De nouvelles règles européennes pour mieux encadrer les cryptomonnaies
Les députés européens ont approuvé jeudi des règles pour les cryptomonnaies, une première étape à un moment où plusieurs régulateurs dans le monde tentent d’encadrer ce secteur.
Le règlement MiCA (Markets in Crypto-assets), qui vise à réguler cette industrie pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et protéger les consommateurs, a été voté à une large majorité. Jusqu’à présent, les transferts d’actifs virtuels, tels que les bitcoins, échappaient à législation européenne sur les services financiers. “Avec le règlement MiCA, l’industrie européenne des crypto-actifs dispose d’une clarté réglementaire que des pays comme les Etats-Unis n’ont pas”, a salué le rapporteur Stefan Berger (PPE), estimant que cela apporte “un avantage concurrentiel à l’UE”.
MiCA, ainsi que la réglementation sur les transferts de fonds (TFR), également adoptée “marquent la fin du Far West non réglementé de la crypto”, a commenté Ernest Urtasun (Verts), co-rapporteur de la commission des affaires économiques et monétaires sur les transferts de crypto-actifs. L’absence de réglementation a “entraîné des pertes massives pour de nombreux premiers investisseurs et a servi de refuge sûr aux hackers, aux fraudeurs et aux réseaux criminels internationaux pendant plus d’une décennie”, a-t-il souligné.
“Suffisant? Non!”
Concrètement, en vertu de la nouvelle législation européenne, les fournisseurs de services de crypto-actifs (CASP) devront s’enregistrer et fournir des données précises sur leur identité s’ils souhaitent opérer dans l’UE. La “Travel Rule”, déjà existante dans la finance traditionnelle, s’appliquera à l’avenir aux transferts de crypto-actifs. Elle obligera les fournisseurs de services de crypto-actifs à transmettre certaines informations sur les clients et transactions à l’institution financière destinataire de ces transactions.
Afin de réduire l’empreinte carbone élevée des crypto-monnaies, les plus gros fournisseurs de services devront en outre divulguer leur consommation d’énergie.
Ces textes, qui devront être officiellement approuvés par le Conseil, visent à renforcer la protection des consommateurs et apporter des garanties contre la manipulation des marchés et la criminalité financière. Mais des voix ont tempéré leur impact. “Les acteurs de la crypto vont pouvoir commencer à appliquer des règles de base de la finance traditionnelle”, a déclaré lors des débats mercredi l’eurodéputée Aurore Lalucq (groupe Socialistes et démocrates, gauche). “C’est bien, c’est mieux que rien, est-ce que c’est suffisant? Non!”, a-t-elle estimé.
L’eurodéputée a notamment regretté les délais d’application prévus, expliquant à guise d’exemple que la plus grande plateforme d’échange de cryptomonnaies au monde, Binance, “pourra se mettre en conformité avec MiCA seulement dans 18 mois, 18 mois pendant lesquels les épargnants n’auront donc aucune protection”. Début avril, Elizabeth McCaul, membre du conseil de surveillance de la BCE, avait elle aussi appelé, dans un billet de blog, à pousser les efforts encore plus loin.
Les transactions illicites effectuées avec des crypto-actifs en 2022 ont plus que doublé sur un an à près de 21 milliards de dollars, malgré un marché qui s’est réduit, selon la plateforme de données Chainalysis. Les déboires survenus ces derniers mois, dont les faillites de banques et de plateformes comme FTX, ont secoué le monde des cryptomonnaies et relancé le débat sur la régulation du secteur.
Les régulateurs américains ont lancé une offensive contre les pratiques des acteurs du secteur. Fin mars, Binance a ainsi été assignée en justice par le régulateur américain des produits financiers dérivés.