Trudo Dejonghe, économiste du sport (KU Leuven): “La mauvaise image du football fait fuir les sponsors”

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Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

Les entreprises hésitent de plus en plus à associer leur nom au football belge, pointe ce professeur de stratégie et innovation à la KU Leuven.

1. Belfius a annoncé son intention d’arrêter de sponsoriser le football. Cette décision vous suprend-elle?

C’est une tendance claire depuis plusieurs années: les institutions financières sponsorisent de moins en moins le football. Les faits qui ont conduit à l’opération “mains propres” (enquête sur des soupçons de fraude et de corruption, Ndlr) mais aussi le regain du hooliganisme l’an dernier ont donné une mauvaise image au football belge et certaines entreprises ne souhaitent plus y être associées.

2. Le football reste le sport n°1 en Belgique et Belfius sponsorise deux des clubs les plus populaires (Anderlecht et FC Bruges). Est-ce vraiment un problème d’image?

Après les faits de violence dans certains stades l’an dernier, il y a maintenant moins de spectateurs. Les familles hésitent à venir avec les enfants. Le football n’est plus “le” sport populaire qu’il a été.

C’est intéressant d’observer l’évolution du profil des entreprises qui investissent dans le football. Le football était “le” sport populaire par excellence et il était financé par les grandes brasseries ou les constructeurs automobiles. Quand il a évolué vers une sorte de sport de consommation, on a vu arriver les entreprises actives dans la téléphonie, internet ou les banques. Et aujourd’hui, ce n’est pas directement Belfius qui sponsorise le FC Bruges mais sa filiale de private banking (Candriam)…

3. On l’a vu ces derniers jours, il faut énormément d’argent pour transférer les bons joueurs. Le retrait de sponsors pourrait-il mettre en péril le football belge?

Oui et les nouveaux sponsors qui arrivent n’apportent pas toujours non plus une image à laquelle tout le monde a envie d’être associé. Je songe aux sociétés de paris sportifs et peut-être demain aux cryptomonnaies. A court terme, cela sauve peut-être les finances de certains clubs mais est-ce bon dans la durée? Redorer l’image du football belge, c’est le grand défi du nouveau président de la Pro League, Lorin Parys.

En attendant, la situation peut profiter à d’autres. Belfius dispose d’un budget de sponsoring et les moyens qui n’iront plus vers le football iront vers d’autres sports ou vers des actions culturelles. La banque a bien précisé qu’elle continuerait à financer l’équipe nationale de hockey. Cela pourrait, pourquoi pas, profiter au football féminin qui a, lui, une image très positive actuellement.

Trudo Dejonghe, économiste du sport (KU Leuven)
Trudo Dejonghe, économiste du sport (KU Leuven)© PG

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