Ressources humaines: la gestion de conflits passée au crible

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Vincent Body et Fabrice Jamar abordent la gestion des conflits par le biais des connaissances explicites et implicites. Résultat: une boîte à outils qui dépasse le cadre professionnel auquel elle est d’abord destinée.

Là où évoluent des hommes existent également des conflits. L’entreprise n’échappe pas à la règle. C’est dans le cadre de celle-ci que Vincent Body et Fabrice Jamar analysent leur gestion au travers du livre Manager le conflit. Un jeu d’interactions. Ancien cadre de la fonction publique, Fabrice Jamar accompagne les entreprises privées et publiques en matière de gestion d’équipe, de communication et de plans stratégiques. Directeur d’un Centre d’information et de communication, Vincent Body exerce en parallèle une activité de formateur en management et communication ainsi que de coach. Pour l’écriture de cet ouvrage, ils se sont tous deux appuyés sur leur expérience de terrain et ont agrémenté les pages d’une foultitude d’exemples et cas concrets illustrant leurs analyses. Comme ils l’expliquent d’emblée, “le conflit est une interaction entre êtres humains ou groupes dont les opinions ou les sentiments diffèrent. Nous serons tous confrontés un jour au conflit, violent ou non, destructeur ou créateur”. Mais avant de plonger dans le vif du sujet, précisons d’abord de quoi nous parlons.

Un conflit est parfois une interaction indispensable à la bonne santé d’une relation ou au développement d’une organisation.

Différents types de conflits

Le conflit concerne des individus et non des organisations ou des procédures, même si ces dernières peuvent être des facteurs de cristallisation d’un conflit. Précisons que ce dernier ne doit pas nécessairement être perçu négativement. “En effet, un conflit peut être créateur et donc positif, confirment les auteurs. Il s’agit même parfois d’une interaction indispensable à la bonne santé d’une relation ou au développement d’une organisation. Il peut être un symptôme de la nécessité d’évoluer ou de changer pour réguler et assainir une relation ou un fonctionnement.” Ils pointent d’abord quatre formes d’environnement pouvant abriter un conflit: intrapersonnel (à l’intérieur de la personne), interpersonnel (entre minimum deux personnes), intragroupe (individus au sein d’un même groupe) et intergroupe (personnes de groupes différents). En intrapersonnel, ils distinguent deux stades: le cognitif et l’affectif. Le premier porte sur l’opposition d’opinions, les idées des protagonistes. Les conflits de ce type confrontent les facteurs rationnels de l’individu. Le second oppose des facteurs irrationnels comme les émotions et les sentiments des protagonistes. Enfin, ils répertorient six types de conflit: d’interprétation, de finalité, sur la méthode, de cadre, d’enjeux et de valeurs.

Selon eux, l’interprétation est soumise à deux facteurs: l’incomplétude de l’histoire – nous comblons les zones d’ombre d’un récit par des suppositions – et l’émotion ressentie par l’individu à la suite d’un événement. La finalité correspond au but, à l’objectif à atteindre. Ce type de conflit est crucial dans et pour une organisation. Si les acteurs ne s’entendent pas sur les objectifs, les dégâts peuvent être considérables. La méthode ou processus est aussi incontournable au sein de l’entreprise. Il ne suffit pas de s’entendre sur le but mais si chacun joue sa partition, on risque rapidement la cacophonie. “Mais cela peut être constructif en débouchant sur une nouvelle méthode commune”, tempèrent-ils. Le cadre touche aux règles, aux rôles et aux statuts au sein d’une organisation. Ici, le conflit découle souvent soit de l’ignorance soit du franchissement volontaire des limites. “Il résulte aussi de ce que nous appelons l’estompement de la norme. Persuadés de l’absence de gravité ou de conséquence en cas de transgression de certaines règles de base, les individus ne les respectent plus, ce qui peut être facteur de tensions.” En ce qui concerne les enjeux, ils touchent directement les individus: “Si, sur deux associés, l’un a le souci permanent du détail et l’autre fait preuve de dilettantisme, des échanges houleux interviendront tôt ou tard et l’entente sera compromise”. Last but not least, les valeurs, plus précisément les principes qui animent les individus et qui peuvent être source de divergences et in fine de conflit.

Un guide pratique

Un point important qu’ils tiennent à souligner: un conflit n’est pas un problème. Un conflit met en jeu des personnes alors qu’un problème peut exister en l’absence d’intervention humaine: “Un problème rime avec rationalité et s’inscrit dans le concret. Ses tenants et aboutissants sont factuels et peuvent être rassemblés aux fins d’analyse. Par exemple, un problème est survenu tel jour à telle heure, dans telles circonstances, dans tel lieu et sur tel objet ou machine, en présence de telle personne. Il n’est pas associé d’emblée aux émotions et aux personnes qui ne sont d’ailleurs pas appelées ‘protagonistes’ comme lors d’un conflit”. En d’autres termes, il convient donc de poser le bon diagnostic avant d’envisager une intervention. Après avoir planté le décor et passé en revue les différents types de conflits, Vincent Body et Fabrice Jamar vont proposer différents outils permettant aux protagonistes de définir le conflit et de mettre progressivement en place une série d’actions pour les résoudre. Pour ce faire, ils ont entre autres créé deux outils que sont “les états du besoin” et “le cube des influences” permettant une meilleure compréhension des interactions. Par ailleurs, une formation inter-entreprises sur le livre est en cours de développement et sera mise en oeuvre avant la fin du premier semestre de cette année.

L’ouvrage se présente donc comme un guide pratique où la gestion des conflits est abordée au travers des connaissances implicites (soft skills) et des connaissances explicites (hard skills). Son intérêt est qu’il analyse cette problématique en l’émaillant de cas concrets et pratiques qui illustrent ses propos. Il traite également du conflit via un angle positif en le visualisant comme un élément régulateur d’une organisation au lieu d’un élément perturbateur. “Nous sommes persuadés que toute personne mène des actions qu’elle considère positives pour elle. Par ce livre, nous voulions apporter notre contribution à cette posture. Nous avons fait le constat que le conflit n’était pas traité sous cet angle et nous souhaitions y remédier. Notre perception du management humain, nos postures de communication et nos études en sciences humaines nous ont amenés à créer ce guide pratique. Les relations et les interactions entre les personnes sont des fondamentaux à l’épanouissement. Apporter des moyens de les protéger, voire de les consolider, devenait une évidence. Nous espérons que les outils présentés seront sources de mieux-être et mieux communiquer pour celles et ceux qui les mettront en pratique”, concluent-ils.

Vincent Body et Fabrice Jamar, Manager le conflit. Un jeu d'interactions, Edipro, 224 pages.
Vincent Body et Fabrice Jamar, Manager le conflit. Un jeu d’interactions, Edipro, 224 pages.

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