Nous avons réuni les présidents des 4 grandes banques belges: “La croissance, le meilleur remède anti-crise”
Dix ans après la crise de 2008, “Trends-Tendances” a réuni les patrons des quatre grandes banques pour faire le point sur leur situation actuelle. Les leçons d’hier ont été apprises, nous assurent-ils. Mais de là à savoir durant combien de temps on va les retenir…
Au sein de toute institution financière, la gestion des risques incombe en dernier ressort au conseil d’administration. Il y a 10 ans, cette gestion s’est avérée à ce point défaillante que le gouvernement a dû voler au secours de Fortis, Dexia, KBC et ING. Et le paysage bancaire belge en a été grandement modifié. Le groupe français BNP Paribas a racheté Fortis, les activités belges de Dexia ont été nationalisées sous le pavillon Belfius, KBC a recentré ses activités sur la bancassurance tandis qu’ING a été contrainte de se défaire de sa branche assurance. Cela pourrait expliquer pourquoi, une décennie après les événements, les dirigeants actuels de ces institutions se sont montrés quelque peu agacés à l’idée de reprendre le débat sur la sécurité, l’avenir et les défis du secteur bancaire…
Ce jour-là, ils étaient pourtant tous les quatre autour de la table pour répondre à nos questions. Un groupe quelque peu hétérogène : Herman Daems, président de BNP Paribas Fortis, est surtout connu pour ses activités académiques et pour son passage à la tête de la société d’investissement Gimv. Président du groupe KBC, Thomas Leysen est un capitaine d’industrie auquel on doit la métamorphose d’Umicore. Quant à Jos Clijsters et Eric Boyer, respectivement présidents de Belfius et d’ING Belgique, ce sont des banquiers pur jus.
TRENDS-TENDANCES. D’aucuns prétendent que l’ordre dans lequel les banques belges ont été touchées a été déterminant quant à la manière dont elles ont été sauvées. Tandis que Fortis a été vendue à la hâte et que Dexia a été nationalisée, les actionnaires de KBC ont été épargnés.
HERMAN DAEMS. On ne peut comparer les situations de KBC et Dexia avec celle de Fortis. Fortis n’avait pas d’actionnaires de référence. Avec qui le gouvernement devait-il parler ? Je peux même dire qu’il n’y avait guère de conseil d’administration car Fortis avait innové en nommant un conseil d’administration très international au sein duquel siégeaient des administrateurs australiens, canadiens et indiens qui savaient à peine ce qui se passait. Depuis lors – et cela plaira à Thomas Leysen – je suis partisan d’un capital de référence.
Mais, même chez KBC, les actionnaires de référence ne pouvaient-ils pas mettre sur la table le capital nécessaire ?
THOMAS LEYSEN. Pas immédiatement, mais il y avait un interlocuteur ou plutôt un groupe de personnes qui pouvaient contribuer à la recherche d’une solution. Il s’agissait évidemment de négociations difficiles mais, au moins, il y avait deux parties à la table. Les actionnaires ont finalement mis la main à la poche mais ils ont souhaité postposer l’inévitable dilution jusqu’à ce que les cours remontent. Il est apparu pendant les négociations que la chose était possible.
Comment comprendre la vulnérabilité des banques belges ? Avaient-elles pris trop de risques ?
JOS CLIJSTERS. Avant tout, elles étaient devenues trop grandes . Certains prétendent aujourd’hui qu’ils avaient vu venir la crise. Mais avaient-ils prévu son ampleur et la rapidité avec laquelle elle s’est développée ? Cette crise a été très soudaine. Il existe une grande différence entre un problème de solvabilité et un problème de liquidités. Un problème de solvabilité est comme un cancer. On peut tenter de le guérir. Mais un manque de liquidités vous asphyxie : c’est terminé en moins de trois minutes ! C’était bien là le coeur du problème.
Pouvons-nous aujourd’hui être rassurés sur la santé des banques ?
T.L. Elles sont incontestablement plus solides aujourd’hui. Les principales modifications concernent les exigences de fonds propres, qui ont plus que doublé, et les ratios de liquidités, beaucoup plus stricts. La supervision est également nettement plus sévère. Le système est assurément plus solide même si la mise en place du cadre européen n’est pas encore totalement achevée.
