Presque tous les voyants sont au vert pour l’immobilier belge

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L’immobilier résidentiel belge maintient la forme. Il faut dire qu’il bénéficie d’un contexte particulièrement favorable. Et cela ne devrait pas (trop) changer dans les prochains mois. La seule incertitude est bruxelloise.

Le marché immobilier belge peut-il être encore plus intéressant qu’aujourd’hui ? Depuis plus de deux ans, les analystes et experts en tous genres poussent les investisseurs et autres candidats-acquéreurs à investir dans la brique. Estimant que des lendemains plus sombres se rapprochent.

Ils ont eu tort. Le marché immobilier est plus avantageux aujourd’hui qu’hier. Et il le sera encore davantage demain. Jusqu’à quand ? Personne ne le sait précisément. Le contexte restera toutefois encore favorable au moins jusque fin 2017. Sauf contretemps majeur.

Une chose est sûre, la plupart des voyants sont au vert sur le front de l’immobilier belge. Qu’il s’agisse des taux hypothécaires qui affichent des niveaux historiquement bas, des prix qui ont enrayé leur hausse constante de ces 10 dernières années, de la fiscalité qui reste attrayante malgré les réformes régionales ou encore des dizaines de milliards d’euros qui dorment sur les comptes d’épargne. Et, d’après les premières prévisions, aucun paramètre ne semble pouvoir faire valser le marché dans les prochains mois.

“Au début des années 2000, le marché était plus accessible qu’aujourd’hui, se souvient l’économiste d’ING Julien Manceaux. Mais depuis la crise 2008, il n’a jamais été aussi intéressant.”

Un constat qui se reflète sur le terrain. Depuis le début de l’année, le nombre de transactions immobilières a explosé, selon les chiffres des notaires belges dévoilés en juillet. Leur indice d’activité n’a d’ailleurs jamais été aussi élevé que lors du second trimestre de l’année 2016. Un signe évident de vitalité. Il est aujourd’hui de 127,9 alors qu’il était par exemple de 111,8 au même trimestre en 2015, de 105,3 en 2014, de 99 en 2010 ou encore de 87 en 2009. Bref, les agents immobiliers se frottent les mains et les notaires font tourner le stylo à plein régime. “La situation devrait encore perdurer jusqu’à la fin de l’année, poursuit Julien Manceaux. On se dirige vers une hausse du nombre de transactions. Surtout à Bruxelles, où les emprunteurs peuvent encore bénéficier d’un avantage fiscal important jusqu’au 31 décembre. La tendance sera par contre inverse en Wallonie où le nouveau ‘chèque habitat’ diminue l’avantage perçu par les nouveaux emprunteurs au moins autant qu’en Flandre.” Reste qu’il faut préciser que cette embellie est essentiellement due aux investisseurs plutôt qu’aux particuliers. “Car pour ces derniers, les voyants sont un peu moins au vert puisqu’ils ne peuvent plus emprunter à 120 % et que leur accessibilité au marché s’en voit donc réduite”, précise le consultant en immobilier Christian Lasserre. Et le notaire ostendais Bart Van Ostal, porte-parole de la Fédération royale du notariat belge, d’ajouter : “Les Belges recherchent avant tout sécurité et rendement. Sécurité car l’immobilier représente un point d’appui dans une société en évolution rapide. Et du rendement pour assurer ses arrières, qu’il s’agisse de retour sur investissement ou d’un revenu complémentaire à leurs ressources familiales ou leur pension. Les livrets d’épargne, les bons de caisse et autres rapportent très peu, alors que l’immobilier permet encore souvent un rendement satisfaisant.”

Un resserrement des crédits

La baisse constante des taux hypothécaires a en tout cas permis au marché d’encaisser plus aisément que prévu les réformes fiscales en Flandre (2015) et en Wallonie (2015 et 2016). Les taux bas permettant d’augmenter la capacité d’emprunt, de diminuer les mensualités et de faire grimper les prix. De quoi donner de nouvelles perspectives aux candidats acquéreurs. Le taux moyen est ainsi passé de 3,3 % en 2014 à 2,5 % en 2015 et 2,05 % en août 2016. En deux ans, il est donc possible de payer pratiquement 30.000 euros de moins pour un prêt de 150.000 euros sur 20 ans. “On remarque toutefois qu’avec la baisse des taux, les emprunteurs empruntent moins”, note Christian Lasserre.

