Steven Van Rijswijk (CEO d’ING Group): “Nous voulons croître là où nous sommes déjà présents”

Steven Van Rijswijk, CEO d'ING Group © © Board ING.Photography: Marieke van der Velden
Patrick Claerhout Patrick Claerhout is redacteur bij Trends.

Au cœur de la vague de fusions et de consolidations qui secoue la finance européenne, ING entend rester offensif. « Notre priorité est claire : développer le private banking et la gestion d’actifs, tout en renforçant nos positions sur les marchés où nous sommes déjà implantés », résume son CEO, Steven Van Rijswijk.

Steven Van Rijswijk, CEO d’ING Group, était à Bruxelles pour inaugurer le siège rénové d’ING Belgique, avenue Marnix. De passage, il a accepté d’évoquer la stratégie du groupe et sa vision du secteur bancaire européen, marqué par une recrudescence des projets de fusions et acquisitions. Sur les rumeurs d’un intérêt de KBC pour ABN AMRO, il s’est abstenu de tout commentaire. Il détaille en revanche la stratégie et le positionnement d’ING Group.

TRENDS. Dans plusieurs pays européens, les banques cherchent à croître et à atteindre une taille critique via des acquisitions. Comment expliquez-vous cette évolution ?

STEVEN VAN RIJSWIJK (CEO ING GROUP). « Après la crise financière, l’attention s’est d’abord concentrée sur la stabilisation, la sécurité et la solidité du secteur bancaire européen. Et nous avons réussi sur ce plan. Aujourd’hui, et pour la première fois depuis longtemps, notamment grâce à l’évolution des taux d’intérêt, les banques se négocient en Bourse au-dessus de leur valeur comptable. Cela signifie que les investisseurs reconnaissent la bonne utilisation de notre capital et l’amélioration de notre gestion. Dès lors, nous entrons désormais dans une phase où les banques peuvent à nouveau envisager fusions et acquisitions. »

Et pourquoi cela est-il nécessaire ?

VAN RIJSWIJK. « Les banques peuvent bien sûr croître de manière autonome. Chez ING, notre bilan a progressé en moyenne de 5 à 7 % par an ces dernières années. Mais nous voulons accélérer cette croissance tout en diversifiant nos activités. Historiquement, ING repose sur trois piliers : une banque de détail digitale, une banque d’entreprises et une banque spécialisée dans le financement de projets complexes. La nature de ces activités, qui consistent à transformer des dépôts en crédits, fait que 80 % de nos revenus proviennent des marges d’intérêt. Nous voulons réduire cette dépendance. »

Dans quels domaines souhaitez-vous diversifier vos activités ?

VAN RIJSWIJK. « Si vous cherchez davantage de revenus sous forme de commissions, vous vous orientez typiquement vers le private banking, la gestion d’actifs, les assurances… C’est dans ce cadre que nous avons sensiblement augmenté notre participation dans la banque de gestion néerlandaise Van Lanschot, passée de 3 à plus de 20 %. Dans des pays comme la Belgique, les Pays-Bas et la Pologne, nous offrons une large palette de services financiers. Mais il existe aussi des marchés où ING est actif comme banque de détail et banque d’entreprises, sans rien proposer entre les deux. Nous voulons combler ces lacunes, et pour cela nous envisageons des acquisitions. »

Quelle est la position d’ING en matière d’expansion géographique ?

VAN RIJSWIJK. « Nous visons une croissance de taille sur les marchés locaux où nous sommes déjà actifs. Et pourquoi concentrer nos efforts sur ces marchés spécifiques ? Parce qu’en Europe, il n’est toujours pas possible de transférer librement capital et liquidités d’un pays à l’autre. Il existe encore des cloisons nationales, ce que je regrette. De plus, il subsiste des différences en matière de réglementation et de culture. Un crédit hypothécaire en Belgique présente des caractéristiques très différentes de celui proposé aux Pays-Bas. Cela signifie qu’une acquisition est plus intéressante lorsque vous disposez déjà d’une certaine taille localement. Si je devais envisager une acquisition transfrontalière pour entrer dans un nouveau marché, je n’en retirerais pas les mêmes avantages. »

À quels pays pensez-vous en particulier lorsque vous ciblez une croissance locale ?

VAN RIJSWIJK. « Certains pays offrent déjà une taille critique et une gamme suffisamment large de services : la Belgique, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie. Mais dans d’autres marchés comme l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, ING bénéficierait clairement d’un accroissement d’échelle. En Espagne, par exemple, nous détenons 4 % de part de marché et nous y sommes rentables. Mais je souhaite y avoir plus d’impact et de pertinence. La taille est un levier pour y parvenir. »

Voyez-vous des opportunités d’acquisition ?

VAN RIJSWIJK. « Oui, car dans certains pays, le marché reste très fragmenté. Prenons l’exemple de l’Allemagne : ING y est la troisième banque en gestion de patrimoine, mais notre part de marché ne dépasse pas 3 à 4 %. De nombreux acteurs de petite taille y sont encore actifs, et c’est là que résident des opportunités de croissance. »

Mais vous ne croyez pas aux acquisitions transfrontalières, comme celle qu’impliquerait — hypothétiquement — un rachat d’ABN AMRO par KBC ?

VAN RIJSWIJK. « La seule raison pour laquelle une banque envisagerait une acquisition sur un nouveau marché, c’est si elle est convaincue de pouvoir faire mieux que l’établissement ciblé. Cela suppose d’avoir un modèle ou une organisation clairement supérieurs, capables de générer une rentabilité bien plus élevée que celle des acteurs déjà présents. Chez ING, ce n’est pas notre priorité. Nous nous concentrons avant tout sur l’élargissement et l’approfondissement de notre offre, en particulier sur les marchés locaux. »

La banque italienne Unicredit souhaite racheter l’allemande Commerzbank. Elle semble croire à une approche transfrontalière ?

VAN RIJSWIJK. « Je ne peux pas me mettre à la place d’Andrea Orcel (le CEO d’Unicredit, NDLR). Mais Unicredit possède déjà une banque en Allemagne. Pour moi, il ne s’agit donc pas d’une opération transfrontalière, mais bien d’une fusion locale. Et c’est précisément là que réside le plus grand potentiel de synergies. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire