Les tensions entre Iran et Israël font flamber le prix du pétrole
Les tensions géopolitiques grandissantes au Proche-Orient, avec le risque d’une attaque “imminente” par missile balistique de l’Iran sur Israël, ont fait monter les cours du pétrole d’environ 4% mardi après-midi.
Vers 15H50 GMT (17H50 à Paris) le prix du baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en décembre, dont c’est le premier jour d’utilisation comme contrat de référence, augmente de 3,89% à 74,49 dollars. Son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI), pour livraison en novembre, gagne 4,12% à 70,98 dollars. Le prix de l’or noir a immédiatement bondi de près de 4% après que les Etats-Unis ont fait savoir que “l’Iran se prépare à lancer une attaque imminente par missile balistique” contre Israël. L’armée israélienne a appelé la population à se préparer à une éventuelle attaque iranienne “à grande échelle”, et l’ambassade des Etats-Unis en Israël a ordonné à son personnel et à leurs familles de se rendre dans des abris. “A court terme, une implication totale de l’Iran pourrait conduire les marchés à s’affoler, et on pourrait voir le baril très fortement remonter”, a réagi John Plassard, analyste chez Mirabaud.
L’armée israélienne a annoncé avoir mené mardi une frappe sur Beyrouth, dernier raid en date visant le mouvement islamiste armé Hezbollah (pro-iranien) dans la capitale libanaise. Cette attaque fait suite à une semaine d’intenses bombardements d’Israël contre le Hezbollah, qui ont fait des centaines de morts au Liban. Le Hezbollah libanais a ensuite annoncé avoir tiré des salves de roquettes en direction de la base aérienne de Sde Dov près de Tel-Aviv, deuxième attaque visant cette région israélienne en quelques heures.
“La perspective d’un conflit plus large menace l’approvisionnement en provenance de la région du Golfe persique”, explique Ricardo Evangelista, analyste chez ActivTrades. L’Iran était le neuvième producteur mondial de brut en 2023, selon l’Agence américaine d’information sur l’énergie, et possède les troisièmes réserves prouvées derrière le Venezuela et l’Arabie saoudite. Une implication durable de Téhéran dans un conflit avec Israël serait synonyme de prix du pétrole très élevés.
“Proches de 100 dollars”
Les investisseurs se montrent cependant prudents dans le mouvement haussier, incertains de la volonté réelle et de la capacité iranienne à se lancer dans une guerre totale avec Israël. Selon Naeem Aslam, analyste chez Zaye Capital, “cette attaque est une piqûre de moustique, un peu plus de feux d’artifices de la part de l’Iran” et une guerre totale entre l’Iran et Israël n’est pas une éventualité crédible. Si le marché misait sur une guerre totale, les prix du brut seraient “proches de la barre des 100 dollars”, estime l’analyste. Téhéran a en effet affirmé lundi qu’il ne déploierait pas de combattants au Liban et à Gaza.
L’Iran semble en outre vouloir éviter une guerre avec Israël qui plomberait son économie alors que depuis l’arrivée l’été dernier du président réformiste Massoud Pezeshkian, il a exprimé son souhait de relancer des négociations pour ranimer l’accord conclu sur le nucléaire en 2015 avec les pays européens de l’E3 (Paris, Londres, Berlin), les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Ce pacte connu sous l’acronyme JCPOA était censé encadrer les activités atomiques de l’Iran en échange d’une levée des sanctions internationales.
La hausse des prix du pétrole est aussi limitée par une production attendue en hausse. La Libye pourrait restaurer des exportations de brut très prochainement selon des informations de la presse financière. Le Parlement libyen, installé dans l’est du pays, a voté lundi la nomination d’un nouveau gouverneur de la Banque centrale de Libye (BCL), mettant fin à une crise qui durait depuis un mois et qui a entraîné la fermeture des installations pétrolières et d’énormes pertes financières.
Par ailleurs, huit membres de l’Opep+ (Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés), parmi lesquelles l’Arabie saoudite et la Russie, ont prévu de rétablir progressivement 2,2 millions de barils par jour de production à compter de décembre. Pour s’y préparer, le comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) de l’alliance doit se réunir mercredi. John Plassard rappelle enfin qu’à un mois des élections américaines “l’administration Biden ne laissera pas les prix du pétrole s’envoler” et pourrait même demander à ses alliés au sein de l’Opep+ d’augmenter leur production.