Cette hausse du nombre de prêts hypothécaires n’a toutefois pas fait sourire tout le monde. La Banque nationale de Belgique (BNB) a profité de ce relatif déséquilibre sur l’échelle du risque pour estimer que le marché immobilier belge était dorénavant surévalué de 8 %. Un constat qui ne signifie pas que les prix sont 8 % trop élevés mais qu’une tendance à la baisse est attendue en matière de crédit hypothécaire. Cela devrait s’accompagner dans les prochains mois d’un resserrement des conditions d’octroi de crédit. Faudra-t-il donc déposer davantage que les 20 % de fonds propres pour obtenir un prêt ? Il faudra avant tout rectifier le tir. Car étonnamment, selon la Banque nationale, un nouveau prêt hypothécaire sur trois avait encore en 2015 un apport personnel de moins de 10 %. Et rien n’a vraiment changé ces derniers mois.

Cela pourrait toutefois être le cas à l’avenir chez BNP Paribas Fortis : la banque a envoyé début août une note interne à son personnel exigeant un resserrement des conditions d’octroi de crédit. Plus aucun nouveau client ne pourra dorénavant obtenir un prêt hypothécaire sans un apport de fonds propres de près de 30 %. L’idée étant de diminuer les risques mais surtout, commercialement, de fermer le robinet des prêts trop bon marché.

Une hausse des prix de 1 à 2 % en 2016

Enfin, qu’attendre des prix de l’immobilier dans les prochains mois ? La stabilité devrait être de mise. ING table sur une hausse de 1 %. Trevi légèrement davantage. Précisons toutefois qu’il est déjà difficile de se prononcer sur l’évolution des prix en 2015 vu que plus aucune statistique officielle n’a été publiée par le SPF Economie depuis 2014. Se pencher sur le dernier quadrimestre 2016 est donc hasardeux. On peut juste signaler que, selon une étude d’ING, les prix auraient dû augmenter de 8 % en 2015 mais que les différents chocs fiscaux ont atténué cette hausse. Elle ne serait comprise qu’entre 2 et 4,5 %. La hausse devrait être plus timide cette année. “Il faut être bien conscient que cette hausse des prix est liée à des taux exceptionnellement bas, ce qui a permis d’absorber les chocs fiscaux, note Julien Manceaux. Dès que les taux remonteront, ce qui n’est toutefois pas attendu en 2016 et 2017, l’impact sera beaucoup plus violent pour les ménages. Une croissance des prix de 1 % est attendue pour cette année avant un recul par après.” Enfin, signalons que si le contexte immobilier est actuellement favorable, il faudra aussi dorénavant accepter un retour sur investissement un peu moins rapide. ” Cette situation signifie que les perspectives de plus-value sont moins intéressantes pour un investisseur, lance Michael Zapatero du bureau de Crombrugghe & Partners. Car il devra garder un bien plus longtemps pour assurer un return intéressant.” Vu que les taux hypothécaires peuvent aujourd’hui descendre à 1,5 %, un bon achat est surtout destiné à celui qui ne compte pas revendre son bien dans les quatre ou cinq ans. Ce qui change nettement la donne !

Bruxelles : vers une fin d’année explosive ?

La fiscalité immobilière bruxelloise va connaître quelques bouleversements dès le 1er janvier 2017. Pour rappel, le bonus logement, l’avantage fiscal lié à un emprunt hypothécaire pour une habitation propre et unique, est supprimé. Il est remplacé par un abattement sur les droits d’enregistre-ment, qui grimpe de 60.000 à 175.000 euros. Il faut noter que cet avantage ne concerne que les achats inférieurs à 500.000 euros. Concrètement, pour un prêt de 20 ans, un couple peut donc actuellement économiser 55.560 euros grâce au bonus logement et à l’abattement fiscal. Dès le 1er janvier, toujours pour un prêt de 20 ans, l’économie ne sera plus que de 21.875 euros par le biais de la réduction des droits d’enregistrement (uniquement pour les maisons de moins de 500.000 euros).