Ne pensez-vous pas que les exigences en matière de fonds propres soient trop strictes ? Le secteur dénonce parfois le risque d’asphyxie de l’économie.
J.C. Jusqu’ici, ce n’est pas le cas.
ERIC BOYER. Je ne le pense pas, pour la simple raison que nous avons reçu suffisamment de temps pour atteindre les objectifs. En 2009, il s’est tenu une première réunion totalement surréaliste qui rassemblait des responsables de tous horizons. Il s’agissait d’envisager la suite des événements. Nous étions une vingtaine pour représenter le secteur bancaire. Dans un premier temps, nous avons été traités en véritables parias avant que les tensions ne s’apaisent. Les mesures proposées allaient bien au-delà de ce qui est finalement advenu lors des accords de Bâle. L’objectif semblait être de tout verrouiller, de nous tenir véritablement en laisse. Fort heureusement, on a fini par se rendre à l’évidence : si le financement est une matière première indispensable au fonctionnement des entreprises, il fallait aussi laisser du temps aux banques, notamment pour se recapitaliser.
J.C. Mon sentiment est que beaucoup de mesures ont été prises pour éviter une crise identique à celle qui est derrière nous alors que la prochaine sera toute autre. Sachant que personne ne peut en prédire la nature, comment s’y préparer ? Nous consacrons beaucoup d’énergie à faire des projections mais tous nos scénarios sont, forcément, basés sur le passé.
Finalement, on a surtout pris des mesures structurelles de protection, sortes d’airbags pour le système alors que le défi consiste à rendre la voiture plus sûre.
E.B. Jusqu’en 2008, nous avons assisté, partout dans le monde, à une politique d’octroi de crédits totalement irresponsable. Par comparaison, les banques sont devenues infiniment plus prudentes aujourd’hui.
T.L. La génération actuelle de dirigeants a vécu la crise de près, occupant à cette époque des fonctions dans le subtop. Ils sont très conscients des risques. De nombreuses banques ont opéré des choix fondamentaux par rapport à leur business model. Il est assez facile de dire que les banques n’ont rien appris.
J.C. Les leçons de la crise ont été apprises. Mais combien de temps va-t-on les retenir ? Je dis cela en une boutade bien sûr.
La question fondamentale est de savoir dans quelle mesure la culture en vigueur dans le secteur financier a réellement changé.
T.L. J’ai des doutes quant à un changement fondamental de culture des banques d’investissement américaines. Mais il est réel et profond dans la plupart des banques de détail.
KBC affiche un rendement sur fonds propres de 17 % et Belfius de 7 %. La tentation n’est-elle pas grande de chercher à tout faire pour conserver ou atteindre de pareils résultats ?
J.C. Non. Nous avons mené ce débat dans le cadre de notre éventuelle introduction en Bourse. Nous avons décidé que nous ne devions pas chercher à atteindre le même rendement que les autres banques. Belfius veut avoir un profil de risque faible, ce qui signifie un rendement inférieur. En outre, je ne pense pas que ce soit mauvais que les banques aient des profils de risque différents. Cela offre des choix aux investisseurs.
T.L. KBC n’a jamais défini de rendement. Malgré la pression exercée par les marchés financiers, le conseil d’administration a explicitement décidé de ne pas le faire. Le fait que nous ayons atteint un rendement élevé ne signifie pas que notre risque soit beaucoup plus élevé. C’est notre business model – une combinaison d’activités bancaires, d’assurances et de gestion d’actifs nécessitant peu de fonds propres, associée à une gestion rigoureuse des coûts – qui nous permet d’obtenir un rendement attractif.
H.D. Je souscris à l’idée que la crise a été provoquée par la cupidité. Mais en Europe, le problème de l’énorme excédent d’épargne a également joué un rôle. Les banques américaines avaient mis au point le CDO, un produit financier théoriquement bien conçu et qui s’avérait excessivement intéressant pour y investir les excédents d’épargne européens. On peut dire que c’est là que la crise américaine a éclaté, parce que c’est la vérité, mais il faut ajouter que nous avons manqué d’imagination pour investir cette épargne en Europe.
