10 choses à retenir de la biographie de Steve Jobs

© Reuters

Ses collègues, ses produits, ses concurrents, ses partenaires… Walter Isaacson a recueilli les confidences du patron star et les distille dans sa biographie. Florilège.

La biographie de Steve Jobs, sortie le 24 octobre dans les librairies américaines, bat tous les records de ventes. Le bestseller est désormais n° 1 des ventes chez Amazon (papier et livre numérique) et sur l’iBookstore d’Apple. Au point qu’il pourrait bien devenir le livre le plus vendu en 2011… en moins de trois mois d’exploitation.

L’ouvrage est le résultat de deux années de recherche, passées à interroger plus d’une centaine de personnes qui ont côtoyé le cofondateur d’Apple, et de plus de 40 heures d’entretien avec Jobs lui-même. Un travail de fourmi qui révèle enfin au grand jour la personnalité complexe de ce dirigeant énigmatique. On le perçoit parfois fragile, plusieurs fois en larmes, mais aussi séducteur, visionnaire, capricieux, manipulateur, autoritaire et surtout odieux, même avec ses amis et très proches collaborateurs.

Retour sur 10 thèmes-clés de la biographie de Steve Jobs.

1. Jony Ive, chef designer d’Apple et partenaire spirituel de Steve Jobs

Jony a fait la différence, pas seulement chez Apple mais dans le monde, c’est énorme. Il est diaboliquement intelligent dans tous les domaines. Il comprend les concepts commerciaux, les concepts marketing. Il assimile les choses très rapidement, d’un clic. Si j’avais un partenaire spirituel chez Apple, ce serait Jony. Jony et moi sommes à l’origine de la plupart des produits et puis on les montre aux autres et on leur demande : qu’est-ce que vous en pensez ? Il possède à la fois une vue d’ensemble pour chaque produit, mais peut aussi aller dans ses détails les plus infimes. Et il comprend qu’Apple est une entreprise qui fait des produits. Ce n’est pas seulement un designer. C’est pour cela qu’il travaille directement pour moi. Il a plus de pouvoir opérationnel que n’importe qui d’autre chez Apple, à part moi. Il n’y a personne (chez Apple) qui peut lui dire ce qu’il faut faire ou ce qu’il faut écarter. C’est comme cela que je l’ai voulu.”

2. Jobs a modifié le design de l’iPhone à quelques mois de son lancement

Alors qu’une équipe travaillait secrètement depuis plusieurs mois sur l’iPad, Apple s’associe avec Motorola pour créer un téléphone, le Rokr, incorporant les fonctionnalités de l’iPod. Un échec. “L’appareil qui pourrait nous mettre en difficulté, c’est le téléphone mobile. Le marché des appareils photo numériques a été décimé par les téléphones équipés de caméras. La même chose pourrait arriver à l’iPod si les fabricants de téléphones commencent à intégrer un baladeur dans leurs appareils.”

Quelques mois avant le lancement de l’iPhone, Steve Jobs décide toutefois de modifier le design de l’appareil. Une décision qui obligera à revoir l’ensemble de la partie interne du smartphone. Steve Jobs et Jony Ive : “Les gars, vous vous êtes tués pour réaliser ce design durant ces neuf derniers mois, mais nous allons le changer. Nous allons tous devoir travailler nuits et weekends, et si vous voulez, on peut vous distribuer des pistolets pour que vous nous tuiez maintenant.” Au lieu de se rebeller, l’équipe accepta : “Ce fut un des moments chez Apple dont je suis le plus fier”, raconte Jobs.

3. Steve Jobs jure la destruction d’Android

“J’ai dit que, si nous avons de bonnes relations, nous garantirons à Google l’accès à l’iPhone ainsi qu’une ou deux icônes dans le menu principal.” Mais Steve Jobs a aussi menacé : si Google continue à développer Android et utilise n’importe laquelle des fonctions de l’iPhone, comme le multitouch, il n’hésitera pas à les traîner en justice.

“Notre procès (contre HTC) dit : Google, vous avez pillé l’iPhone. C’est du grand larcin. Je consacrerai jusqu’à mon dernier soupir et chaque centime des 40 milliards de dollars de la trésorerie d’Apple pour réparer ce tort. Je vais détruire Android parce que c’est un produit volé. Je suis prêt à partir en guerre thermonucléaire pour ça. Ils (Google) sont morts de peur parce qu’ils savent qu’ils ont tort. En dehors de leur moteur de recherche, les produits de Google – Android, Google Docs – sont de la merde.”

“On vous a pris la main dans le sac”, a-t-il dit à Eric Schmidt, alors CEO de Google. “Négocier ne m’intéresse pas. Je ne veux pas de votre argent. Si vous me donnez 5 milliards de dollars, je n’en veux pas. J’ai plein d’argent déjà. Je veux que vous arrêtiez d’utiliser nos idées dans Android, c’est tout ce que je veux.”

4. Intel ne comprend rien au mobile

“Pour les hautes performances, Intel est le meilleur. Ils construisent les puces les plus rapides, si la consommation électrique et le coût ne sont pas des facteurs importants pour vous… Mais leur fonction graphique est merdique.”

Sur l’insistance du patron d’Intel, Steve Jobs pensait même utiliser la puce Atom, destinée aux netbooks, pour l’iPad, avant d’être convaincu par son équipe de choisir ARM. “Chaque trimestre, nous avons une réunion avec Paul Otellini (CEO d’Intel), moi et trois de mes lieutenants. Au début, on a fait des trucs formidables. Et il voulait faire partie du projet pour fournir les puces pour les futurs iPhone. Il y a deux raisons pour ne pas avoir choisi Intel pour l’iPhone. La première est qu’ils ne vont pas assez vite. Ils sont comme ces bateaux à vapeur, pas très flexibles. Alors que nous, nous avons l’habitude de prendre des décisions rapidement. Ensuite, on ne voulait pas tout leur apprendre pour qu’ils aillent ensuite le vendre à nos concurrents.”