Les Bruxellois doivent-ils pour autant se ruer chez leur notaire ? Pas si vite. Cela dépend des cas. Si vous ne devez conclure aucun emprunt, attendez 2017. Si vous souhaitez acheter un bien supérieur à 500.000 euros, dépêchez-vous. Pour les autres, il s’agit d’un choix stratégique. Un jeune couple peut par exemple privilégier une économie de 21.875 euros au moment de l’achat à un avantage fiscal plus intéressant mais étalé sur la durée. D’autres couples, qui ne sont pas bloqués par des droits d’enregistrement plus élevés et qui ont l’intention de garder leur emprunt le plus long-temps possible, auront davantage intérêt à se tourner vers le bonus logement. D’autant que le bénéfice sera double : l’abattement n’étant accordé que par logement acheté alors que le bonus logement est accordé par contribuable. “Il est probable que nous nous dirigeons vers un pic comme nous l’avons connu en Flandre fin 2014, estime Michael Zapatero, consultant auprès du bureau d’expertise de Crombrugghe & Partners. Ce qui signifie que l’on peut également déjà prévoir une baisse des transactions dans la capitale en 2017. Car tout s’équilibre, la croissance de 2016 étant artificiellement gonflée.” Un avis partagé par l’économiste Julien Manceaux. Mais pour les autres personnes interrogées, les points de vue sont plus contrastés. “Je ne pense pas que nous allons assister à une explosion des achats comme en Flandre, avec un afflux de ventes, estime l’administrateur délégué de Trevi, Eric Verlinden. Les flux vont s’équilibrer entre ceux qui vont attendre 2017 et ceux qui vont se presser d’acheter avant la fin de l’année. Cette réforme va surtout donner un coup de fouet pour les biens de 200 000 euros puisque les droits d’enregistrement se résumeront à peanuts.” Un avis partagé par le notaire bruxellois Gaëtan Bleeckx :

“Je ne m’attends vraiment pas à un pic des transactions d’ici la fin de l’année. Il y aura même un certain ralentissement. Je prévois plutôt de ne pas partir en vacances début janvier ! Pour de nombreux jeunes, une réduction immédiate des droits d’enregistrement de 21.875 euros est bien plus intéressante. Sur un bien de 250.000 euros, il n’y a pas photo. D’autant que nous ne savons pas comment évoluera le bonus logement à l’avenir, il pourrait être supprimé. Rappelons que cette mesure ne concerne pas les investisseurs mais ceux qui visent une habitation propre.”

Vers une sur-offre du marché locatif ?

Vu le contexte favorable, les investisseurs fleurissent bien évidemment sur le marché immobilier. Le groupe Trevi estime même qu’ils s’accaparent 40 % des transactions réalisées sur le marché du neuf. Une chose est sûre néanmoins : le nombre de locataires ne suit pas la même courbe ascendante. Quelques retours de bâton pourraient donc faire souffrir le portefeuille de l’un ou l’autre investisseur. “Est-ce que le réservoir de candidats locataires est suffisant pour absorber le parc locatif, se demande Eric Verlinden, le patron du Groupe Trevi. J’ai des doutes là-dessus. Même si de récentes statistiques nous dévoilent la décroissance du nombre de propriétaires occupants à Bruxelles. Le taux de propriétaires serait passé de 60 à 43 % en huit ans. Soit les Bruxellois ont moins accès à la propriété, soit le marché locatif a une belle croissance devant lui. En tout cas, vu le marché hyper concurrentiel, je n’encourage pas les investisseurs à se conforter dans un type de bien classique.” Un son de cloche qui est largement partagé par le consultant en immobilier Christian Lasserre.

“Le défi actuel pour les investisseurs est de trouver les bons produits et des locataires fiables. L’offre ne correspond souvent pas à la demande. Les appartements ont souvent trois ou quatre chambres alors que le marché penche davantage vers les appartements d’une ou deux chambres. C’est un élément clé à surveiller.”

Par Xavier Attout

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