Les leçons du black-out espagnol: le soleil et le vent risquent-ils de plonger l’Europe dans le noir?

BLACK-OUT EN ESPAGNE. "Une panne d’électricité est toujours le résultat d’un concours de circonstances. " © Getty Images
Daan Killemaes Economiste en chef de Trends Magazine (NL)

Lorsque le 28 avril dernier, 60 millions de personnes se sont retrouvées sans électricité dans la péninsule ibérique, un doigt accusateur s’est tourné vers les énergies renouvelables. Le risque de black-out à grande échelle augmente-t-il à mesure que nous devenons de plus en plus dépendants de l’énergie solaire et éolienne ? Selon les experts, le réseau électrique peut parfaitement fonctionner à 80-90% sur base d’énergies renouvelables. “Mais on atteint les limites de ce qui est payable”, avertit l’industrie.

Pour les gestionnaires de réseau espagnols, et portugais également, la géographie est essentielle. La région du sud-ouest de l’Europe est particulièrement sensible aux variations du réseau à haute tension européen. “Le réseau européen est comme une baignoire sur roues, remplie à ras bord. Les gestionnaires doivent maintenir le niveau de l’eau à plat, mais c’est plus difficile sur les bords. L’Espagne se situe à l’extrémité des axes nord-sud et est-ouest en Europe”, explique Joannes Laveyne, spécialiste de l’énergie à l’Université de Gand.

Le 28 avril, l’agitation dans la baignoire était assez importante. La situation est devenue très précaire lorsque plusieurs unités de production sont tombées en panne. Cette perte d’une capacité significative a fait chuter rapidement la tension du réseau à des valeurs inacceptables. “Le gestionnaire de réseau espagnol se concentrait sur l’amortissement des ondulations de la tension de l’alimentation électrique et n’était pas préparé à de petites perturbations supplémentaires, ce qui a conduit à un black-out complet”, poursuit Joannes Laveyne.

Pour mieux comprendre les subtilités du black-out et le rôle des énergies renouvelables dans la panne d’électricité, il faut voir le réseau haute tension comme un verre de bière avec de la mousse. “La bière, c’est la puissance utile ou active, celle que nous utilisons au quotidien, par exemple pour faire du café ou allumer la lumière. La mousse, c’est la puissance réactive. Elle est accessoire et moins souhaitable, mais elle est importante pour la régulation de la tension du réseau. Pour atténuer les ondulations européennes, le gestionnaire de réseau espagnol a pris des mesures pour augmenter la puissance réactive. Cela a fait grimper la tension du réseau, surtout lorsque les parcs solaires sont tombés en panne. En raison de cette surtension, d’autres centrales se sont également arrêtées, et l’événement de surtension s’est transformé en un black-out classique. Un black-out est toujours une conjonction de circonstances”, dit Joannes Laveyne.

La part croissante des énergies renouvelables ne facilite pas la tâche des gestionnaires de réseau. S’il y a, par exemple, trop de mousse sur la bière, ce sont principalement les centrales à gaz qui doivent absorber cette mousse et éviter que la tension ne monte trop. De plus, un parc solaire, contrairement à une centrale à gaz, ne dispose pas d’une certaine inertie. Si le réseau est perturbé, un parc solaire se met hors ligne et toute sa puissance disparaît immédiatement. Mais dans une centrale à gaz, la turbine continue à tourner un moment, donnant au gestionnaire de réseau un temps crucial pour réagir. “L’énergie renouvelable n’est pas responsable du black-out, mais elle n’a pas facilité la gestion de la crise”, estime Joannes Laveyne.

“L’énergie renouvelable n’est pas responsable du black-out, mais elle n’a pas facilité la gestion de la crise.” – Joannes Laveyne (UGent)

Le 3 octobre, le rapport officiel sur ce qu’il s’est exactement passé en Espagne sera publié, mais les grandes lignes sont claires. “La gestion du réseau devient beaucoup plus complexe. En tentant de stabiliser le réseau, le gestionnaire espagnol a probablement aggravé le problème de tension. En quelques secondes, la tension a augmenté très rapidement. Il n’est alors plus possible d’intervenir, et on doit compter sur les stabilisateurs intégrés. Tout le monde est désormais conscient de cette complexité. On entend de moins en moins dire que nous exagérons lorsque nous présentons nos plans d’investissement. Un réseau stable est d’une importance cruciale pour l’économie”, dit Walter Geelen, responsable du Centre national de contrôle chez Elia, le gestionnaire du réseau haute tension belge.

