Cosmétiques : une mise au vert s’impose

© Getty Images/iStockphoto
/ /

Entre les belles paroles des marques, les dangers potentiels des ingrédients et la situation réelle sur le terrain (ou plutôt sur la peau), choisir un savon ou un déodorant est devenu un véritable casse-tête. Dans la jungle des cosmétiques, le consommateur est perdu et lassé. Un tour d’horizon s’impose.

À moins d’habiter dans une grotte, vous n’avez pas pu échapper à la vague verte qui a déferlé sur les cosmétiques. “On distingue deux débats. Le premier concerne la santé et dénonce les produits contenant des ingrédients potentiellement nocifs, voire des perturbateurs endocriniens susceptibles de dérégler le système hormonal. Le second est lié à l’environnement et rejette les composants polluants comme les matières synthétiques et les huiles minérales dérivées de la pétrochimie. Par ailleurs, il privilégie les cosmétiques solides souvent sans emballage qui présentent en plus l’avantage d’être économique et pratique à transporter. Au consommateur de se positionner”, estime Estelle Lebeau, la seule esthéticienne partenaire de la Slow Cosmétique en Belgique, diplômée du CEDEB (Centre Européen de l’Esthétique de Belgique) à Bruxelles et installée à Welkenraedt dans la province de Liège.

Less is more. Dans son salon de beauté (ou plutôt de bien-être), Estelle Lebeau s'oppose aux diktats des cosmétiques conventionnels.
Less is more. Dans son salon de beauté (ou plutôt de bien-être), Estelle Lebeau s’oppose aux diktats des cosmétiques conventionnels.© Estelle Lebeau

Le déni est un vilain défaut

Chaque consommateur reste maître de ses choix. Et selon son type de peau, tout ingrédient – synthétique ou naturel – peut s’avérer efficace ou irritant. Il est donc impossible d’envisager tous les cas de figure. Cependant, le déni de faits avérés est un vilain défaut. Les emballages ne sont pas les seuls plastiques à s’inviter dans nos salles de bains. Ajoutés aux cosmétiques conventionnels pour leur effet velouté, les polymères synthétiques et autres silicones (qui se terminent en -one et -xane notamment) se déversent dans nos égouts lors du rinçage d’un shampoing par exemple et contaminent nos cours d’eau (faune et flore confondues). La suite, on la connaît. Après avoir glissé sur notre peau, ces plastiques peuvent contaminer le poisson qui atterrit dans notre assiette, partant dans notre organisme.

L’habit ne fait pas le moine

Mais ce n’est pas parce qu’on essaie de nous faire avaler n’importe quoi (au propre comme au figuré) qu’il faut tomber dans le panneau du greenwashing. Cette pratique commerciale est plébiscitée par certaines marques qui usent et abusent de visuels trompeurs, slogans mensongers et termes approximatifs pour redorer (comprenez : verdir) leur image. Ainsi, les packagings d’inspiration végétale ou les produits “sans parabène” dupent le consommateur qui ignore que ces mêmes parabènes accusés d’être cancérigènes peuvent être remplacés par du methylisothiazolinone, un conservateur réputé irritant. Quant aux cosmétiques naturels aux composants issus de la nature (par opposition aux ingrédients chimiques créés en laboratoire), leur appellation est galvaudée puisqu’un produit qui contient 90% de chimie et 10% de naturel peut être qualifié de naturel.

Alors comment démêler le vrai du faux ? La liste INCI (International Nomenclature Cosmetic Ingredients ou nomenclature internationale des ingrédients cosmétiques) répertorie obligatoirement les ingrédients d’un produit sur son emballage. Si décrypter la composition de son gel douche peut sembler fastidieux, il suffit de se concentrer sur les 5 ou 6 premiers ingrédients de la liste car ils constituent plus de 70% de la composition du produit, ainsi que sur les 2 ou 3 derniers qui sont les agents conservateurs peu présents dans la formule, certes, mais souvent à l’origine des irritations ou des allergies. Pour vous aider, le site laveritesurlescosmetiques.com note sur une échelle de “très bien” à “déconseillé” un composant spécifique ou le profil complet d’un produit.

