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Successions: un très lourd impôt sur la fortune

Actuellement, on répète à l’envi, et sans grande vérification, que le capital serait privilégié du point de vue fiscal en Belgique.

Certes, ce pays est un de ceux où la ponction fiscale sur les revenus du travail est la plus lourde au monde et cela n’est pas près de changer, malheureusement. Mais il serait inexact d’affirmer pour autant que la Belgique serait un paradis fiscal pour les grosses fortunes.

Avec un précompte à 25 % sur la quasi-totalité des revenus mobiliers, la Belgique se situe au-dessus de la moyenne pour la taxation des revenus d’actions et d’obligations. Elle ne connaît certes pas d’impôt annuel sur la fortune, mais un tel impôt, fort peu rentable et qui constitue une véritable incitation à quitter le pays, est en réalité très rare en Europe et se limite pratiquement à la France et l’Espagne.

On oublie souvent que la fortune est par contre très lourdement taxée à chaque génération, sous forme de droits de succession qui frappent la totalité du patrimoine dévolu à chaque héritier.

Les taux de cet impôt, aujourd’hui régional, ont été fixés en 1936, de même que les tranches. Ils ont peu changé depuis lors — ils ont en réalité augmenté — et les tranches n’ont jamais été indexées, de sorte que les droits dus, même entre parents et enfants, pour une succession moyenne sont calculés à des taux qui avaient été fixés à l’époque pour des fortunes très importantes.

Si on se limite aux successions les moins taxées, celles entre époux ou entre parents et enfants, on atteint ainsi en Région bruxelloise un taux de 24 % pour ce qui excède 250.000 euros et de 30 % pour ce qui excède 500.000 euros. Il n’y a guère de différence significative avec ces taux en Région wallonne, et les taux sont légèrement plus faibles en Flandre, où les modalités de calcul sont par ailleurs un peu plus avantageuses.

Il est intéressant de faire une comparaison avec les impôts perçus dans les autres pays européens et l’on constate alors que du point de vue des droits de succession, les fortunes belges, même transmises aux époux ou aux enfants, figurent elles aussi parmi les plus taxées.

Il y a d’abord beaucoup de pays qui ne connaissent tout simplement aucun droit de succession. Il s’agit non seulement de pays habituellement considérés, à tort ou à raison, comme fiscalement avantageux (comme le Luxembourg et la plupart des cantons suisses), mais aussi de pays à taxation en général élevée (comme l’Italie, l’Autriche ou le Portugal) et même de pays traditionnellement socio-démocrates (Suède, Norvège), ou qui ont connu des régimes communistes (Slovaquie, Estonie).

Du point de vue des droits de succession, la Belgique est très loin de l’image de paradis fiscal des riches que certains lui attribuent. Elle est même tout le contraire…

Dans la plupart des autres pays, qui, eux, connaissent des droits de succession, ceux-ci ont été, en tout cas en cas de dévolution en ligne directe, réduits à des taux effectifs, qui sont soit proches de zéro (dans plusieurs régions d’Espagne), soit perçus à des taux qui n’excèdent pas 5 %, voire 10 % (avec un maximum de 6,6 % en Bulgarie, de 10 % en Lituanie, et même de 15 % au Danemark, pays connu pourtant pour sa pression fiscale considérable). Seules la France et le Royaume-Uni ont des niveaux comparables, voire même parfois un peu supérieurs à la Belgique dans ce domaine.

Sur cette composante importante de la fiscalité du patrimoine, la Belgique est donc très loin de l’image de paradis fiscal des riches que certains lui attribuent. Elle est même tout le contraire, surtout si l’on se rend compte que les taux donnés en exemple ci-dessus ne concernent que les successions en ligne directe, et que ce même impôt atteint 50 % entre frères et soeurs, voire 70 à 80 % entre autres personnes.

Si l’on entend un jour revoir la fiscalité du capital et de l’épargne, il faudrait sans doute accepter d’en reconsidérer tous les aspects, qu’il s’agisse d’impôts fédéraux ou régionaux, d’impôts perçus annuellement ou de taxes dues, comme les droits de succession, une seule fois par génération. Ce sera d’ailleurs aussi, à ce moment, l’occasion de reparler des droits d’enregistrement sur les ventes immobilières, pour lesquelles les taux dus en Belgique (10 % en Flandre, 12,5 % ailleurs) atteignent aussi des records européens.

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