Le bitcoin, lingot d’or numérique
Les cryptos ne sont pas de véritables monnaies. Mais elles pourraient concurrencer l’or dans son rôle de ” valeur de réserve “.
Le 8 avril dernier, Miami accueille la grand-messe du bitcoin. Pieter Thiel, milliardaire cofondateur de PayPal, de Palantir et investisseur de la première heure dans Facebook, prend la parole et s’attaque aux ennemis du bitcoin. Il en veut particulièrement à la ” gérontocratie financière ” dans laquelle il place le patron de JP Morgan Chase, Jamie Dimon, le patron de BlackRock, Larry Fink, et surtout Warren Buffett, qu’il baptise ” le grand-père sociopathe d’Obama “. Réplique de Warren Buffett quelques jours plus tard : “Je ne sais pas si dans cinq ans ou dix ans, le bitcoin vaudra plus ou moins qu’aujourd’hui. Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’il ne modifie rien, ne produit rien”.
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Quand on lui demande quel rôle économique les cryptos peuvent jouer, le prix Nobel d’économie Paul Krugman n’est pas loin de répondre comme Warren Buffett. ” A part les transactions illégales dans lesquelles les cryptomonnaies peuvent parfois offrir l’anonymat (…), en l’état actuel des choses, les cryptomonnaies ne jouent pratiquement aucun rôle dans les transactions économiques si ce n’est la spéculation sur les marchés des cryptomonnaies eux-mêmes “, note-t-il dans le New York Times.
Les banquiers centraux et les régulateurs ne parlent d’ailleurs pas de ” cryptomonnaies ” mais de ” crypto-actifs “. Une véritable monnaie permet de payer des biens et des services, d’évaluer la valeur des choses (servir d’unité de compte) et d’épargner. Elle a une valeur légale (un commerçant est obligé de l’accepter) et sa valeur repose sur les avoirs de la banque centrale et sur la solidité de l’économie du pays qui l’adopte. Or, si l’on ne prend que la principale crypto, la valeur du bitcoin est simplement d’être un ” jeton numérique ” infalsifiable et négociable sans intermédiaire. Mais à quelques exceptions près, il n’est pas un moyen de payement et sa volatilité est trop grande pour servir d’instruments d’épargne ou d’unité de compte. Quand voici quelques mois, le Salvador l’a adopté pour remplacer sa devise qui prenait l’eau, il n’a fait qu’accentuer la catastrophe. Peu de Salvadoriens utilisent le bitcoin, et l’emprunt d’Etat que le pays a contracté dans cette cryptodevise est une exécrable opération financière.
Concurrencer l’or
Même Samuel Bankman-Fried, fondateur de la plateforme d’échange FTX, soulignait dans le Financial Times que le bitcoin, avec son processus de minage toujours plus gourmand en puissance de calcul et en énergie, n’était pas un bon système de payement. ” Les choses avec lesquelles vous effectuez des millions de transactions par seconde doivent être extrêmement efficaces et légères et consommer moins d’énergie. ” Il ajoutait toutefois que cela ne marquait pas la disparition du bitcoin, qui peut servir de valeur de réserve, un peu comme l’or.
La banque d’affaires Goldman Sachs le pense aussi. En début d’année, elle soulignait que le bitcoin, avec (à l’époque) une capitalisation de 700 milliards de dollars (on est aujourd’hui en dessous de 570 milliards), n’est pas ridicule face à l’or qui, comme placement ou valeur de réserve, pèse 2.600 milliards de dollars. Or, les mines d’or ne sont pas inépuisables. Et Goldman Sachs prédisait en janvier que le bitcoin peut développer son statut de ” lingot numérique “, poussant la valeur du bitcoin qui, selon la banque d’affaires, pourrait atteindre 100.000 dollars cette année. Alors bien sûr, avec un bitcoin désormais tombé sous les 30.000 dollars, l’objectif paraît désormais très ambitieux.
2.600 milliardsde dollars
Le poids de l’or comme placement ou valeur de réserve.
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