Faut-il changer sa chaudière par une pompe à chaleur ? La réponse d’un expert en énergie

De plus en plus de particuliers se tournent vers l’installation d’une pompe à chaleur (PAC) dans leur habitation. Un tel investissement est-il intéressant ? Explications avec un expert en énergie.

En Flandre, 2026 sonnera le glas des raccordements au gaz naturel des nouveaux bâtiments résidentiels. La fin des chaudières à mazout est annoncée pour 2035 en Wallonie pour les habitations existantes et l’est déjà en Flandre depuis l’année dernière pour les nouvelles constructions…. Dans ce contexte, de plus en plus de particuliers envisagent des alternatives pour se chauffer. Parmi celles-ci, l’installation d’une pompe à chaleur (PAC).

Nicolas Vandernoot est conseiller énergie chez Homegrade, le centre de conseil et d’accompagnement sur le logement en Région de Bruxelles-Capitale. Il explique à Trends Tendances les avantages mais aussi, les exigences d’une telle installation.

Il prévient d’emblée : « Si votre chaudière tombe en rade ce soir, il ne sera pas possible d’installer une pompe à chaleur demain dans votre maison classique. Il faudra se chauffer au gaz, ou éventuellement en Wallonie aux pellets ».

Qu’est-ce qu’une pompe à chaleur ?

Une pompe à chaleur ne produit pas de la chaleur. Une telle pompe « transporte » de l’énergie (kWh) d’une source gratuite (« la source froide ») vers l’endroit où on en a besoin, la « source chaude ». C’est donc l’inverse d’un frigo, d’un climatiseur. Son application est diverse: chauffage de locaux, de l’eau chaude sanitaire, d’une piscine… L’installation fonctionne à l’électricité ou parfois au gaz.

Adapté au résidentiel neuf

« Pour le résidentiel, la pompe à chaleur convient bien pour une habitation neuve ou lourdement rénovée, bien isolée, avec du chauffage par le sol, à minima dans les pièces de vie. L’installation est, par contre, très difficile à mettre en oeuvre dans un immeuble à appartements, car elle crée de l’encombrement et du bruit. Elle nécessite aussi l’autorisation de la copropriété. Les normes de bruit vont être encore plus strictes dans le futur « , explique l’expert.

On vend parfois la pompe à chaleur comme de l’énergie renouvelable, mais ce n’est pas le cas.

L’expert en énergie commente son fonctionnement : « S’il fait très froid dehors, une pompe à chaleur fonctionnera moins bien. A l’intérieur si la température de l’eau est très élevée, cela fonctionnera moins bien aussi. Une pompe à chaleur air-eau travaille idéalement avec une eau intérieure de 35 degrés. Au-delà, le rendement va baisser. Or, 35 degrés dans les radiateurs, cela n’est pas efficace. Il faut idéalement que la pompe à chaleur soit couplée à un chauffage par le sol ou du moins, des radiateurs qui travaillent à très basse température. Elle nécessite aussi une maison bien isolée qui n’a pas de besoin de chaleur trop important. La pompe à chaleur est donc adaptée dans une construction neuve, mais pas en rénovation classique. »

Quelle est la différence entre une pompe à chaleur air-air et air-eau ?

La pompe à chaleur air-air est une climatisation réversible. Elle peut être utilisée en hiver en chauffage d’appoint. Une pompe à chaleur air-eau réchauffe, pour sa part, l’eau du chauffage central à une basse température (idéalement à 35°C).

La plus grande différence entre ces deux types de pompe à chaleur se trouve dans la manière dont la chaleur est transmise à la maison. Avec une pompe air-air, cela se fait via un ventilateur dans la maison. Avec une pompe air-eau, la chaleur est diffusée via les éléments de chauffage central dans la maison. Un système air-air a comme avantage de pouvoir être utilisé en été comme climatisation, ceci ne peut pas être fait avec une pompe à chaleur air-eau.