La crise espagnole enseigne non seulement aux gestionnaires de réseau comment mieux éviter un black-out, mais elle est aussi précieuse pour affiner les plans de redémarrage. Un “black start” ne devient pas plus simple avec une part croissante d’énergies renouvelables. “Le redémarrage repose aujourd’hui sur les centrales à gaz et hydroélectriques, explique Walter Geelen. Vu que le parc de production évolue rapidement, nous examinons comment les nouvelles technologies peuvent contribuer à fournir ces services. Un parc de batteries pourrait fournir l’énergie de lancement nécessaire pour relancer une centrale à gaz.”

Alerte générale

“Difficile, mais faisable”, c’est le nouveau credo des gestionnaires de réseau. Il est tout à fait possible de construire un réseau stable fonctionnant à 80-90% sur base d’énergies renouvelables. En Allemagne, la part des renouvelables a déjà fortement augmenté, sans black-out. En Californie, le système fonctionne déjà plus de 200 jours par an à 100% sur base d’énergies renouvelables. “Mais le black-out en Espagne a été un signal d’alarme et suscite une saine inquiétude dans notre centre de contrôle. Nous devons en tirer des leçons et traduire les conclusions et recommandations pour le réseau belge à haute tension. Se dire ‘ça ne peut pas arriver ici’ est la chose la plus stupide que nous puissions penser”, affirme Walter Geelen.

“Se dire ‘Ça ne peut pas arriver ici’ est la chose la plus stupide que nous puissions penser.” – Walter Geelen (Elia)

Il est certes plus facile de stabiliser le réseau avec un parc classique de centrales, mais les batteries, éoliennes et parcs solaires peuvent aussi, à terme, aider à le stabiliser. Cela nécessite toutefois des adaptations réglementaires et de programmation, par exemple pour les onduleurs. En attendant, Elia investit plusieurs centaines de millions d’euros dans des équipements pour maintenir la stabilité du réseau. Cela inclut notamment des compensateurs synchrones à la côte : une sorte de grande roue d’inertie qui, en alternative aux centrales tournantes classiques, aide à amortir les ondulations dans la baignoire. “Nous investissons aussi dans des réactances shunt qui nous aident à réguler la tension du réseau, explique Walter Geelen. La poursuite de la numérisation est également très importante pour gérer ce réseau complexe.”

Le réseau haute tension européen s’est développé sur une longue période pour devenir une machine complexe, mais performante et robuste. “Mais à présent, nous devons en changer l’architecture à court terme, poursuit Walter Geelen. Nous devons adapter le réseau au caractère décentralisé des énergies renouvelables et le préparer à une forte augmentation de la demande. Nous devons aussi faire collaborer harmonieusement bien plus d’installations et d’appareils.”

Elia investit 7,5 milliards d’euros sur la période 2025-2028 pour rendre le réseau haute tension belge résilient pour l’avenir. “La transition énergétique exige beaucoup d’investissements, mais les investissements dans l’infrastructure sont par définition bons pour la prospérité, souligne Joannes Laveyne. L’énergie renouvelable est aussi la voie la plus rapide et la moins chère vers un système énergétique neutre en carbone.”

Figurent en tête de l’agenda la construction de Ventilus et de la Boucle du Hainaut. Ces lignes sont nécessaires pour maintenir le principe “n-1”, ce qui signifie que la panne d’une ligne à haute tension peut être compensée par d’autres lignes, sans provoquer d’effet domino. Le lien entre les parcs éoliens offshores existants et la terre ferme passe actuellement par la double ligne Stevin entre Zeebrugge et Gand. “Ce corridor suffit à transporter les 2,2 gigawatts d’énergie offshore existants, mais il ne pourra pas supporter l’extension prévue, assure Walter Geelen. Pour renforcer le réseau, Ventilus et la Boucle du Hainaut sont essentiels, aussi pour permettre des connexions supplémentaires pour l’industrie en Flandre-Occidentale et en Hainaut.”

