Bon nombre de soi-disant « finfluenceurs » ont quitté les réseaux sociaux et c’est tant mieux !
L’an passé, les marchés financiers ont été quelque peu sous-pression, ce qui a poussé de nombreux finfluenceurs (contraction de « finance » et « influenceur ») à abandonner leur tribune sur les réseaux sociaux. Et l’idée que ces réseaux sociaux ne soient plus la plaine de jeux d’une bande de jeunes branchés, aux conseils irréalistes en investissements, n’est pas pour déplaire à tout le monde. “Si personne ne vous apprend ce qu’est un rendement réaliste, cela laisse naturellement la place à des cow-boys qui promettront 50% directement”.
Les “finfluenceurs”, que l’on pourrait définir comme les « influenceurs » en finance et investissements, il y en a de toutes les sortes : des fiables comme des charlatans. Certains sont partisans du mouvement FIRE (Financial independence, retire early), dont l’objectif est d’acquérir une indépendance financière en vue d’une retraite anticipée. D’autres sont des adeptes des cryptomonnaies, ou offrent tout simplement des conseils sur la manière d’économiser en faisant ses courses au supermarché ou encore ils vous conseillent sur le décryptage des « tout petits caractères » en bas un contrat d’assurance. Leurs activités dans le secteur de la finance sont différentes, mais tous poursuivent le même objectif : faire en sorte que votre argent vous rapporte. Sauf que nos finances ont été fortement éprouvées au cours de ces douze derniers mois: nous avons dû coup sur coup faire face à la guerre en Ukraine, à une inflation galopante, à des marchés financiers chahutés, à une crise énergétique, puis à des marchés boursiers en chute libre. Et cette période agitée n’a pas aidé à redorer la réputation des finfluenceurs, parfois ternie par des personnes peu scrupuleuses.
Rappelez-vous, l’an passé, la plateforme VRT MAX avait diffusé une émission « Fire, retraite anticipée », dédiée aux cryptomonnaies et montrant de très jeunes retraités baignant dans une opulence financière bling-bling. Suite à une déferlante de critiques, ce documentaire a rapidement été mis hors ligne.
La FSMA, le gendarme des marchés boursiers a même publié une mise en garde contre le message irréaliste, voire dangereux, qu’il véhiculait.
« Fire, retraite anticipée » a collé une image négative aux influenceurs de la finance : tous les finfluenceurs sont des charlatans, cherchant à s’enrichir rapidement et exploitant leurs « followers » en essayant de les enrôler dans des systèmes pyramidaux. “Le contenu du documentaire était du pur sensationnalisme”, déclare Charlotte Van Brabander, fondatrice de @SlimSparen, qui compte plus de 20 000 abonnés et était présente dans la série. “Malgré tout, quelque chose de positif est ressorti de cette débâcle, explique-t-elle, le problème des mauvais influenceurs a été mis en lumière.»
Quelques observations peuvent toutefois être tirées de cette année troublée.
1 Le mauvais finfluenceur disparaît lorsque les marchés boursiers vont mal
La hausse des taux d’intérêt à l’automne dernier a mis à mal les marchés financiers. “C’était la première fois que bon nombre de finfluenceurs se retrouvaient dans une sorte d’hiver économique, à cause de la hausse des taux d’intérêt”, explique Jonas Vermeulen de @Firecommunitybnl, qui compte plus de 14 000 abonnés sur TikTok. “Lorsque les marchés boursiers se portent bien, tout le monde veut être finfluenceur, mais lorsque les marchés boursiers vont mal, cet intérêt disparaît.”
En effet, les finfluenceurs doivent transmettre une leçon importante: il n’y a pas de stratégie d’investissement unique. “Les défenseurs des cryptomonnaies nous ont donné bien du fil à retordre”, déclare Jonas Vermeulen. On voyait sans cesse apparaître des promesses du genre : “investissez 1.000 euros pour récolter 1 million d’euros. ” Or ce n’est tout simplement pas possible. »
2 Le finfluenceur ne se décourage pas
Les finfluenceurs qui restent croient dans l’histoire à long terme. “Lorsque les marchés boursiers ne se portent pas bien, l’intérêt disparaît”, explique Charlotte Van Brabander. “Or c’est justement dans ces moments-là qu’il est important d’apprendre à investir et à acheter des actions. Mais il n’est pas nécessaire pour cela de dépenser des sommes folles non plus. »
“Chaque chose en son temps”, déclare Sébastien Aguilar, fondateur de FIRE Belgium. “Ne prenez pas de risques inconsidérés, mais réinvestissez les gains qui vous sont parvenus pour alimenter régulièrement votre compte en banque.”
