Avec un ministre de l’Énergie rapidement surnommé Atomic Boy, le gouvernement Arizona dit régulièrement miser gros sur le nucléaire. Pourtant, il semble que les moyens alloués à la recherche manquent. Ce mercredi, le principal centre de recherche sur le nucléaire est en grève.
Lundi, Mathieu Bihet (MR) s’est réjoui du “renforcement” des engagements de l’Arizona envers l’énergie nucléaire. “Nous finançons les engagements nucléaires, renforçons la sûreté des sites nucléaires et assurons l’avenir de projets stratégiques, a déclaré le ministre fédéral de l’Énergie. C’est cela, la bonne gouvernance : dire ce que l’on fait, financer ce que l’on décide et préparer l’avenir énergétique de la Belgique.”
Au menu de l’accord budgétaire figure effectivement un renforcement des financements alloués à l’ONDRAF, l’Organisme national des déchets radioactifs et des matières fissiles enrichies. Le budget alloué à l’ONDRAF lors des quatre prochaines années sera précisément de 198 (2026), 172 (2027), 95 (2028) et 136 (2029) millions d’euros.
“Notre pays reprend des engagements historiques insuffisamment financés ces dernières années, indique le cabinet du ministre Bihet. Il ne s’agit pas d’un report, mais d’une correction nécessaire de la politique du gouvernement précédent, afin que le démantèlement et le traitement des déchets puissent être financés en toute sécurité et que nous puissions continuer à garantir un cadre de vie durable.”
En outre, l’Arizona a décidé de revoir à la hausse les financements de l’Institut national des radioéléments (IRE) : 22 millions d’euros pour la période 2026-2029. Ces augmentations concernent notamment les projets liés à la sûreté nucléaire.
Enfin, l’accord budgétaire prévoit un réajustement pour RECUMO, un programme de recyclage des matières fissiles usées de l’IRE. “Ce projet a connu du retard par rapport à la planification initiale, ce qui n’est pas inhabituel pour un projet nucléaire de cette complexité. Le réajustement décidé dans le cadre du budget vise précisément à garantir la poursuite du projet en Belgique, dans des conditions de sûreté strictes et avec un financement stabilisé”, promet le cabinet Bihet. Le démarrage opérationnel est prévu pour octobre 2028.
Grève au SCK CEN et au VITO
Avec ces annonces, le gouvernement fédéral semble vouloir montrer une nouvelle fois sa détermination à soutenir l’énergie nucléaire. Mais visiblement, le message n’est pas perçu aussi positivement du côté des chercheurs. Ce mercredi, plusieurs dizaines d’employés de deux importants centres de recherche se sont mis en grève à Mol (province Anvers).
Le SCK CEN, centré sur la recherche nucléaire, est à l’arrêt. Les syndicats veulent alerter sur “situation financière précaire” du centre. Ils déplorent notamment la non-indexation de la dotation de base du SCK CEN. Elle figure pourtant dans le contrat de gestion. “La dotation de base pour nos recherches est gelée à 58,4 millions d’euros depuis des années. L’inflation et les coûts salariaux augmentent, mais nos ressources, elles, stagnent. Ce fossé se creuse”, déplore auprès du Nieuwsblad Frank Vandervoort (ACV).
Les motifs de protestation vont au-delà de cette dotation. C’est d’ailleurs pourquoi la grève s’est étendue au VITO (Institut flamand de recherche technologique), voisin du SCK CEN. Les syndicats reprochent au gouvernement fédéral — mais aussi à l’exécutif flamand — une “réduction structurelle des financements publics alloués à la recherche et au développement” alors que la Belgique a “jusqu’à présent excellé grâce à un cadre fiscal avantageux pour la R&D”. Ils déplorent aussi un recours accru aux consultants externes.
Le plafonnement de l’indexation des salaires, annoncé lundi, passe lui aussi très mal. “A 4000 euros bruts, il ne s’agit pas des ‘épaules les plus larges’, mais de personnes correctement rémunérées pour leurs études”, estime Frank Vandervoort (ACV).
À cette colère liée aux décisions des gouvernements fédéral et flamand s’ajoute celle provoquée par un plan interne d’austérité au sein du VITO. Selon les représentants syndicaux, ce cocktail pourrait exploser en une “fuite des cerveaux”.
“Le SCK CEN dispose de moyens solides”
Du côté du ministre Bihet, on reconnaît que l’indexation de la dotation de base du SCK CEN n’est pas prévue par le gouvernement “à ce stade”. Mais le centre de recherche nucléaire ne serait pas vraiment à plaindre. Il dispose, selon Atomic Boy, de “moyens solides, encore renforcés par l’accord budgétaire”. Il rappelle notamment que le fédéral a “remis de l’ordre dans le financement des passifs techniques”.
Le ministre de l’Énergie se réjouit aussi du maintien de l’enveloppe de 300 millions d’euros, promise en début d’année. Étalée entre 2027 et 2029, elle servira à des investissements et à la recherche en capacité nucléaire. C’est cet argent qui doit permettre, entre autres, le développement de petits réacteurs modulaires (SMR). “Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, ce n’est pas négligeable”, souligne-t-il.