Viabilité financière

L’industrie s’interroge sur la viabilité financière d’un réseau qui fonctionnerait en grande partie sur base d’énergie renouvelable. “D’un point de vue conceptuel, un système stable est réalisable, mais à l’échelle industrielle, cela devient une affaire coûteuse. Il faut installer des équipements sophistiqués pour garder le système maîtrisable. L’Irlande, par exemple, garde une centrale à charbon en réserve pour fournir l’inertie nécessaire. Elia investit dans une roue d’inertie à la côte. Le black-out en Espagne est un avertissement : tout cela n’est pas si simple”, déclare Michaël Van Bossuyt, conseiller principal chez Febeliec, la fédération des grands consommateurs industriels d’électricité en Belgique.

“Conceptuellement, un système stable basé sur les énergies renouvelables est réalisable, mais à l’échelle industrielle, cela devient une affaire coûteuse.” – Michaël Van Bossuyt (Febeliec)

L’Allemagne peut concilier une grande quantité d’énergie renouvelable avec un réseau stable grâce à la stabilité fournie par les pays voisins comme la France et la Pologne, avec respectivement des centrales nucléaires et à charbon, explique Peter Claes, directeur de Febeliec. “Et pourtant, l’Allemagne doit encore construire une nouvelle centrale à gaz qui ne servira qu’en réserve. On atteint les limites du raisonnable financièrement. Un système basé sur environ 50% de solaire et d’éolien et 50% de centrales classiques pilotables nous semble aujourd’hui être le juste milieu idéal du point de vue économique. Le stockage abordable est la clé pour permettre une part plus importante d’énergies renouvelables. Le coût des batteries diminue, mais elles restent trop chères comme solution à l’échelle du système.”

“Le stockage abordable est la clé pour permettre une plus grande part d’énergies renouvelables. Le prix des batteries baisse, mais elles restent trop chères comme solution à l’échelle du système.” – Peter Claes (Febeliec)

L’énergie fossile en réserve

Si le black-out en Espagne était principalement un événement de surtension, un black-out classique, dû à un manque ou à une surproduction d’électricité, ne peut jamais être exclu. Le risque augmente même avec la part croissante d’énergies renouvelables, car il devient plus difficile d’aligner la consommation et la production. Les pénuries menacent surtout les jours d’hiver froids et sans vent. “Heureusement, nous disposons aujourd’hui d’outils pour mieux prévoir la production et la consommation, et les aligner, indique Joannes Laveyne. Autrefois, la gestion du réseau haute tension relevait de l’artisanat, désormais nous sommes mieux préparés.”

En Belgique, comme dans la plupart des autres pays européens, une capacité de réserve est maintenue via un mécanisme de subvention, le CRM. Selon Elia, cela suffit à garantir la sécurité d’approvisionnement jusqu’en 2028. Garder des centrales en réserve, alors qu’elles tourneront de moins en moins d’heures, n’est évidemment pas bon marché. “Chaque pays doit aujourd’hui prévoir lui-même suffisamment de capacité de réserve, affirme Joannes Laveyne. Il serait peut-être mieux de gérer cela au niveau européen, car nous risquons aujourd’hui une surcapacité.”

Sur les bords de la Meuse, à Flémalle, Engie Electrabel prépare une nouvelle centrale à gaz d’une capacité maximale de 875 mégawatts, suffisante pour alimenter 1 million de foyers. Il s’agit de l’une des turbines à gaz individuelles les plus grandes et les plus performantes au monde. “Cette centrale ne remplace pas les énergies renouvelables, au contraire. Elle permet d’en tirer le maximum, car elle peut réagir de manière flexible au caractère capricieux de leur production. Offre et demande doivent toujours être équilibrées sur le réseau électrique. Cette centrale contribue à éviter les black-out”, affirme le directeur de projet Raf Anné.

Engie investit 650 millions dans cette centrale, qui fonctionnera entre 5.000 et 6.000 heures par an. “En hiver, elle contribuera presque en continu à la sécurité d’approvisionnement. Dès le printemps, elle opérera de façon flexible selon les conditions du marché. Elle peut, par exemple, passer en 10 minutes de 350 à 875 mégawatts de production. Elle peut donc réagir très rapidement à des pénuries ou des excédents”, ajoute Raf Anné.

À mesure que la capacité d’énergie renouvelable augmente, la centrale au gaz fonctionnera sans doute durant de moins en moins d’heures. Il reste à voir si l’investissement couvrira au moins ses coûts en capital. Engie bénéficie néanmoins des subventions pendant 15 ans via le CRM. “C’est une compensation pour la capacité que nous mettons à disposition pour maintenir la lumière allumée”, explique Raf Anné.

