La taxe sur les résidences secondaires sera-t-elle maintenue à la côte belge ?

Immeubles sur la digue
© Belga
Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Une taxe injuste ? Plus injuste encore dans certaines communes telles que La Panne, Knokke-Heist ou Coxyde ? Certains contribuables ont décidé de ne pas se laisser faire et attendent avec impatience le verdict des tribunaux.

“Nous étions les derniers des Mohicans”, déclarait il y a quelques semaines Piet De Groote, le bourgmestre de Knokke-Heist, au quotidien flamand Het Nieuwsblad, après que la commune côtière ait décidé d’instaurer une taxe de séjour touristique en 2024. “Les personnes disposant d’une résidence secondaire paient près de 800 euros d’impôts chaque année, mais lorsque vous allez dans un hôtel à Knokke-Heist pour un mois, vous ne devez pas vous acquitter d’une taxe. En fait, ce n’était pas juste.”

Knokke-Heist tente ainsi de couper l’herbe sous le pied des propriétaires de résidences secondaires qui invoquaient l’inégalité de traitement entre les propriétaires privés et professionnels pour contester la taxe sur les résidences secondaires.

Knokke-Heist a décidé de s’aligner sur les autres communes de la côte et d’instaurer une taxe de séjour dès 2024.

A partir de l’année prochaine, à Knokke-Heist, les propriétaires de résidence secondaire qui louent leur logement à des touristes ne payeront donc plus que la seule taxe de séjour. « Parce que la double imposition n’est pas autorisée », poursuit Piet De Groote. Il s’agit du principe non bis in idem ou “pas deux fois pour la même chose”, qui s’applique tant aux taxes qu’aux amendes.

Double imposition

Un même gouvernement ne peut pas prélever un double impôt sur la même base, mais deux gouvernements différents peuvent le faire. Tant la province de Flandre-Occidentale que ses communes peuvent donc imposer les secondes résidences. La province a fixé le taux forfaitaire pour 2023 à 132 euros. De cette façon, elle garantit que les résidents et les non-résidents possédant des biens dans la province paient leur dû.

La taxe provinciale est bien moins onéreuse que la taxe communale. Outre la taxe sur les résidences secondaires, certaines communes en perçoivent également d’autres visant les touristes ou les résidences touristiques, telle une taxe environnementale.

Taxe sur les résidences secondaires
CommuneMontant pour 2023Nombre de secondes résidences
Blankenberge1.099 euros6.300
Bredene995 euros2.223
Bruges1.000 euros
Le Coq645 euros8.962
La Panne868 euros (1)8.084
Knokke-Heist790 euros20.849
Coxyde1.215 euros (2)15.000
Nieuport1.100 euros (3)10.300
Ostende1.123 euros (4)9.200

(1) 644 euros pour les studios de moins 45 m²

(2) 1.007 euros pour les studios allant jusqu’à 40 m²

(3) 1.015 euros les studios de moins de 40 m² et 700 euros pour les mobile homes

(4) Depuis 2022, le montant est indexé annuellement

Source: Tour d’horizon des communes via Transparencia

Par ailleurs, les revenus des résidents belges sont également imposés deux fois. Le fédéral prélève une partie de nos revenus par le biais de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et les communes en font de même. Le taux d’imposition additionnel communal est calculé en appliquant un pourcentage de l’impôt fédéral sur le revenu. Le taux moyen est de 7,18 %.

Pour les communes, les avantages sont nombreux. D’une part, la taxe est imputée à tous les résidents et collectée par le gouvernement fédéral. Les communes ne doivent céder qu’une petite partie de la taxe additionnelle au gouvernement fédéral. L’impôt sur le revenu intègre par ailleurs des ajustements sociaux, ce qui devrait garantir que les épaules les plus solides supportent la charge la plus lourde. La taxe sur les résidences secondaires, elle, est forfaitaire. Que vous possédiez un penthouse moderne valant plusieurs millions d’euros ou un petit appartement délabré, vous payerez un montant fixe.

L’absence de la taxe communale additionnelle à l’IPP est peut-être l’argument le plus important utilisé par les contribuables pour contester la taxe sur les résidences secondaires.

Avec les centimes additionnels du précompte immobilier, la taxe additionnelle à l’IPP représente en moyenne 40 % des recettes communales. A l’exception de trois communes – La Panne, Knokke-Heist et Coxyde -, toutes les communes flamandes perçoivent un impôt additionnels sur le revenu des personnes physiques.

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L’absence de cet impôt additionnel est peut-être l’argument le plus important utilisé par les contribuables pour contester la taxe sur les résidences secondaires. La commune de Middelkerke avait prévu de ramener la taxe additionnelle à l’IPP à zéro à l’horizon 2024, et cela en plusieurs phases. Parallèlement, elle avait augmenté sa taxe sur les résidences secondaires de 600 à 800 euros en 2020 (700 euros pour les studios de moins de 40 m2). Il s’agissait là d’un transfert clair de la charge fiscale des résidents vers les non-résidents. Finalement, fin 2021, la commune a décidé de geler l’impôt additionnel à 3 %, au lieu de le réduire davantage à 0 %.

Additionnel à l’IPP
La Panne0,0%
Knokke-Heist0,0%
Coxyde0,0%
Middelkerke3,0%
Le Coq5,0%
Nieuport5,0%

Source: Vlaamse Vereniging van Steden en Gemeenten (VVSG)

Principe d’égalité

Certains contribuables s’estimant lésés ont donc décidé d’introduire des actions en justice. Les avocats Frank Vandevoorde et Cédric Marcus du cabinet Meritius attaquent en justice La Panne, Coxyde et Knokke-Heist. « Il n’est pas juste que les seconds résidents doivent payer pour des services auxquels les résidents de ces municipalités ne contribuent pas”, estiment-ils. Selon eux, il s’agit d’une violation du principe d’égalité.

Précédemment, dans le cadre de l’ancienne réglementation fiscale, les communes de Coxyde et La Panne ont été condamnées par la cour d’appel de Gand pour discrimination.

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Les nouvelles affaires portées en justice concernent cette fois le règlement fiscal s’appliquant à la période 2020-2025 qui avance un nouvel argument et une nouvelle justification de la taxe portant sur les secondes résidences. “Les situations inégales peuvent être traitées de manière inégale”, explique Frank Vandevoorde. “Si les municipalités peuvent donner une justification raisonnable à cette inégalité de traitement, alors elles sont autorisées à taxer les gens de manière inégale et les municipalités ont donc essayé de trouver une justification.” Coxyde a par exemple introduit une taxe communale générale en 2020, de 177 euros pour une famille et 157 euros pour une personne seule, et a supprimé la taxe environnementale.

Un autre argument met en avant le taux forfaitaire appliqué à toutes les résidences secondaires. “Tout le monde doit payer le même forfait. Aucune distinction n’est faite entre un enfant qui a hérité d’un appartement délabré de ses parents et une personne qui a acheté une grande villa avec piscine”, note Frank Vandevoorde. Il y a donc quelques autres arguments qui rendent la taxe injuste.

Une lettre type pour faire opposition est disponible sur le site de Test-Achats

Selon l’association de défense des consommateurs, quelque 500 personnes tentent de récupérer leurs impôts payés sur les résidences secondaires par son intermédiaire. Mais “personne n’a encore récupéré effectivement cette taxe”, admet la porte-parole Laura Clays. Test-Achats a déposé un certain nombre de dossiers pilotes devant les tribunaux.

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