Mais l’excédent d’épargne existe toujours…
H.D. C’est bien pour cette raison qu’une croissance économique plus saine en Europe est la meilleure recette pour éviter une nouvelle crise financière. Dans la foulée, il se crée des opportunités d’investissement, les taux d’intérêt remontent et les banques disposent de davantage de marge. Une croissance plus élevée change complètement la donne.
Comment les banques appréhendent-elles le problème de l’excédent d’épargne ?
E.B. Au sein du groupe ING, nous avons d’un côté un excédent d’épargne en Belgique et, de l’autre, une économie néerlandaise qui a besoin de financement. Du point de vue de la banque, on ne peut rêver d’une situation plus idéale : on collecte en Belgique des fonds que l’on prête aux Pays-Bas. Etant donné que nous opérons en tant que filiale belge, il existe des règles spécifiques – qui s’appliquent également à BNP Paribas Fortis – qui nous limitent dans la manière de financer notre trésorerie en interne. C’est la situation qui prévaut actuellement. Nous devons nous demander s’il ne serait pas souhaitable que davantage de capitaux puissent circuler entre pays européens. Le débat reste ouvert. Il faut ici évoquer un problème typiquement belge. La Belgique est un pays où il existe un important excédent d’épargne mais c’est aussi le pays où l’épargne est la mieux rémunérée. Les banques placent les excédents d’épargne à la BCE à un taux de -0,4 % alors qu’elles doivent payer un taux d’intérêt minimum de 0,11 % aux épargnants. Cela fait de l’épargne une source de financement particulièrement coûteuse.
H.D. La politique de notre pays manque de cohérence. Nos politiciens votent une loi bancaire extrêmement stricte, plus stricte que partout en Europe et, la semaine d’après, ils se rendent à Londres pour convaincre les banques de venir en Belgique après le brexit. Ils souhaiteraient aussi que les banques adoptent un business model différent, qui générerait davantage de revenus tirés des commissions. Et pour couronner le tout, le gouvernement déclare que certaines activités bancaires doivent rester gratuites.
J.C. C’est tout l’illogisme du système bancaire belge. Beaucoup d’opérations doivent être gratuites. C’était possible par le passé, grâce au rendement obtenu sur l’épargne. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et il faut bien que nos revenus viennent de quelque part.
Tenez-vous compte du fait que les taux pourraient rester bas encore longtemps ?
H.D. Nous tenons compte d’une évolution zéro.
J.C. Zéro pendant combien de temps ?
E.B. ( Plaisantant) Vingt ou 30 ans ? ( Rire général)
H.D. Je ne ferai aucun commentaire supplémentaire ( rires). Ce que nous observons aujourd’hui n’indique pas une hausse prochaine des taux d’intérêt. Je suis un peu pessimiste. Si une guerre commerciale devait survenir, nous serions confrontés à une période économiquement difficile et, dans ce cas, il y a peu de chances que l’on se lance dans une politique monétaire visant à faire remonter les taux d’intérêt. Au contraire, on cherchera à soutenir la conjoncture internationale.
Les banques ferment leurs agences et interagissent avec leurs clients à l’aide de multiples applications. Ce faisant, elles s’aventurent sur le terrain d’Amazon, Google et Facebook. Ces géants ne risquent-ils pas de prendre votre place ?
H.D. Cela ne m’inquiète pas. Ces groupes s’intéressent essentiellement aux systèmes de paiement. Les banques font bien plus que cela. Notre core business est la transformation : nous convertissons l’épargne à court terme en prêts à long terme. Nous gérons les risques. Réduire une banque à un système de paiement serait une grossière erreur.
T.L. Je ne pense pas non plus que les banques puissent être balayées. Par contre, ce qui va changer, ce sont les compétences technologiques nécessaires pour être une banque efficiente. Le paysage bancaire continuera à changer, certains groupes s’adapteront mieux que d’autres. Il est à craindre que les petites institutions auront du mal à suivre le mouvement. Mais je ne crois pas à la disparition à terme des banques européennes parce qu’elles auraient été rachetées par Amazon et Alibaba.
