Le palace Negresco fait peau neuve

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Le dernier palace indépendant de la Côte d’Azur a hébergé les têtes couronnées les plus huppées des cinq continents, les plus grandes stars du siècle dernier. Il a servi de décor à une cinquantaine de films, dont certains mythiques. Il vient de faire peau neuve et rouvre officiellement ses portes ce 8 juillet.

Ce 8 juillet, la saga du Negresco, membre de The Leading Hotels of the World et dernier palace indépendant de la Côte d’Azur, prend un nouveau tournant. Il rouvre en effet ses portes après six mois de travaux en profondeur et une solide cure de jouvence, notamment motivée par l’obtention d’une cinquième étoile retrouvée en août 2009.

Du hall d’accueil au salon Royal, tout a été entièrement refait, et notamment la verrière Eiffel, quasi centenaire, classée monument historique. La Rotonde devient au passage une brasserie haut de gamme ouverte à la clientèle extérieure, avec vue sur la baie des Anges. Une trentaine de chambres et salles de bain ont également été rénovées.

Au cinquième étage, rebaptisé Executive Floor, l’électronique de pointe est venue animer la patine du palace. Entièrement domotisées, les neufs suites et six chambres y obéissent à leurs hôtes littéralement “au doigt et à l’oeil”. L’étage est entièrement privatif, avec accès par ascenseur dédié, équipé d’un espace lounge et d’un bar.

Un lifting à 10 millions d’euros

C’est Pierre-Antoine Gatier, architecte en chef des Bâtiments de France, qui a piloté les travaux pour la maîtresse de l’ouvrage et propriétaire, Jeanne Augier. Cette vaste campagne de travaux ne pouvait oublier la façade, rénovée durant 18 mois. Le montant total de la facture de rénovation dépasse les 10 millions d’euros.

Le palace le plus connu de Nice doit son nom à Henry Negrescu, immigré roumain de génie, naturalisé Negresco au début du 20e siècle. C’est le 8 janvier 1913 qu’il ouvre ses portes, après un long chantier qui aura notamment vu l’architecte Gustave Eiffel dessiner et surveiller la construction de l’armature d’une des plus belles verrières d’Europe, aujourd’hui la fierté du salon Royal de ce palace.

Depuis près d’un siècle, le blanc de sa façade et son dôme rose veillent sur la baie des Anges. Il lui a suffi d’un an, juste avant que ne passe le souffle de la Grande Guerre, pour gagner son surnom de “plus somptueux des palaces” au terme d’une première saison lui assurant d’emblée un succès colossal et quelque 800.000 francs or de bénéfice. Un bénéfice assuré par une clientèle d’emblée internationale et aisée, mêlant souverains de l’Ancien et du Nouveau Mondes : Vanderbilt et autres Singer, la reine Amélie de Portugal, le comte de Paris et les Grands-Ducs Wladimir et Dimitri ont été parmi les premiers ambassadeurs des lieux.

A la sortie de la Première Guerre mondiale, qui laisse son concepteur ruiné, il est momentanément racheté par une société belge et entre en longue léthargie. Il sombre peu à peu dans l’oubli même s’il reste une adresse de choix pour hivernants élégants. Ce n’est qu’en 1957 qu’il est racheté par Monsieur Mesnage, père de Jeanne Augier, actuelle propriétaire et épouse de Paul Augier. Il renaît alors de ses cendres.

Pendant plus de 50 ans, Jeanne Augier maintiendra “sa” maison dans le pré carré des grands palaces du monde, non sans passer par des moments moins tranquilles, comme la récente condamnation pour “harcèlement raciste” confirmée en appel par le tribunal de Montpellier. Un de ses fers de lance, contre vents et marée, cultivée par la propriétaire des lieux mythiques durant plus d’un demi-siècle : héberger dans l’hôtel une collection unique d’oeuvres d’art françaises, enrichie depuis plus d’un demi-siècle par la propriétaire, qui y investit une bonne partie de ses rentrées, notamment en achat de mobilier historique digne des plus grands musées.

Autre fait saillant de ces derniers mois, relayé par des médias locaux et lancé par le quotidien Nice Matin voici un peu plus d’un an : Jeanne Augier aurait annoncé léguer son palace aux animaux via une fondation privée en charge de la lutte contre la misère animale et de l’aide aux nécessiteux. Moyen pour couper temporairement court aux velléités récurrentes des grands groupes internationaux, candidats au rachat du dernier palace indépendant de la Côte d’Azur, ou décision définitive mûrement réfléchie et une fois encore haute en couleurs ? Toute la promenade des Anglais en parle depuis un an…

Une bribe de réponse, dans la bouche de la principale intéressée, relayée par le quotidien local : “Michou – un loulou de Poméranie que maman n’avait offert à Noël quand j’étais petite – fut le seul ami de la fille unique que je fus. Aujourd’hui, je n’ai plus personne autour de moi. Et contrairement à bien des rupins, je sais qu’on n’emporte rien dans les deux mètres carrés qui nous servent à tous d’ultime demeure.” Les clients habituels du palace auront de quoi méditer ou commenter.

Trois chambres prisées avec vue

La Suite Montserrat Caballé (121-122) Située face à la Méditerranée, sur la Promenade, elle est ainsi baptisée en hommage à la cantatrice : celle-ci réserve cette suite à chacun de ses séjours à Nice. Composée d’un très grand salon et d’une chambre, décorés dans les styles Louis XV et Louis XVI, elle a également été prisée par le Président Jacques Chirac, Charles Aznavour, Phil Collins, Alain Delon, Gérard Depardieu, Michael Jackson, Mick Jagger, Elton John ou Gina Lollobrigida.

La Suite Impériale (415-416) Située au 4ème étage au dessus de l’entrée de l’hôtel, sa décoration de style Empire a été inspirée par la chambre de l’Impératrice Joséphine, au Château de la Malmaison. Les murs sont tendus de tissu à fond rouge ou jaune, ornés de motifs abeille tissés de fil d’or. Le mobilier Empire est authentique. Cette suite a été occupée par Paul McCartney lors du premier voyage des Beatles en Europe en 1967, Elisabeth Taylor et Richard Burton, Sophia Loren, Anthony Quinn, Frank Sinatra, Marlène Dietrich, Marcello Mastroianni, Yves Montant ou Mickey Rourke. Elle est également la suite favorite d’Helmut Newton, pour ses séances de photos.

La Suite Pompadour (512) Cet appartement comporte des pièces de mobilier rarissimes : la commode d’époque Louis XV authentique est digne de figurer dans un musée. Elle est totalement et finement marquetée de bois précieux sur ses trois faces. Le lit double “corbeille” d’époque, en noyer, est finement sculpté et doré à la feuille. Les autres meubles (bureau, table, deuxième commode, table de nuit, table chinoise) sont également en marqueterie.

Philippe Coulée

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