Chainlink est reconnue comme une technologie solide, en activité depuis plusieurs années et désormais testée par de grandes institutions financières. Pourtant, cet « oracle des blockchains » reste surtout l’apanage des investisseurs crypto expérimentés.
Dans les prochains mois, l’autorité américaine des marchés, la SEC, examinera plusieurs demandes de fonds négociés en crypto-monnaies (crypto-ETF). Parmi elles figure un ETF Chainlink, proposé par le gestionnaire Grayscale, qui suivra le prix de la crypto LINK.
En cas d’approbation, les investisseurs américains auront un moyen simple de participer à un projet crypto prometteur, sans avoir à acheter et gérer eux-mêmes la monnaie. Mais pourquoi Chainlink est-il considéré comme le pont entre la blockchain et le monde extérieur, et pourquoi son token n’occupe-t-il que la 12ᵉ place du classement des cryptomonnaies les plus importantes ?
Une blockchain a besoin de données fiables
Une blockchain est essentiellement un registre numérique inviolable, ce qui rend le bitcoin attractif comme « or numérique » : chacun peut vérifier le nombre de bitcoins en circulation et la validité des transactions.
Mais que se passe-t-il si l’on souhaite automatiser un contrat d’assurance ? Par exemple, qu’un voyageur soit automatiquement indemnisé si son vol a plus de trois heures de retard. La blockchain ne peut pas mesurer ces événements : elle ne dispose pas des données sur les vols. Les blockchains ont donc besoin d’informations fiables provenant de l’extérieur.
C’est là que Chainlink intervient : ce réseau transmet en toute sécurité des données externes – informations sur les vols, prévisions météorologiques, cours boursiers – vers des smart contracts. Ce sont des programmes sur la blockchain qui s’exécutent automatiquement : « s’il se passe ceci, alors il se passe cela ».
Swift et la finance traditionnelle
Ce qui a commencé comme une technologie obscure fournissant des données fiables et des nombres aléatoires pour des services financiers sans banques et des cryptogames joue désormais un rôle dans le secteur financier traditionnel. Swift, le réseau de messagerie de plus de 11 500 banques dans le monde, expérimente la technologie Chainlink. Non pas pour remplacer les systèmes bancaires existants, mais pour servir de pont entre l’infrastructure financière traditionnelle et le monde blockchain.
« Chainlink forme le pont entre le système financier traditionnel et la crypto – et vice-versa », explique Tim Broekmans, expert crypto et fondateur de Trade Premium. « Ce qui est unique, c’est que Chainlink est le seul à remplir ce rôle à grande échelle, ce qui lui confère un avantage distinct, comme l’a pu l’être Ethereum avec les smart contracts à l’époque. »
Selon Broekmans, ce rôle a reçu récemment un appui de premier plan : le ministère américain du Commerce a annoncé qu’il fournirait officiellement via Chainlink des données du Bureau of Economic Analysis (PIB, inflation…) vers des blockchains comme Ethereum et Solana. Cela ouvre la voie à des stratégies de trading automatisées et à de nouvelles formes de gestion d’actifs.
Euroclear et l’automatisation des données financières
Avec Chainlink, Euroclear teste un système transformant immédiatement ces informations en données numériques standardisées, utilisables par les banques et les gestionnaires d’actifs sans délai, réduisant le travail manuel, les risques d’erreur et les coûts.
Chainlink, un acteur sérieux pour les investisseurs
Pour les investisseurs qui se demandent si d’autres cryptos que bitcoin et Ethereum méritent leur attention, Chainlink figure parmi les rares candidats crédibles. La demande croissante pour la tokenisation – convertir des investissements traditionnels comme des obligations ou l’immobilier en tokens numériques – renforce sa position. Ces applications nécessitent des données fiables et des interconnexions entre systèmes, et c’est précisément là que Chainlink excelle.
Pourquoi LINK n’est pas dans le top 10
Le token LINK de Chainlink ne figure pas dans le top 10 des cryptos par capitalisation, mais reste régulièrement dans le top 20. Cela s’explique par le fait que Chainlink fournit principalement une infrastructure en arrière-plan. Contrairement aux cryptomonnaies destinées aux paiements, le LINK n’a pas vocation à circuler entre consommateurs. Il sert avant tout de token utilitaire : il alimente le réseau et permet à Chainlink d’assurer son rôle de passerelle entre la blockchain et le monde extérieur.
Les cryptos les plus visibles sont souvent celles qui bénéficient d’une forte notoriété ou de la spéculation et du buzz. LINK tire sa valeur de sa fonction au sein du réseau, ce qui la rend moins visible pour le grand public et favorise une croissance plus lente mais plus solide.
Et puis il y a la concurrence : d’autres réseaux d’oracles, comme Pyth ou API3, cherchent à occuper ce domaine. Pourtant, Chainlink reste de loin le plus grand acteur, grâce à son réseau étendu de partenariats et à son adoption large dans les services financiers non bancaires.
Reconnaissance institutionnelle et perspectives
Chainlink a lancé récemment le Chainlink Reserve, un fonds de smart contracts qui achète systématiquement des tokens LINK, soutenant ainsi le prix et créant un effet de levier intéressant pour les investisseurs.
Sur le plan géopolitique, les États-Unis soutiennent ouvertement des projets blockchain comme Chainlink pour contrer la Chine, qui conserve d’importantes réserves d’or et vend des obligations américaines. Chainlink joue ici un rôle de fournisseur de données fiable.
Comparé au bitcoin, Broekmans nuance : « Le bitcoin reste la valeur de référence, et il a mieux performé que Chainlink depuis 2020. Mais Chainlink est techniquement dans une phase compressive qui pourrait déboucher sur une forte explosion. Dans les deux prochaines années, il pourrait même mieux performer que le bitcoin. »
La liste des partenaires ne cesse de s’allonger : de Mastercard et ICE aux banques centrales et gestionnaires d’actifs. Des projets pilotes menés avec des institutions comme BNP Paribas, BNY Mellon ou encore UBS Asset Management renforcent sa crédibilité. Selon l’analyste Zach Rynes, la capitalisation boursière de LINK – environ 16,5 milliards de dollars – laisse entrevoir un potentiel de croissance important, surtout en comparaison avec XRP, dont la taille est plus de dix fois supérieure.
Chainlink reste ainsi un projet atypique : moins visible pour le grand public, mais profondément ancré dans l’infrastructure reliant finance traditionnelle et digitale. Pour les investisseurs qui regardent au-delà du bitcoin et de l’ether, cela constitue un argument intéressant, tout en rappelant que la prudence reste de mise.
Informations pratiques
– Disponibilité : LINK est disponible sur des plateformes internationales comme Coinbase, Binance et Kraken. Aucun ETF Chainlink n’existe encore en Belgique.
– Coûts et risques : acheter LINK soi-même implique des frais de transaction et la sécurisation du token. Un futur ETF simplifierait cette démarche.
– LINK est principalement basé sur la blockchain Ethereum.
– Chainlink Labs développe Chainlink ; Sergey Nazarov en est le CEO.