Engie a eu la chance d’avoir acheté à temps les turbines et transformateurs nécessaires, avant que la crise énergétique ne fasse exploser les prix de ces composants cruciaux. La même centrale coûterait aujourd’hui deux fois plus. La plus-value majeure résiderait dans une éventuelle revente de la centrale, mais pour Engie, ce projet est un fleuron dans sa stratégie de groupe, qui mise pleinement sur les énergies renouvelables et la flexibilité associée. Mais à long terme, ces projets et le CRM ne suffiront pas à répondre à la demande croissante en électricité.

CENTRALE ÉLECTRIQUE AU GAZ DE FLÉMALLE. La nouvelle centrale permet de s’adapter avec souplesse à la volatilité des énergies renouvelables. © PG

À partir de 2035, lorsque les centrales nucléaires de Doel 4 et Tihange 3 seront fermées, des solutions structurelles seront nécessaires. Davantage d’énergie nucléaire, davantage d’éolien en mer, une capacité de connexion accrue avec l’étranger et/ou une réduction de la consommation énergétique. Ce scénario part du principe que le consommateur souhaite et peut ajuster fortement sa consommation si les prix augmentent et que des pénuries menacent. Si cette flexibilisation prend du retard. Comme ce fut récemment le cas, 1,3 gigawatt de capacité supplémentaire sera nécessaire d’ici 2036, selon les prévisions les plus récentes d’Elia.

Pour l’industrie, fournir cette flexibilité n’est pas toujours évident. Les processus fonctionnent souvent en continu et nécessitent donc de l’électricité en permanence. La flexibilité disponible est déjà proposée sur le marché. Ce qui rend les marges de manœuvre minces en cas de crise inattendue. “Surtout si, comme en Espagne, vous n’avez que 6 secondes pour éviter un black-out, souligne Michaël Van Bossuyt. Seuls quelques privilégiés peuvent offrir une telle flexibilité extrême. Un arrêt d’urgence dans l’industrie est souvent très difficile et coûteux. Redémarrer une installation peut parfois prendre des semaines.”

La nouvelle inquiétude : trop d’électricité

Les gestionnaires de réseau ne doivent pas seulement prévenir les éventuelles pénuries de courant, ils sont de plus en plus préoccupés par les excédents d’électricité.

Lors d’une journée estivale ensoleillée, un excédent fatal d’électricité pourrait ne plus trouver preneur. D’ici 2032, cet excédent pourrait atteindre 3 gigawatts, avertit Elia. “Prévoir une capacité de réserve est un problème coûteux, mais maîtrisable. La surproduction est un problème plus important pour la stabilité du réseau. Les câbles fondent si vous ne pouvez pas consommer l’électricité”, indique Peter Claes.

Hellbrise, tel est le nom du nouveau phénomène. Une référence aux périodes de ciel clair et de vent fort qui injectent d’énormes excédents d’électricité dans le réseau. “Les périodes d’excédent ont été moins anticipées. On supposait qu’un excédent se résoudrait de lui-même et que les gens et les entreprises consommeraient spontanément plus d’électricité si les prix devenaient négatifs. Mais aucune mesure ni investissement explicite n’a été prévu à cet effet. Nous avons déjà en Belgique 11 gigawatts de panneaux solaires. Cela signifie que lors d’une journée d’été ensoleillée, vous mettez en marche et arrêtez dans les 24 heures l’équivalent de 8 à 9 fois notre plus grande centrale nucléaire. Le marché réclame plus de flexibilité”, dit Kris Voorspools, gérant de la société de conseil énergétique 70GigaWattConsulting.

Autre phénomène nouveau : les pics de prix soudains en soirée lors des journées estivales chaudes et ensoleillées. “En journée, il y a beaucoup d’énergie solaire qui éjecte toutes les centrales classiques du marché. Mais lorsque le soleil disparaît, les climatiseurs tournent encore à plein régime. Et les centrales à gaz doivent être sollicitées très rapidement. Un démarrage aussi rapide coûte cher. C’est pourquoi nous devons continuer à miser sur des incitations tarifaires et une gestion dynamique de la demande”, explique Walter Geelen.

