Lombard Odier voit grand à Genève… et en Belgique

Le nouveau siège de Lombard Odier, sur les rives du lac Léman. © PG/Lombard Odier
Sébastien Buron
Sébastien Buron Journaliste Trends-Tendances

Avec l’inauguration de son siège futuriste One Roof à Genève, Lombard Odier affiche ses ambitions, en Suisse comme en Belgique. L’ouverture d’un bureau à Anvers vient compléter celui de Bruxelles, renforçant sa proximité et son expertise dans un marché en pleine mutation.

Chemin Messidor, numéro 1, à Bellevue. La vue sur le lac Léman est imprenable. Depuis la vaste terrasse du septième étage, on aperçoit au loin les Alpes et le mont Blanc. C’est ici, aux portes de Genève, que s’élève désormais le nouveau siège de la banque privée Lombard Odier : une adresse qui allie prestige, modernité et un profond ancrage dans un paysage d’exception.

Près d’une décennie après l’initiation du projet, One Roof s’impose en effet par sa silhouette pas comme les autres : une structure de 170 mètres de long, répartie sur sept étages, aux courbes à la fois futuristes et gracieuses, tandis qu’une forêt de piliers blancs l’incruste dans la nature environnante. Imaginé par les prestigieux architectes bâlois Herzog & de Meuron (stade national de Pékin, Tate Modern à Londres, Allianz Arena à Munich, etc.), le bâtiment marque clairement une rupture avec l’architecture bancaire classique.

“Nous aurions pu opter pour un ‘coffre-fort de pierre’, comme une banque traditionnelle, mais nous avons préféré un bâtiment avant-gardiste : ouvert, baigné de lumière, tourné vers l’extérieur, situe Hubert Keller, chef de file des associés-gérants de Lombard Odier. Cet esprit novateur nous anime depuis toujours, prolonge le banquier suisse. Il est devenu notre philosophie, incarnée par notre devise : ‘rethink everything’. S’adapter, se transformer et se remettre en question : c’est exactement ce qui nous a guidés tout au long du projet.”

Discrétion irréprochable

Exit en effet l’image hermétique du coffre-fort obsolète ! Transparence, flexibilité… À l’intérieur, un immense atrium sous verrière traverse l’édifice en son centre. Les espaces de travail alternent entre vastes plateaux ouverts, des espaces fermés et plus de 250 salles de réunion. Outre un restaurant et une salle de fitness, le nouvel écrin comprend également un auditorium pouvant accueillir 500 personnes. Côté durabilité, valeur chère à Lombard Odier, un système de panneaux solaires se complète d’une boucle thermique alimentée par l’eau du lac pour réchauffer ou refroidir le bâtiment. L’immeuble favorise bien évidemment la mobilité douce avec plus de 400 places pour vélos. Situé à cinq minutes en voiture de l’aéroport de Genève, il est accessible en train… et même en bateau.

Quant aux clients fortunés de la banque, ils accèdent à d’élégants salons offrant une vue spectaculaire sur le lac au terme d’un parcours pensé comme une expérience : une atmosphère feutrée, chaleureuse “comme à la maison”, alliée à une discrétion irréprochable. Et ce, grâce à un chemin qui évite toute rencontre fortuite via deux ascenseurs séparés : un pour la montée, l’autre pour la descente.

Changement de taille

Contrastant avec les bureaux élégants, mais exigus, de l’ancien siège de la rue de la Corraterie situé en plein centre-ville de Genève, le bâtiment symbolise le changement de taille de la plus ancienne banque privée de Genève (1796), qui gère désormais 318 milliards d’euros de patrimoine dans le monde. “Ce nouveau siège est bien plus qu’un bâtiment : il incarne nos valeurs et reflète nos ambitions de croissance future”, souligne Hubert Keller.

Prévu pour accueillir 2.600 postes, One Roof regroupera sous un même toit les 2.200 collaborateurs jusqu’ici répartis sur six sites de la place financière helvétique. “Nous devions tirer les conséquences d’un changement d’échelle majeur, lié à notre développement en Suisse et dans le monde, poursuit Hubert Keller. Il y a un siècle, nous étions 100. Au début des années 1970, nous étions 200. Dix ans plus tard, 300. En 1999, nous franchissions le cap des 1.000 ; en 2010, celui des 2.000. Aujourd’hui, nous sommes plus de 3.000 à travers le monde”, complète l’associé-gérant, soulignant que cette croissance avait conduit à répartir ses équipes genevoises sur une demi-douzaine de sites, pour certains relativement éloignés les uns des autres : “Une organisation qui ne correspondait pas à notre ADN, fondé sur le contact humain, la collaboration, la fluidité des échanges.”

Cette stratégie d’expansion ne se limite pas à Genève et aux rives tranquilles du lac Léman. La maison poursuit également son développement à l’international. Avec donc plus de 3.000 collaborateurs répartis dans une vingtaine de pays à travers le monde, Lombard Odier combine présence locale et vision globale, offrant à sa clientèle des services de gestion patrimoniale, de planification fiscale et de transfert intergénérationnel adaptés aux exigences de chaque marché. Une logique de croissance dans laquelle s’inscrit pleinement la Belgique.