J.C. Il ne faudrait pas sous-estimer le poids des acteurs en place. Chacune des banques représentées autour de cette table possède une base d’un million de clients qui communiquent avec elles grâce à des outils mobiles. Ils ne sont pas, loin de là, uniquement séduits par la facilité d’utilisation que nous leur offrons : ils nous témoignent leur confiance.
Grâce aux nombreux contacts avec vos clients et au lien de confiance que vous avez tissé avec eux, ne pourriez-vous pas développer d’autres activités ? Dans les télécoms par exemple ou en tant que fournisseur d’énergie ?
H.D. Les banques tentent de diversifier leurs revenus pour trouver une solution à la pression sur les marges. Mais je nous vois mal aller aussi loin que vous l’imaginez.
J.C. Pour ma part, je crois davantage à une extension sur le marché domestique. Quand vous possédez une plateforme qui attire autant de clients, il y a une belle opportunité de leur proposer des produits non bancaires. Nous avons besoin de générer d’autres revenus. Belfius y croit et nous travaillons sérieusement la question.
E.B. Je voudrais souligner que la législation actuelle nous empêche de nous diversifier dans des domaines qui ne relèvent pas strictement de la banque. Par ailleurs, les investissements dans de nouveaux systèmes seraient colossaux. Les montants dont nous parlons sont tout simplement astronomiques.
On en revient au constat de la difficulté pour les petites institutions de s’adapter aux nouvelles réalités. Quel regard portez-vous sur la consolidation ? On a affirmé que les banques étaient trop grosses et pourtant, on observe aujourd’hui un mouvement qui va encore dans ce sens.
H.D. C’est une question politique. D’un côté, on plaide pour réduire la taille des banques et, de l’autre, on a créé un cadre réglementaire qui pénalise les petites banques alors que l’on sait qu’elles éprouvent et éprouveront de grandes difficultés à suivre le train de la révolution technologique. Je préconise une réflexion politique fondamentale : quel secteur financier voulons-nous ?
J.C. Les petits acteurs éprouvent d’autant plus de difficultés qu’ils dépendent souvent d’un ou deux produits. Je ne crois pas une consolidation semblable à celle que nous avons connue il y a une dizaine d’années, avec des banques de grande taille sur tous les marchés à la fois. Je pense plutôt à une consolidation sur notre petit marché belge, qui compte encore beaucoup trop de banques et d’agences. Il faut mettre de l’ordre dans tout cela.
Luc Coene, l’ancien gouverneur de la Banque nationale, a affirmé à plusieurs reprises qu’une seule grande banque était déjà de trop. Avait-il raison ?
( Rires)
J.C. Il a corrigé cette déclaration de lui-même, mais j’aurais été d’accord s’il avait dit qu’il y avait trop de banques. Les banques ont des frais de fonctionnement importants. Une taille minimum est nécessaire pour y faire face et cette taille minimum augmente tous les jours.
T.L. Il est en effet indispensable aujourd’hui d’avoir une taille suffisante dans tous les pays où vous opérez. Mais je ne crois pas non plus que les grandes fusions transnationales apportent des avantages déterminants. Il y a peu de bons exemples.
Ne faudrait-il pas attendre que soit complètement achevée l’union bancaire qui rend à nouveau possible l’existence de grandes banques européennes transnationales ?
H.D. Oui, mais il faut préalablement que la problématique du mécanisme de résolution soit elle-même solutionnée. Je conçois très bien qu’un organisme de réglementation national veuille contrôler directement ses banques car, en cas de faillite, il n’est pas du tout acquis que la solution vienne de l’Europe. Ce qui signifie que les gouvernements nationaux seraient, à nouveau, en première ligne. Et dans ce cas, le superviseur national devra expliquer ce qui a causé la faillite.
T.L. Pour ce qui concerne le mécanisme de résolution, des jalons importants ont déjà été posés. Qui en Belgique connaît la banque espagnole Banco Popular ? Quasiment personne. De la taille d’une grande banque belge, elle a fait faillite l’an dernier sans que cela n’ait coûté un euro au contribuable, preuve que le mécanisme peut fonctionner. Nous avons déjà fait beaucoup de chemin depuis la crise mais la dernière pièce de l’union bancaire, le système de garantie des dépôts, fait toujours défaut.
En cas de nouvelle crise ce sera tout de même du chacun pour soi et, in fine, le contribuable devra régler l’addition ?
