Les gros enjeux économiques derrière l’élection du meilleur sommelier au monde

Marc Almert, vainqueur de l'édition 2019. Une compétition de très haut niveau soutenue par des partenaires qui, outre du cash, ont mis du vin et leur personnel à disposition.

La crème de la sommellerie mondiale s’est réunie pendant une semaine à Anvers. Derrière les exploits des candidats en quête d’un graal souvent très lucratif, se nouent des enjeux économiques importants.

Mi-mars, ils étaient 66 sur la ligne de départ. Soixante-six maîtres ès sommellerie venus du monde entier. Pendant cinq jours, ils ont lutté pour décrocher le graal de la profession: le titre de meilleur sommelier du monde. Des épreuves liées au service (servir un magnum de bulles dans 16 verres égaux sans revenir en arrière et en vidant la bouteille…), des questions théoriques ardues et des épreuves de dégustation à l’aveugle ont conduit à la victoire surprenante de l’Allemand Marc Almert (27 ans). Dans un monde de la sommellerie très feutré et pétri de traditions, il a épaté par son humour et la façon décontractée d’aborder son métier.

Employé à l’hôtel Baur au Lac à Zurich, le voilà à l’aube d’une belle carrière. Car un titre de meilleur sommelier du monde est un sésame qui ouvre bien des portes. Un seul exemple suffit. Paolo Basso, vainqueur à Tokyo en 2013, est devenu un consultant que le monde s’arrache: Nespresso, Carrefour, Air France, les hôtels Kempinski, Diam Bouchage, etc. Quant au candidat représentant la Belgique, Antoine Lehebel, le sommelier de Bon-Bon, il a terminé à une belle 10e place.

Un million d’euros et des bénévoles

C’est la troisième fois que notre pays organise cette compétition triennale, dont la première en 1969. C’est William Wouters, le président de la Guilde des sommeliers de Belgique, qui a amené l’édition du cinquantenaire à Anvers. Le principe? Les participants et les délégations des pays ne paient rien: ni le transport, ni l’hôtel, ni les repas, ni les multiples activités. Vu l’ampleur prise par la compétition, on parle ici d’un budget qui frise le million d’euros. Sans réel soutien gouvernemental ou régional, il a donc fallu trouver des partenaires commerciaux. Soit 90.000 euros pour les sponsors platinum (tels que Côtes du Rhône et Austrian Wine) ou 50.000 euros pour les sponsors gold (Gérard Bertrand, Famille Perrin, Duvel, Graham’s, Torres, Vinventions, etc.). A la clé, suivant les niveaux, une présence plus ou moins affirmée pendant la semaine: soirée dédiée (comme celle consacrée à la bière belge à la brasserie De Koninck), master classes pour les délégations et les journalistes, stand individualisé au bar des sommeliers, etc. Pour certains, comme Vignobles Malartic ou Château Phelan Ségur (des propriétés détenues par des Belges), les raisons de participer sont évidentes. Pour les autres, les raisons varient. Parfois, il s’agit d’une question d’image. “J ‘ai besoin de faire savoir que nos vins ne sont pas uniquement destinés à la grande distribution, confie Miguel Torres, patron de la maison familiale espagnole éponyme. Nous avons aussi de grands vins uniquement destinés à la restauration ou aux cavistes. Et les sommeliers sont, à mes yeux, le public idéal pour faire passer ce message. A l’avenir, le nom de Torres va disparaître de l’étiquette du Sangre de Toro. Le nom Torres sera réservé à nos grandes cuvées.”

Pour Côtes du Rhône, il s’agissait de montrer toute l’étendue du vignoble et son excellent rapport qualité/prix à l’heure où certains autres régions françaises atteignent des sommets inaccessibles dans les cartes des restaurants. “Nous avons dit oui tout de suite, explique Michaël Gerin, président de l’ODG Côte Rôtie. Des événements comme celui-ci nous permettent de faire découvrir l’étendue de nos talents aux meilleurs sommeliers de la planète. C’est une chance incroyable.” Même son de cloche du côté de Graham’s. “Le porto a sa place sur les tables des restaurants, confie Johnny Symington, président du groupe portugais. C’est un combat de tous les instants et il n’y a pas plus bel endroit pour le démontrer.” Impossible de réussir un tel événement sans personnel. A côté des agences Balthazar et Mindshake responsables de la logistique et de la communication, des centaines de bénévoles ont assuré une parfaite organisation. Dont un certain nombre de sommeliers belges bien connus…

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