Les conséquences chez vous

Ce ne sont pas seulement les gestionnaires du réseau à haute tension, mais aussi les gestionnaires de réseau de distribution – qui amènent le courant jusqu’à votre domicile – qui doivent adapter leurs réseaux à une nouvelle réalité : celle des panneaux solaires, des pompes à chaleur, des voitures électriques et de l’électrification des PME dans les zones industrielles. Le caractère imprévisible de la consommation et de l’injection devient aussi un défi de taille pour Fluvius, le gestionnaire de réseau de distribution en Flandre.
Le matin, la charge sur le réseau augmente, et diminue à midi lorsque les panneaux solaires couvrent la demande locale. Puis une deuxième pointe survient en soirée. Fluvius doit redoubler d’efforts pour gérer cette courbe.

“En raison de l’électrification de l’économie et de la part croissante de l’énergie solaire, nous devons renforcer nos réseaux pour faire face à cette charge de pointe. Si nous ne faisons rien, 40% de notre réseau de distribution sera insuffisant dans 10 ans”, avertit Raf Bellers, directeur de la gestion du réseau chez Fluvius.

Sur la période 2023-2032, Fluvius investira. En plus du programme classique de 7 milliards d’euros, 4 milliards d’euros supplémentaires seront investis pour préparer le réseau à accueillir 2,45 millions de voitures électriques d’ici 2035, de nombreuses pompes à chaleur supplémentaires et encore plus de panneaux solaires. En outre, le réseau devra supporter une demande industrielle plus élevée et plus fluctuante.

“Cette demande est la plus difficile à prévoir, fait remarquer Raf Bellers. Il s’agit d’un nombre limité de projets, mais à fort impact sur le réseau. Mais c’est un plan sans regret. Si la transition prend du retard, nous ne faisons que devancer notre calendrier d’investissement.”

ÉNERGIES RENOUVELABLES. Les excédents d’électricité préoccupent également de plus en plus les gestionnaires de réseau. © Getty Images

Avec les investissements nécessaires, une part plus importante d’énergie renouvelable n’implique donc pas un plus grand risque de black-out, même au niveau de la rue ou du quartier. “Le réseau de distribution peut parfaitement fonctionner avec 80 ou 90% d’énergies renouvelables. Nous devons seulement veiller à ce que les investissements nécessaires restent maîtrisables. L’enjeu est de limiter les charges de pointe. Plus le système est flexible, moins on a besoin de capacité de pointe. Quelle flexibilité pouvons-nous espérer et dans quelle mesure devons-nous investir dans cette capacité ? C’est l’équilibre que nous devons continuellement évaluer”, dit Raf Bellers.

Étant donné la rapidité des évolutions technologiques, cette évaluation devra être régulièrement ajustée. “Le prix des batteries, par exemple, baisse très rapidement, souligne Joannes Laveyne. Je m’attends à une adoption massive des batteries domestiques. Aujourd’hui, elles ne se rechargent pas encore de manière suffisamment intelligente : elles sont souvent déjà pleines avant midi. Nous travaillons sur un projet avec un grand fournisseur pour piloter à distance cette armée de batteries domestiques. Cela créerait une grande batterie virtuelle qui pourrait contribuer à aplanir les pics de consommation et d’injection. Les ménages ne perdraient pas en confort. Entre-temps, ils aident le réseau électrique et en tirent un revenu.”

Le signal-prix est aussi, sur le marché de l’électricité, l’outil clé pour faire correspondre l’offre et la demande. “Une grande partie de la production d’énergies renouvelables reste encore trop peu sensible aux prix. Mais de plus en plus de grandes installations y répondent. Cet été, on a vu de grands parcs solaires réduire leur production lorsque les prix étaient trop bas. Ce qui a réduit le nombre d’heures à prix négatifs”, indique Joannes Laveyne.

“Notre plan d’investissement est la base pour rendre le réseau de distribution prêt pour l’avenir, conclut Raf Bellers. Par ailleurs, nous incitons nos clients à ne pas utiliser le réseau comme une batterie. Par exemple via le tarif capacitaire. Et nous comptons sur les fournisseurs d’énergie pour proposer des contrats et des solutions qui encouragent les ménages à adapter leur consommation et leur injection aux conditions du marché. Si tout cela ne suffit pas et qu’un black-out menace malgré tout, alors seulement nous tirons le frein d’urgence en coupant certains clients. Ce sont des situations extrêmement exceptionnelles.”

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