“L’Europe pas encore prête pour une transition majeure vers les véhicules électriques”
L’Europe n’est pas encore prête pour une transition majeure vers les véhicules électriques et les effets significatifs qu’elle engendrerait sur le système électrique. Pour assurer un développement rapide de ce type d’engin, il est dès lors essentiel de réguler à l’échelle locale, avance le Centre sur la régulation en Europe (CERRE) dans une étude publiée mercredi. Il faut aussi favoriser les nouvelles technologies permettant de gérer les problèmes de congestion sur le réseau électrique.
La transition complète vers les véhicules électriques n’en est encore qu’à ses débuts en Europe, analyse le CERRE, un groupe de réflexion indépendant basé à Bruxelles et dont les membres sont des régulateurs, des entreprises et des universités. Et pourtant, elle n’est pas prête à gérer une mutation radicale, constate-t-il. Le remplacement complet du parc automobile par des véhicules électriques aurait ainsi des effets importants sur le système électrique.
“Cela impliquerait cinquante fois plus de voitures électriques aux Pays-Bas, générant ainsi des pics de demande en électricité importants, en particulier l’après-midi et le soir, lorsque les usagers branchent leur voiture en rentrant du travail”, illustre Friðrik Már Baldursson, co-auteur du rapport, qui s’est attardé sur la situation de la Norvège, du Luxembourg et des Pays-Bas.
La quantité de chargement durant les heures de pointe devra dès lors être considérablement réduite. En conséquence, l’utilisation de technologies permettant de gérer les problèmes de congestion du réseau électrique en répartissant les recharges dans le temps sera essentielle, estime-t-il.
Selon lui, il faudra aussi adopter une tarification variable en fonction de l’offre et de la demande à un moment donné mais aussi de la situation dans un quartier ou même une rue spécifique. “Sans cela, l’augmentation du nombre de véhicules électriques nécessiterait des investissements substantiels et coûteux dans les réseaux de distribution et dans l’infrastructure électrique”, prévient le CERRE. Une perspective qui pourrait ralentir le déploiement de l’électromobilité.
D’énormes opportunités, encore mal exploitées
Les véhicules électriques constituent par ailleurs d’énormes opportunités encore inexploitées, à en croire les chercheurs. “En moyenne, un véhicule personnel est garé 96% du temps. Imaginez une vaste quantité de véhicules électriques à l’arrêt, connectés au système électrique (…) Cela représente un potentiel de stockage d’énergie gigantesque et donc de flexibilité indispensable au réseau”, souligne Friðrik Már Baldursson.
Pour l’exploiter, il faut toutefois des technologies de recharge intelligentes et adaptatives, ainsi qu’une infrastructure permettant de connecter les voitures en stationnement au réseau. “À ce jour, il n’existe ni structure ni incitation pour encourager un tel développement. À notre connaissance, ce potentiel n’a jusqu’à présent été exploité nulle part dans le monde”, relève le co-auteur du rapport.
Face à ces constats, l’Europe doit donc élaborer une régulation suffisamment souple, qui puisse s’adapter aux évolutions technologiques et surtout aux spécificités nationales et locales, par exemple en matière d’aménagement urbain. Les autorités devront en outre veiller à une collaboration étroite avec les gestionnaires de réseau, préconise le CERRE.
L’électrification du transport routier ira probablement de pair avec une diminution de l’utilisation des transports en commun et une congestion accrue, comme c’est le cas en Norvège. Les politiques de mobilité devront dès lors être envisagées et conçues de manière globale, par exemple en incluant une tarification efficace de la congestion routière, en décourageant l’autosolisme et en incitant une plus grande utilisation des transports en commun.