Les certifications

À défaut de courage, de temps ou de loupe (pour déchiffrer ces noms barbares en latin ou en anglais imprimés en petits caractères), un cosmétique portant un label bio comme Écocert ou Cosmébio est de bon augure pour la santé et l’environnement. Pour obtenir cette certification, le produit doit respecter un cahier des charges rigoureux en termes de formulation et d’empreinte écologique. Il doit à la fois renfermer des ingrédients d’origine naturelle et bio, et être exempt de substances chimiques et synthétiques.

Au rayon des certifications, la mention Slow Cosmétique va un pas plus loin. Petite soeur de la Slow Food (qui s’oppose à la restauration rapide), elle se veut à la fois saine, écologique, intelligente et raisonnable. Elle est formulée et pratiquée dans le respect de l’humain et de l’environnement, répond aux besoins réels de la peau, ne fait pas de fausses promesses et s’achète au prix juste.

L’exception qui confirme la règle

Bobone, un nom qui rappelle que la cosmétique est avant tout une affaire d'authenticité.
Bobone, un nom qui rappelle que la cosmétique est avant tout une affaire d’authenticité. © Bobone

Les certifications officielles sont coûteuses pour les petits fabricants engagés dans une démarche de qualité, sans parler de la pléthore de labels et de critères qui brouille les pistes. Créée en août 2016, la marque Bobone porte un nom qui rappelle que la cosmétique est avant tout une affaire d’authenticité. Intimement convaincue de la nocivité des produits conventionnels, la fondatrice Charlotte Renard ne voit néanmoins pas vraiment l’intérêt d’être labellisée : “Je n’ai pas la prétention de vouloir sauver la planète ou donner des leçons, mais je sais que ce que je fais, je le fais bien. La gamme est 100% naturelle, les formules sont contrôlées par un laboratoire et les produits fabriqués de manière artisanale en Belgique. À chacun de trouver sa voie et d’acheter ce qui lui convient. Mais il n’y a pas photo entre un légume du supermarché et un légume du potager. Le même principe s’applique aux cosmétiques.” Et comme les meilleurs restaurants, Bobone propose une carte courte à base de produits frais.

La fusion des deux mondes

Labelchic est un curateur de produits de beauté et de génies de la formulation.
Labelchic est un curateur de produits de beauté et de génies de la formulation.© Lydie Nesvadba

On a tendance à présenter les cosmétiques naturels, biologiques et écologiques comme des produits “sans” (sans parabène, sans conservateur). Or, ils offrent un véritable “plus”, selon Océane Taquoi qui a ouvert fin 2017 Labelchic, une agence de consultance dans l’industrie de la beauté et une boutique de cosmétiques de niche rue Antoine Dansaert à Bruxelles. Loin des herboristeries de hippies qui sentent le patchouli, Labelchic n’a rien à envier aux parfumeries de luxe. “Labelchic est un curateur de produits de beauté et de génies de la formulation. Chaque référence en magasin doit satisfaire à trois critères : être 100% naturel et/ou bio, offrir une efficacité irréprochable, et inviter au plaisir des sens à coups d’esthétisme et de sensorialité”, explique Océane Taquoi. Ici le client n’est/n’a pas un numéro. Pour se démarquer des grandes chaînes, Labelchic prend le temps de l’accueillir, de lui raconter l’histoire des produits et de lui prodiguer des conseils personnalisés. Parce que la beauté, c’est aussi une question de confiance et de bien-être.

Mieux vaut prévenir que guérir

Pris individuellement, les cosmétiques conventionnels mis en vente sur le marché ne sont pas toxiques, mais ils ont un dénominateur commun : ils contiennent au moins un ingrédient polémique. Ce composant n’aura pas à lui seul la peau de l’humain et de la planète, mais le cocktail – l’utilisation croisée et assidue d’une crème, d’un déodorant et d’un gel douche par exemple – pose un véritable problème sanitaire et environnemental. Alors soyez vigilant. Lisez les étiquettes et faites-vous conseiller ou dorloter par des spécialistes. Parce que vous le valez bien.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content