3 Le vrai principe FIRE a survécu
Après une année de revers sur les marchés boursiers, on pourrait croire que les adeptes du mouvement FIRE ont complètement disparu. Après tout, ils veulent atteindre une indépendance financière en grande partie grâce à leurs succès sur ces marchés. “Ceux qui appliquent correctement le principe FIRE ont dû être que très peu affectés par les turbulences de l’année écoulée”, affirme M. Aguilar. “Le maître-mot est et demeure : n’investissez que ce dont vous n’avez pas besoin à court terme. L’objectif est de se constituer un portefeuille diversifié d’ETF indiciels à faible coût afin d’obtenir des rendements à long terme. Vous n’avez besoin de rien d’autre. Les mauvaises années boursières sont ainsi prises en compte et sont neutralisées par les bonnes années. Pour nous, 2022 n’est qu’une vaguelette de surface”.
Selon Sébastien Aguilar, il est assez simple d’appliquer correctement le principe FIRE : “Tout ce dont vous avez besoin, c’est avoir la possibilité d’épargner et une connaissance de base de l’investissement indiciel. En optimisant simplement votre épargne et vos investissements, vous pouvez changer votre vie”. Grâce à ce principe, lui et sa famille ont pu vivre de ce portefeuille d’investissements pendant des années. Il n’a plus besoin de travailler et passe du temps en famille, anime la communauté FIRE Belgium (7 000 membres sur Facebook) et enseigne l’investissement indiciel.
4 Le finfluenceur se lance dans l’éducation financière
Une enquête réalisée l’année dernière par l’agence web Shortlist a révélé que 36,4 % des Belges ont déjà suivi les conseils financiers d’un finfluenceur ou d’un coach en ligne. Le nombre de Belges ayant fait confiance à des conseillers bancaires est à peine plus élevé (40 %).
Les finfluenceurs belges et étrangers aiment couvrir dans leurs vidéos tous les sujets liés aux finances personnelles. Selon nos 3 experts, cela leur permet d’assumer en partie un rôle éducatif. “Les connaissances financières des jeunes actuellement sont insuffisantes”, déclare Charlotte Van Brabander. Je pense qu’il y a de la place en Belgique pour des “finfluenceurs” qui peuvent enseigner leurs connaissances aux jeunes ». Avec l’actrice et présentatrice Tatyana Beloy, elle a d’ailleurs élaboré un cours « Comment rendre votre enfant intelligent avec l’argent ».
“En tant que finfluenceur, nous donnons des cours d’éducation financière là où cet enseignement est insuffisant”, ajoute Jonas Vermeulen. “Dans les cours d’économie, l’accent est mis sur la macroéconomie. Les adolescents ou les jeunes adultes n’apprennent nulle part à devenir financièrement indépendants ou à investir en toute sécurité. Si personne ne vous apprend ce qu’est un rendement réaliste, cela laisse naturellement la place à des cow-boys qui promettront 50% directement”.
5 Les finspireurs, ceux qui font de leur mieux
Ceux qui parlent des “finfluenceurs” sont souvent un peu ironiques, voire dédaigneux, à l’égard de ceux-ci, ce terme ayant été trop souvent synonyme de charlatans aux promesses irréalistes.
Les vrais finfluenceurs ne font pas cela, affirment catégoriquement les trois experts. Ils suivent les mêmes règles que les employés de banque. C’est pourquoi ils affichent tous sur leur site web une clause de non-responsabilité indiquant qu’aucun conseil bancaire n’est donné à titre personnel, mais qu’il s’agit d’appliquer des principes d’investissement.
Pour Charlotte Van Brabander, “un influenceur veut aider les gens à aller dans une certaine direction. Je ne les influence pas, j’essaie juste de les inspirer à se développer financièrement et à faire fructifier l’argent qu’ils ont durement gagné.”
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