Le groupe Engie s’apprête dans les prochaines semaines à mettre pleinement en service sa nouvelle centrale à cycle combiné gaz-vapeur (ou turbine gaz-vapeur, TGV) à Flémalle. D’une capacité de 875 mégawatts (MW), très flexible et à la pointe de la technologie, la nouvelle centrale doit contribuer à la sécurité de l’approvisionnement énergétique dès cet hiver, alors qu’une partie du parc nucléaire belge est mis définitivement à l’arrêt.
Située en bord de Meuse, à un jet de pierre du site des Awirs, où se trouvait jadis une centrale au charbon, la nouvelle infrastructure a été érigée en un temps record puisque le projet a été sélectionné fin octobre 2021, lors de la première enchère du mécanisme belge de rémunération de capacité (CRM), et que les travaux de fondation de la centrale ont commencé début 2023. La centrale représente un investissement de 650 millions d’euros mais Engie bénéficiera d’un soutien pendant 15 ans dans le cadre du CRM.
Garantir l’approvisionnement
Les travaux de construction, qui ont notamment nécessité de faire passer plus de 8,1 km de câbles électriques en sous-sol et sous la Meuse et la pose de 9,4 km de conduite de gaz, ont occupé en moyenne 500 personnes par jour, avec des pics à 1.000 travailleurs certains jours. Engie assure avoir travaillé avec de nombreuses entreprises locales, belges et européennes, dont John Cockerill, qui a fourni une chaudière de 10.500 tonnes aux dimensions records (73 mètres de long, 25 mètres de large, 60 mètres de haut). Une fois mise en service, le fonctionnement et la maintenance de la centrale sera assurée par 35 personnes.
La centrale dernière génération, “la troisième seulement de ce type dans le monde” selon Raf Anné, le directeur du projet, dispose d’une turbine à gaz d’une capacité de 600 MW, à laquelle est adossée une turbine à vapeur qui permet de porter la capacité maximale de la centrale TGV à près de 900 MW, “ce qui est comparable à une tranche nucléaire”, poursuit Raf Anné. Annuellement, elle produira entre 4,4 et 5,3 térawattheures (TWh), soit l’équivalent de la consommation annuelle de plus d’un million de ménages.
Accompagner les renouvelables
Stratégiquement, l’outil doit aussi accompagner l’essor des énergies renouvelables dans le mix énergétique, énergies toutefois intermittentes par nature et moins disponibles en hiver. La nouvelle centrale d’Engie peut être mise en service très rapidement et sa capacité à chaud (arrêt de moins de 24 heures) peut être modulée de 350 à 875 MW au rythme de 50 MW à la minute.
La centrale TGV de Flémalle affiche un rendement de plus de 63%, un niveau 5 à 10 points de pourcentage plus élevé que les centrales du même type actuellement en service. “Il y a eu énormément d’efforts techniques pour optimiser les processus et arriver à 63% de rendement. C’est vraiment ce qui se fait de mieux. Je ne sais pas s’il y a encore moyen d’aller beaucoup plus haut car on arrive aux limites de la physique”, a souligné Yves Grofils, directeur de construction de la centrale de Flémalle, au cours d’une visite de presse jeudi.
Ce rendement plus élevé permet de réduire la consommation de gaz, et donc le coût de production et les émissions de CO2, d’environ 20%, souligne encore Engie. Par rapport aux centrales à gaz actuelles, Flémalle offre ainsi un gain de 60 kg de CO2 au MWh, soit en base annuelle un gain de 315.000 tonnes de CO2 (à raison de 6.000 heures de fonctionnement par an), ce qui équivaut aux émissions annuelles de 157.500 voitures diesel.
Neutre en CO2 à plus long terme
La centrale de Flémalle est en outre techniquement capable de devenir à plus long terme neutre en CO2. Que ce soit via un système de capture du CO2 émis ou en brûlant des gaz verts tels que l’hydrogène, le biogaz ou du méthane synthétique produits de manière renouvelable, promet encore Engie, qui s’est engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici 2045.
Le premier allumage, réussi, de la centrale de Flémalle est intervenu le 7 août. L’infrastructure centrale est désormais couplée au réseau électrique et les équipes d’Engie procèdent actuellement au “soufflage”, une phase délicate de la mise en service qui est particulièrement bruyante et entraîne des nuisances sonores pour les riverains. Mais ces nuisances, qui durent maximum quelques heures par jour, ne devraient se poursuivre qu’une grosse semaine encore. Après quoi, la centrale pourra tourner normalement, en principe dès le courant du mois d’octobre, et contribuer pleinement à la sécurité d’approvisionnement dès cet automne et cet hiver pour, au minimum, les 15 prochaines années.