Coup dur pour Bruxelles qui voit Belfius lui couper net l’accès au crédit. Un signal fort qui illustre la gravité de la situation budgétaire de la capitale. Un choix qui intervient aussi alors que la banque publique prépare sa privatisation partielle et cherche sans doute à rassurer les investisseurs.
Fini de faire l’aumône, même pour une banque publique : Belfius a décidé de fermer net sa ligne de crédit de 500 millions à Bruxelles dès le 1er janvier 2026. Le geste est fort. Il met crûment en lumière l’état préoccupant des finances de la capitale et relance avec insistance le débat sur la soutenabilité de sa dette.
Tout sauf anodin
Certes, depuis plusieurs années déjà, la situation financière de Bruxelles inquiète. Mais la décision de Belfius tombe à un moment pour le moins inattendu. Car, en février dernier déjà, la banque avait resserré la vis en réduisant la ligne de crédit du gouvernement régional de 500 à 200 millions d’euros, avant de revenir partiellement sur sa décision quelques semaines plus tard.
À l’époque, le ministre bruxellois du Budget Sven Gatz (Open Vld), avait interprété ce geste comme “un signal clair” envoyé par la banque aux éminences bruxelloises eu égard aux difficiles négociations de formation du gouvernement de la capitale.
Pour le professeur de finances publiques Herman Matthijs, la décision de Belfius décision est donc du coup tout sauf anodine, en particulier à cause de son timing. Il y voit un lien direct avec la future privatisation partielle de la banque. “Dans ce contexte, un dossier comme celui de Bruxelles devient un véritable boulet. Cela effraie les investisseurs”, explique-t-il à nos confrères de la VRT.
Se désengager du secteur public
Si Belfius ne fait aucun commentaire au sujet de sa décision, une chose est certaine, en effet. La banque demeure le principal prêteur des collectivités locales (communes, hôpitaux…). Malgré ses efforts de diversification et la croissance de son activité de crédit aux entreprises ainsi que dans les services aux particuliers fortunés, elle reste un grand pourvoyeur de crédits au secteur public. Les prêts inscrits à son bilan en faveur des collectivités locales et des institutions publiques dépassent désormais les 25 milliards d’euros.
Pour ceux qui connaissent bien le monde bancaire et suivent de près Belfius, c’est donc clair : la banque d’Etat veut se désengager de son rôle de pourvoyeur de crédit au secteur public, qui est pourtant le reflet de son actionnariat, afin d’afficher un profil financier plus attractif. En toilettant ainsi ses comptes, elle espère séduire, voire rassurer, les investisseurs susceptibles de participer à sa privatisation partielle. Des investisseurs dont on peut penser qui veulent entrer dans le capital d’une banque commerciale et non dans celui d’une banque qui porte un risque de crédit trop associé à la Belgique.
Surveillée de près par la BCE
D’ailleurs, à l’appui de cette thèse, Herman Matthijs s’étonne de voir Belfius resserrer la vis pour Bruxelles alors que Standard & Poor’s n’a toujours pas abaissé la note de crédit de la Région bruxelloise.
À moins, bien sûr, que cette décision de la banque ne traduise avant tout une évaluation rigoureuse des risques. Il ne faut pas oublier que Belfius appartient au cercle très restreint des institutions financières dites “systémiques”, celles dont la solidité est jugée essentielle à la stabilité du système bancaire européen. À ce titre, elle fait l’objet d’une surveillance étroite de la Banque centrale européenne (BCE) et doit se conformer à des exigences prudentielles particulièrement strictes.