Bruno Colmant

Il faut réenchanter l’enseignement secondaire

Bruno Colmant Economiste. Professeur à la Vlerick School, l’ULB et l'UCL.

C’est Alain Peyrefitte (1925-1999), ministre de l’Enseignement de Charles de Gaulle, qui avait souligné que le miracle de l’inventivité et du progrès humain trouve un terrain fertile lorsque l’innovation est un facteur d’enrichissement individuel et collectif.

Alain Peyrefitte parlait de la nécessité d’un « éthos (c’est-à-dire un caractère, une typologie) de confiance compétitive. Pour stimuler l’envie du futur et déployer la « confiance dans la confiance », il faut un contexte de stabilité institutionnelle qui stimule l’entrepreneuriat individuel. La réussite doit être reconnue et l’échec dépassé. Il faut que les pouvoirs publics suscitent un appétit d’entreprendre dans le cadre d’une méritocratie solidaire.

Dans le domaine de l’enseignement, tant d’études furent commises pour moisir dans des composts administratifs ou être étudiées par des cénacles dont les débouchés sont obscurs. J’ai, à cet égard, et fort de mon expérience d’enseignant depuis trois décennies, quelques convictions, à commencer par le fait que la réglementation outrancière de l’enseignement le rend stérile.

La réjuvénation de l’enseignement exigera une génération. L’essentiel est d’assurer une qualification professionnelle. Il fait insuffler une envie d’avenir et d’effort personnel à chaque élève, dès l’âge de douze ans. C’est là que le suivi scolaire individualisé doit se concentrer afin d’éviter que le désir d’enseignement ne devienne une homothétie des stratifications sociales. Il faut rechercher l’excellence dans le respect des aptitudes de chacun. Il faut, par exemple, un véritable enseignement scientifique, mais aussi technique et professionnel, selon le modèle allemand qui intègre, par un système de patronage, certains étudiants dans la vie professionnelle. Il s’agit donc d’abaisser les barrières mentales et de promouvoir des contrats d’apprentissage.

Il faut, bien sûr, convaincre de la nécessité absolue d’une formation continue. Qui peut prétendre, sauf à avoir des dons peu communs, couvrir une carrière de 45 ans avec des connaissances acquises en début de vie professionnelle et dont la pérennité s’étiole rapidement dans une économie numérisée ?

Une formation de base n’est plus suffisante dans les bouleversements économiques que nous traversons. S’il importe de revaloriser les salaires les plus faibles et qui sont, en termes relatifs, plus lourdement éreintés par la poussée d’inflation depuis l’année 2022, il faut donc aussi accélérer la formation des travailleurs et des chômeurs, afin de démultiplier leurs optionalités en matière d’emploi. C’est d’ailleurs une priorité absolue pour augmenter le taux d’emploi. L’État doit jouer un rôle de conscientisation et de promotion essentiel, car l’adaptation des connaissances ne ressortit pas exclusivement aux missions de l’entreprise, à tout le moins à long terme. D’un point de vue de l’organisation politique, il m’est évident que le recyclage des travailleurs est une responsabilité commune des entreprises privées et de l’État.

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