5. Jobs voulait créer un téléviseur Apple

Le patron d’Apple avait véritablement envie de faire, pour le poste de télévision, ce qu’il a fait pour les ordinateurs, les baladeurs numériques et les téléphones : les rendre simples et élégants. “J’aimerais créer un poste tout intégré et très facile à utiliser. Il serait automatiquement synchronisé avec tous vos appareils et avec iCloud. Son interface utilisateur serait la plus simple que l’on puisse imaginer. J’ai enfin trouvé le secret pour le faire.”

6. Steve Jobs voue une grande admiration pour Mark Zuckerberg

Même si cela n’apparait nulle part dans sa biographie, Jobs a avoué à son biographe avoir une très grande admiration pour le fondateur de Facebook : “On parle de réseaux sociaux au pluriel, mais il n’y a personne d’autre que Facebook. Juste Facebook qui domine tout ça. J’admire Mark Zuckerberg. Je le connais seulement un petit peu. Mais je l’admire pour ne pas avoir vendu (son entreprise). Pour vouloir construire une entreprise. J’admire cela, beaucoup.”

7. Microsoft n’a aucun goût

Comme pour Google, Jobs n’a jamais mâché ses mots pour dire ce qu’il pensait de son rival de toujours, Microsoft : “Ils nous ont complètement pillé (Mac OS avec Windows), parce que Bill Gates n’a pas de scrupules. Le seul problème, avec Microsoft, c’est qu’ils n’ont pas de goût, ils n’ont absolument aucun goût. Ils n’ont pas d’idées originales et n’apportent pas beaucoup de culture dans leur produit.”

Le Zune était mauvais parce que les gens chez Microsoft n’aiment pas vraiment la musique et l’art comme nous.”

“Il est très facile de jeter la première pierre à Microsoft. Ils sont clairement tombés de leur position dominante. Ils sont devenus caducs. Ce qui ne m’empêche pas d’apprécier ce qu’ils ont fait, et leur effort. Ils étaient très bons sur le plan économique. Mais ils n’ont jamais été très ambitieux côté produits, comme ils auraient dû l’être. Bill (Gates) aime se décrire comme un homme de produits, mais en fait c’est un homme d’affaires. Gagner des contrats était plus important pour lui que de créer de superbes produits.”

“Microsoft n’a jamais eu dans son ADN les lettres et les sciences sociales (liberal arts). Même lorsqu’ils ont vu le Mac, ils n’ont pas pu le copier correctement. Ils ne l’ont tout simplement pas compris.”

8. Jean-Louis Gassée, ancien directeur d’Apple France

Alors qu’il est sur le point de perdre son poste à la tête de la division Macintosh, Steve Jobs prépare un coup pour virer le PDG d’Apple d’alors, John Sculley. “J’ai commis l’erreur d’en parler à Gassée.” Le Français, qui avait été choisi pour remplacer Jobs à la tête de la division Mac, informe Sculley des plans de Jobs. Quatre mois plus tard, Jobs est viré d’Apple. “Gassée est l’une des rares personnes dans ma vie que je qualifierais de vraiment horrible. Il m’a planté un couteau dans le dos en 1985.”

9. L’iPod est né de la frustration de Steve Jobs

Au cours du développement du logiciel iTunes, Jobs et son équipe ont été frustrés par la complexité d’utilisation des baladeurs numériques disponibles sur le marché. “C’était de la merde”, raconte Jobs. Un an plus tard, en octobre 2001, Apple sort l’iPod, d’une capacité de stockage de 1.000 chansons, énorme pour l’époque. “On savait que l’iPod était cool parce que chacun de nous en voulait absolument un.”

10. Sa vie privée

Vers la fin de sa vie, Jobs a regretté de ne pas s’être fait opérer plus tôt afin de retirer sa tumeur cancéreuse. Au lieu de cela, et pendant neuf mois, il a compté sur tout un tas de traitements alternatifs (régime végétarien, acuponcture, phytothérapie, etc.) et sur sa seule volonté de fer pour faire régresser son cancer. “Je ne voulais pas qu’ils ouvrent mon corps, alors j’ai essayé de voir si d’autres choses pouvaient fonctionner.”

La vie familiale de Jobs est pour le moins complexe. Orphelin, il refuse de rencontrer son père biologique qu’il accuse d’avoir abandonné sa mère biologique et sa soeur, la romancière Mona Simpson. A 23 ans – l’âge de ses parents biologiques à sa naissance – Jobs devient papa d’une petite fille, Lisa. Mais il commencera par la renier et ne la reconnaîtra qu’avant l’introduction en Bourse d’Apple, en décembre 1980. Elle avait alors deux ans.

“J’aurais souhaité avoir agi autrement. Je ne me voyais pas être père, alors je n’ai pas assumé. Mais s’il fallait le refaire, je ferais un meilleur travail.” Jobs s’est très peu occupé de sa Lisa durant son enfance, jusqu’à son entrée au lycée, où elle vivra quatre ans avec la famille de son père. Jobs s’est marié depuis et a eu trois autres enfants. Les relations avec Lisa étaient parfois tendues et ils ne sont revus que très sporadiquement durant cette dernière décennie.

Jean-Baptiste Su (dans la Silicon Valley), L’Expansion.com

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