T.L. Aujourd’hui, il existe des outils pour venir au secours d’une banque qui rencontre des problèmes sans qu’il faille solliciter le contribuable. Dans le cas de Banco Popular, seuls les actionnaires et les détenteurs d’obligations ont perdu leur investissement. Est-ce à dire que le contribuable ne sera plus jamais obligé de mettre la main à la poche ? Ce sera avant tout un choix politique. En Italie par exemple, on n’a pas eu le courage de faire payer les détenteurs d’obligations alors que les moyens légaux de le faire existaient bel et bien.
E.B. Depuis la crise, on a érigé un certain nombre de digues qui n’existaient pas auparavant. Mais dans un cas extrême – l’implosion générale du système – peut-on exclure totalement l’intervention de l’Etat ? Le risque zéro n’existe pas.
Nos banques ne sont-elles pas désavantagées par le fait qu’elles dépendent d’un petit pays dont les ressources financières sont limitées ?
E.B. Il est frappant de constater que les institutions financières les plus puissantes possèdent un grand marché intérieur où elles sont dominantes. Le fait que la Belgique soit un petit marché est, en effet, un handicap face à la concurrence internationale.
T.L. Vos ambitions doivent être réalistes. Je ne vois pas comment KBC procéderait si elle voulait devenir la JP Morgan européenne. Ce n’est évidemment l’ambition ni de nos actionnaires ni de la direction. La Belgique ne sera jamais le siège de la plus grande banque européenne.
Y a-t-il quelque chose qui empêche le patron d’une grande banque de dormir ?
H.D. Si quelque chose m’empêche de dormir, ce n’est pas tant les banques que la bonne santé de l’économie. La croissance économique est indispensable à un nombre considérable d’activités. Et il est vrai qu’une économie en croissance profiterait aux banques que je comparerais au flux sanguin de l’économie.
E.B. Je suis extrêmement préoccupé par la problématique de l’endettement. Un endettement élevé paralyse la capacité de croissance de l’économie. Il crée également au sein de la société des inégalités et des déséquilibres qui font le jeu des populistes.
T.L. Ce dernier aspect est effectivement inquiétant car chaque crise, et il y en aura encore, nécessitera une forme de coopération internationale. Mais si le pays le plus puissant du monde, les Etats-Unis, ne croit plus en la coopération et déclenche des crises là où il n’y en a pas, nous nous retrouverons en terrain inconnu. En Europe, l’Italie constitue le grand point d’interrogation. Un certain nombre de pays clés sont dirigés par des politiciens qui ne pratiquent pas la coopération internationale ou qui l’ont même en aversion.
J.C. Je pense que personne n’a encore réellement pris la mesure des évolutions géopolitiques de ces derniers mois. Il y a six mois, personne n’évoquait sérieusement la possibilité d’un Brexit dur. Personne ne pensait que l’imprévisibilité de Donald Trump puisse être véritablement dangereuse. Que dire des problèmes que posent aujourd’hui la Turquie et l’Italie ? La rapidité et l’ampleur de ces changements me paraissent plus importantes que ce à quoi on s’attendait. Je vois un parallèle avec la situation d’il y a 10 ans.
H.D. Qui parlait de protectionnisme il y a 10 ou 15 ans ? L’Europe semblait solidement unie. Mais nos certitudes d’hier sont remises en question. Les prévisions économiques tiennent peu compte des changements géopolitiques. A l’heure du Brexit, on s’attend toujours à ce que l’économie européenne se développe. J’ai l’impression que les prévisionnistes ne lisent pas les journaux.
T.L. La réalité, c’est que nous sommes confrontés à un ralentissement de la croissance. Et nous n’avons pas encore évoqué les cyber-risques. Jusqu’ici, le secteur bancaire a réussi à éviter d’importants problèmes de cybersécurité, mais la lutte contre les pirates informatiques est permanente.
J.C. Les grandes banques sont encore relativement bien protégées parce qu’elles ont beaucoup investi. Mais les pirates pourraient profiter de la fragilité des plus petites pour pénétrer le système.
Si cela devait arriver, reviendrions-nous instantanément à l’âge de pierre ?
J.C. Oui.
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