Au niveau financier, l’expert attire l’attention sur un autre point. « Ce qui est important à tenir en compte, c’est qu’une pompe à chaleur fonctionne à l’électricité. L’électricité coûte 35 cents/kWh. Le gaz, même s’il a doublé en une année, reste à 12 cents/kWh. L’électricité coute donc 3 fois plus chère. Il faut, en toute logique, que l’installation d’une pompe à chaleur soit trois fois plus efficace qu’une chaudière à condensation pour que ce soit intéressant financièrement. »

Un meilleur rendement qu’un chauffage direct

Le rendement d’une pompe à chaleur sera toutefois meilleur que celui donné en direct par un chauffage électrique. A noter aussi : le placement d’une PAC influence favorablement la PEB d’un bâtiment. Nicolas Vandernoot nuance : « Il ne faut pas oublier non plus que cette électricité doit être produite, dans des centrales qui peuvent polluer. On vend parfois la pompe à chaleur comme de l’énergie renouvelable, mais ce n’est pas le cas. »

Faut-il changer sa chaudière par une pompe à chaleur ? La réponse d'un expert en énergie
© GETTY

Et si l’installation est couplée avec des panneaux solaires ?

A cette question, l’expert en énergie répond : « Le souci c’est que les besoins en chaleur sont surtout là en hiver quand les panneaux solaires sont le moins productifs. La présence de panneaux photovoltaïques ne doit pas influencer le choix de placer une PAC en Région de Bruxelles-Capitale. Il n’y a pas de lien entre les deux vu qu’il n’y a plus de compensation. On produit l’électricité essentiellement l’été, et les besoins de chaleur c’est essentiellement l’hiver. Ce n’est pas intéressant. En Wallonie, c’est différent. Il y a toujours la compensation avec le compteur qui « tourne à l’envers ». Tout ce qu’on produit l’été peut être valorisé l’hiver et cela peut être financièrement intéressant. Mais écologiquement, il vaut mieux utiliser l’électricité où cette source d’énergie est vraiment nécessaire comme faire tourner sa machine à laver,… au lieu de l’utiliser pour créer de la chaleur « , estime l’expert.

Ce dernier n’encourage pas l’installation d’une pompe à chaleur air-air qui fait avant tout office de climatiseur. « Pour les particuliers, une telle pompe à chaleur est peu intéressante sauf si le logement est très bien isolé. Elle n’est à envisager que si l’on veut à tout prix de l’air conditionné », estime-t-il.

« Pour les particuliers, une pompe à chaleur air-air est peu intéressante sauf si le logement est très bien isolé »

Quelle performance environnementale ?

Au niveau environnemental, l’émission de C02 d’une pompe à chaleur est de 0,09 à 0,182 kg/kWhth, à comparer à 0,264 kg/kWhth pour une chaudière gaz à condensation. Quant à la perte du fluide dit frigorigène lors d’une fuite éventuelle, elle est minime et à relativiser explique Nicolas Vandernoot. Ces fluides utilisés dans les pompes à chaleur ont un effet de serre très important, soit 675 fois plus important que le CO2.

« Quand il y a une fuite, il y a un risque de dégager un gaz à effet de serre puissant, mais les quantités restent minimes avec les pompes à chaleur. Les fabricants travaillent sur cet impact-là pour avoir un GWP (ndlr : l’équivalent C02 en effet de serre) encore plus faible« , commente l’expert en énergie.

Une solution pour un monde décarboné

En conclusion, la pompe à chaleur est une solution pour un monde décarboné même si elle requiert de consommer de l’électricité. Le système est difficilement applicable en rénovation simple ainsi que dans des immeubles à appartements existants. Installer une pompe à chaleur est intéressant pour des projets neufs, ou dans le cadre de rénovations très lourdes. C’est aussi une option si le raccordement au gaz n’est pas possible.

Quelles primes pour une pompe à chaleur ?

Au niveau budget, il faut compter 10 à 15.000 euros pour son installation (hors chauffage par le sol et sans les primes). A Bruxelles et en Wallonie, les primes sont exclusivement octroyées aux PAC qui distribuent de la chaleur via l’eau (air-eau), c’est-à-dire grâce à des radiateurs ou via un système de chauffage par le sol. Elles doivent donc être obligatoirement non réversibles (c’est-à-dire ne pas faire office de climatiseur en été). En Région de Bruxelles-Capitale et en Wallonie, le montant de la prime est fonction du revenu du ménage. Le montant oscille entre 4.250 et 4.750 euros à Bruxelles. La prime varie de 1.000 à 6.000 euros en Wallonie. En Flandre, la prime varie en fonction du type de PAC. Pour un modèle air-eau, un ménage qui habite en Flandre reçoit depuis le 1er juillet de cette année une prime de 3.000 euros. Pour un modèle sol-eau (pompe à chaleur géothermique qui transmet la chaleur du sol au foyer) la prime s’élève à 4.000 euros.

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