Familles flamandes

Cela fait d’ailleurs maintenant plus de 20 ans que la banque privée suisse est présente dans notre pays, qui fait partie des six marchés principaux de Lombard Odier, avec la Suisse, la France, le Royaume-Uni, l’Asie et le Moyen-Orient. Implantée à Bruxelles depuis 2004 avec une équipe restreinte, la maison compte aujourd’hui une trentaine de collaborateurs et accompagne principalement des entrepreneurs et des familles fortunées.

L’ouverture, il y a un an, d’un deuxième bureau à Anvers – en complément du siège bruxellois de l’avenue Louise – a renforcé la présence de Lombard Odier dans le nord du pays. Elle fait même de la Belgique le seul marché européen, en dehors de la Suisse, à disposer de deux antennes locales, souligne Geoffroy Vermeire, managing director de Lombard Odier pour la Belgique. “Nous avons démarré de zéro et comptons déjà sept collaborateurs, dont quatre banquiers. Anvers représente aujourd’hui une bonne partie de la croissance de Lombard Odier en Belgique. Le nord du pays concentre beaucoup d’activité entrepreneuriale, des ventes d’entreprises, et donc des besoins spécifiques en matière de gestion patrimoniale.”

“La Belgique est le seul pays européen, hors Suisse, à disposer de deux antennes locales.” – Geoffroy Vermeire , “managing director” de Lombard Odier pour la Belgique

Lombard Odier n’est bien évidemment pas la seule à avoir perçu le potentiel du private banking en Flandre. Depuis plusieurs années, de nombreux acteurs de renom se disputent une part croissante de ce marché en plein essor, rivalisant pour attirer une clientèle exigeante et fortunée. L’an dernier, un autre groupe suisse tout aussi prestigieux, Edmond de Rothschild, a franchi le pas en ouvrant un bureau à Gand. Plus récemment, c’est Belfius qui a annoncé le lancement d’une nouvelle marque (Belfius Private), prévoyant l’ouverture de 30 private houses supplémentaires sur tout le territoire d’ici 2027, avec comme ambition de devenir la première banque privée belge.

Entouré d’une forêt de piliers, le bâtiment est composé de bureaux qui s’ouvrent sur un immense atrium. © PG/Lombard Odier

Miser sur le haut de gamme

Mais face à une concurrence qui ne cesse de s’intensifier, Lombard Odier mise sur son positionnement distinct et haut de gamme.

“Il est vrai que le marché belge est très concentré, dominé par quatre grandes banques qui se livrent une concurrence intense sur le segment du private banking, observe Geoffroy Vermeire. Mais il y a une différence entre private banking et wealth management. Chez Lombard Odier, notre cœur de cible se situe plutôt au-delà de 5 millions d’euros. Nous accompagnons des entrepreneurs et des familles fortunées, souvent européennes, avec une approche sur mesure. Notre gamme de produits est extrêmement large. Nous opérons à l’échelle mondiale dans les domaines des actions, des obligations, du private equity et de la dette privée, ce qui nous permet d’offrir à nos clients une grande variété d’options d’investissement”, prolonge le banquier belge, rappelant le modèle de partenariat de la maison, l’un de ses principaux atouts, selon lui.

Car les intérêts de la banque et de ses clients vont dans le même sens, dit-il. “Les associés-gérants engagent leur propre capital et incarnent les valeurs de la maison, garantissant indépendance et proximité. Les clients apprécient d’avoir en face d’eux le propriétaire de la banque, à la fois actionnaire et décideur. Pour certains, c’est un facteur déterminant.”

Le label suisse

Et le label suisse dans tout ça ? Est-ce un argument de plus par les temps qui courent ? Sans aucun doute, répond Geoffroy Vermeire.

“Le secret bancaire n’existe plus depuis plus de 10 ans, mais la stabilité, la solidité et l’expertise du modèle suisse restent des gages de confiance. Lombard Odier, forte de plus de 230 ans d’existence, est restée indépendante et a traversé toutes les crises. Pour certains clients, savoir qu’ils parlent à un banquier qui est aussi actionnaire de la maison constitue un véritable signe de fiabilité. La place financière suisse a toujours été un repère de stabilité, et face à l’instabilité actuelle dans le monde, nombreux sont ceux qui recherchent des institutions solides offrant un refuge et une perspective à long terme”, résume Geoffroy Vermeire.

Fiscalité belge

En Belgique également, la banque se distingue par sa capacité à accompagner les familles sur plusieurs générations et à l’international. Notamment face à des changements fiscaux tels que l’introduction prochaine de la nouvelle taxe sur les plus-values, laquelle ne la freine visiblement pas, bien au contraire. “À court terme, c’est paradoxalement une opportunité, assure Geoffroy Vermeire. Certains entrepreneurs envisagent de revendre avant la fin de l’année pour éviter la nouvelle taxe de 10%. Nous les accompagnons dans ce processus. En réalité, la complexité de la fiscalité belge suscite de nombreuses discussions avec nos clients au sujet de leurs avoirs. Pour nous, c’est une opportunité enrichissante, qui renforce la relation, nous permet d’apporter un accompagnement supplémentaire et de présenter de manière claire notre modèle d’affaires.”

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