Start-up: comment convaincre un investisseur en 6 minutes ?

© Getty Images/iStockphoto

Intimidés par l’enjeu mais toujours enthousiastes, de jeunes entrepreneurs choisissent de jouer leur avenir en quelques minutes dans des compétitions de start-up, comme cette semaine à San Francisco, pour convaincre des investisseurs que leur projet aura peut-être un destin à la Facebook.

Brian Chae est venu de Séoul pour tenter sa chance. Sur la grande scène d’un salon organisé par le magazine spécialisé TechCrunch, il fait face à un jury d’investisseurs. Dans la salle, des centaines de spectateurs, entrepreneurs comme lui, analystes, journalistes… et des milliers d’autres qui suivent le concours via une retransmission internet.

Il a six minutes pour les convaincre que sa technologie est révolutionnaire: sa startup Looxidlabs a mis au point un logiciel qui peut analyser les émotions, via les mouvements des yeux et les ondes cérébrales.

Adapté à un casque de réalité virtuelle, le système peut servir à des agents immobiliers ou à des hôteliers, par exemple, pour déterminer de façon quasi certaine ce que pensent réellement les consommateurs d’un aménagement, assure Brian Chae dans un anglais parfois hésitant. Passage obligé pour tous les participants: la démonstration en direct de leur invention.

Pendant six autres minutes, le jury assaille le jeune homme : “quel prix pour le casque ?”, “quel +business model+ ?”

“J’étais un peu nerveux à l’idée de faire cette présentation devant six VC” (“venture capitalists”, investisseurs en capital-risque), témoigne Brian Chae, qui avait répété sa présentation “une centaine de fois”.

– ‘Discours d’ascenseur’ –

Une vingtaine de jeunes pousses tentent ainsi de se faire connaître et de gagner la “Bataille des startups”, point d’orgue du salon. A la clé, 50.000 dollars et un gros coup de projecteur. Les jeunes pousses se financent souvent via leur entourage pour démarrer mais ont rapidement besoin de lever davantage de fonds. Elles doivent donc séduire coûte que coûte. Et vite.

L’exercice – sorte de speed-dating pour startup – a un surnom: “elevator pitch”, littéralement “discours d’ascenseur”, court et calibré pour convaincre rapidement une personne influente dont le temps est compté.

“Si vous ne savez pas présenter votre dossier et répondre aux questions les plus évidentes” le temps d’un voyage en ascenseur, “alors votre proposition ne tient pas la route”, explique Barry Broome, à la tête du Conseil économique de la région de Sacramento (140 km au nord-est de San Francisco), qui aide souvent des “startuppers” à mettre au point un “pitch” efficace.

Le potentiel des startups se mesure d’abord aux sommes levées, qui se comptent parfois en millions de dollars. Selon TechCrunch, 648 entreprises ont concouru depuis 10 ans et ont levé en tout près de 7 milliards de dollars.

DropBox, plateforme de stockage de données en ligne qui a gagné une compétition organisée par TechCrunch en 2012, revendique aujourd’hui 500 millions d’utilisateurs et près d’un milliard de dollars de chiffre d’affaires.

“Pour nous, il y a un gros enjeu” avec cette compétition, explique Claire Tomkins, venue présenter sa startup FutureFamily, qui aide à financer l’aide à la procréation pour les couples infertiles. Elle a lâché un beau poste il y a 18 mois pour monter sa boîte après avoir elle-même fait plusieurs fécondations in vitro, qui peuvent coûter jusqu’à 20.000 dollars aux Etats-Unis.

– ‘Tout ou rien’ –

“J’étais très nerveux avant de monter sur scène”, abonde John MacDonald, dont la startup Pi affirme avoir fabriqué le premier chargeur sans contact. Cette compétition est le moyen d’avoir “l’une des plus grandes audiences du secteur de la +tech+”, poursuit-il avec un enthousiasme communicatif.

Il serait ravi de gagner la compétition mais le simple fait de présenter son invention devant un tel auditoire “nous aide vraiment à lever des fonds”, dit-il encore.

Mais pour des milliers de projets, bien peu d’élus arriveront à mettre leur entreprise sur les rails et surtout, à la faire vivre au-delà de quelques mois ou quelques années.

“On est dans un environnement du +tout ou rien+”, explique Rik Reppe, du cabinet PwC, qui aide des startup à se lancer.

Et ils “se mettent eux-mêmes beaucoup de pression” sur les épaules, constate-t-il, tandis que les badauds se pressent dans les allées pour saluer Zach Woods, acteur de la série Silicon Valley, qui met en scène de jeunes ingénieurs lançant leur startup.

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