènes naturels peuvent à tout moment perturber la production énergétique. Et qu’avec le changement climatique, ces aléas pourraient devenir moins exceptionnels.
Grâce à la disponibilité d’autres moyens de production et à une demande estivale plus faible, l’attaque des méduses n’aura eu in fine qu’un impact minime. Cependant, sur un marché tendu ou en période de pointe hivernale, un tel arrêt pourrait contribuer à une hausse des prix de gros de l’électricité.
Il y a cependant peu de chance qu’un tel arrête soit la faute des méduses. Celles qui prolifèrent dans la région ont un cycle de vie très court: elles naissent au printemps et “vont quasiment toutes mourir entre l’automne et l’hiver”, ajoute-t-il.
Le redémarrage progressif des réacteurs est prévu dans les prochains jours, après nettoyage et contrôle.