“Si nous ne prenons pas des mesures radicales, le patient en fera littéralement les frais”

Luc Van Gorp © Belga

Dans son baromètre hospitalier, la mutualité chrétienne (MC) s’est penchée pour la quatorzième fois sur les tarifs appliqués par les hôpitaux belges. Comme le montrent les dernières données, ceux-ci continuent de chercher des revenus supplémentaires. “C’est la raison pour laquelle les suppléments pratiqués en chambre individuelle doivent être supprimés”, affirme Luc Van Gorp, président de la MC.

Dans son baromètre hospitalier, la mutualité chrétienne (MC) a examiné pour la quatorzième fois les tarifs appliqués par les hôpitaux belges. Pour ce faire, la MC utilise les factures de ses affiliés dans ces hôpitaux. L’organisation a ainsi plaidé ces dernières années pour la suppression des suppléments d’honoraires en chambre commune. Les données récentes montrent que les hôpitaux continuent de chercher des revenus supplémentaires. “C’est la raison pour laquelle les suppléments pratiqués en chambre individuelle doivent être supprimés”, affirme Luc Van Gorp, président de la MC.

Selon le baromètre hospitalier de la MC, le patient paie toujours plus de suppléments. Comment est-ce possible ?

LUC VAN GORP : Nous observons un lien clair entre la rémunération des médecins et le financement des hôpitaux. Les hôpitaux rencontrent des difficultés pour maintenir leur situation financière hors du rouge et remédient à ce problème au moyen de retenues et de surfacturation d’honoraires des médecins.

Ils font preuve de créativité en appliquant des suppléments sur la facture du patient en dehors des postes médicaux. Les suppléments d’honoraires en chambre commune sont interdits, mais on voit fleurir des forfaits et autres suppléments liés au confort pour l’utilisation du téléphone, du wi-fi, de la télévision ou encore du frigo. Souvent à l’insu du patient. Nous constatons également que certaines interventions qui peuvent être pratiquées en hospitalisation de jour sont planifiées avec une nuitée.

Vous plaidez dès lors en faveur de l’interdiction pure et simple des suppléments d’honoraires.

LVG : En effet. Force est de constater que l’année dernière, près de vingt hôpitaux ont augmenté le pourcentage des suppléments d’honoraires, alors que nous avions convenu dans le médico-mut de ne pas le faire même si cet accord n’était pas ancré juridiquement. Nous nous dirigeons vers une situation dans laquelle les patients ne seront plus en mesure de payer leurs factures. Un système de soins de santé à deux vitesses pointe à l’horizon.

Le problème risque de se poser également pour les patients qui bénéficient d’un remboursement de leur assurance hospitalisation. Nous remarquons par exemple que la compagnie d’assurances DKV n’accepte plus depuis cette année de rembourser les augmentations de suppléments. En réalité, nous vivons un scénario catch 22 : l’hôpital risque de rencontrer de réelles difficultés, les médecins doivent délier les cordons de la bourse et les compagnies d’assurances voient les remboursements augmenter en permanence. Nous nous trouvons sur un terrain glissant. Si nous ne prenons pas des mesures radicales, le patient en fera littéralement les frais.

Les assurances hospitalisation ont vu le jour dans le secteur privé, mais elles ont finalement entraîné une surenchère des suppléments. Nous ne pensons pas que les assurances hospitalisation telles qu’elles existent aujourd’hui peuvent continuer à tout couvrir. L’argent ne pousse pas sur les arbres. Selon nos estimations, les Belges versent au total des primes d’assurances hospitalisation à hauteur de 1,7 milliard d’euros. Si les suppléments en chambre individuelle disparaissent, ces primes deviendront superflues et cette somme pourra être mieux investie dans l’assurance maladie obligatoire. Les soins de santé sont largement financés par des fonds publics, mais on ignore actuellement si les suppléments facturés tombent dans la poche du médecin ou de l’hôpital. Nous réclamons plus de transparence, qui serait associée à un nouveau modèle de soins de santé mettant davantage l’accent sur la prévention. Nous devons mener ce débat tant qu’il est encore temps.

En réalité, vous voulez réduire les salaires des médecins. En vertu de quoi ceux-ci y consentiraient-ils ?

LVG : Nous représentons 4,5 millions d’affiliés et défendons la perspective du patient. En qualité de co-administrateur, nous devons pouvoir nous demander à quoi nous dépensons notre argent en tant que société. Par ailleurs, nous remarquons que la discussion sur le remboursement des honoraires des médecins fait rage. Même si elle tourne d’abord autour de la rémunération en fonction des spécialités médicales, j’ai l’impression que les médecins préfèreraient débattre d’un modèle de financement équitable plutôt que de se retrouver en fin de compte à devoir traiter des patients incapables de régler leurs factures.

Traduction : virginie·dupont·sprl

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