La Belgique entre la tenaille du climat et le marteau de la décroissance

Philippe Henry et Zuhal Demir, ministres wallon et flamand de l'Energie. © Belga
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Une décision de la Cour d’appel de Bruxelles estime que la Belgique doit réduire davantage les gaz à effet de serre. La Flandre va en cassation et parle d’un risque majeur pour l’économie. Un cas d’école.

Pour l’ASBL Affaire Climat, qui réunit une série de militants pour le climat soutenus par 58 000 citoyens, c’est une sacrée victoire. La Cour d’appel de Bruxelles a rendu cette semaine un arrêt elle juge que l’Etat belge, les Régions flamande et bruxelloise ont violé deux articles de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en n’agissant pas assez contre le changement climatique. Il faut accélérer le pas.

Cette décision indispose la N-VA qui annonce déjà un recours. Elle symbolise une tension de plus en plus grande entre environnement et économie.

“We did it!”

“We did it!”, s’exclame Francesca Vanthielen, journaliste freelance notamment pour nos collègues de Kanaal Z, qui porte l’ASBL Affaire Climat en compagnie, notamment, de l’écrivain Davis Van Reybrouck. Elle évoque “un long parcours plein d’obstacles” de neuf ans, pour contraindre la Belgique à agir en vertu des objectifs auxquelles elle a souscrit. Objectif: tout faire pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5° d’ici 20100, ce qui semble fortement compromis.

La Cour d’appel lui donne raison en estimant que la Belgique, Bruxelles et la Flandre doivent réduire conjointement leurs émissions de 55% d’ici 2030, un effort supérieur à ce que réclame l’Union européenne.

N-VA: “Un appauvrissement collectif”

Zuhal Demir (N-VA), ministre flamande du Climat, a annoncé qu’elle déposerait un recours devant la Cour de cassation. Principale motivation: la Cour d’appel dépasse les bornes. “Je ne permettrai pas à un juge de prendre des décisions politiques, s’exlame-t-elle. Car cela revient en fait à imposer un récit de décroissance.”

C’est l’autre motivation: le gouvernement flamand de Jan Jambon estime que les réglementations environnementales de plus en plus lourdes risquent de provoquer un “appauvrissement collectif” en Flandre. Le nord du pays rechigne d’ailleurs à agir: un plan national climat n’a été arraché que de haute lutte la semaine passée, et avec des objectifs revus à la baisse en raison de l’obstruction flamande.

Ironiquement, Zuhal Demir rappelle que si la Wallonie n’est pas condamnée, c’est en raison… de la fermeture des industries et des hauts-fourneaux à Liège et Charleroi.

Ce décision de justice n’est pas sans rappeler les nombreuses condamnations de l’Etat français pour son inaction climatique. C’est, aussi, un cas d’école: ne risque-t-on pas une désindustrialisation à marche forcée si l’on veut accélérer le rythme de la lutte climatique? N’est-on pas entré, sans le dire et sans l’assumer, dans une logique de décroissance?

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