Lire la chronique d' Amid Faljaoui

La voiture, nouveau produit de luxe ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Le mondial de l’automobile à Paris a fermé ses portes dimanche dernier. C’est déjà un miracle en soi qu’il ait ouvert ses portes après deux années de pandémie qui ont mis à mal la plupart des salons de l’auto.

Les exposants se font plus rares dans les salons. Ils estiment la plupart du temps que ces dépenses sont inutiles avec l’essor du numérique. Sans compter que la voiture est devenue la mal-aimée des politiques et d’une partie de la population. Des militants d’Extinction Rebellion ont d’ailleurs récemment fait le buzz à Paris en se “collant” à des voitures de sport pour dénoncer le “modèle de la voiture individuelle” promu par l’industrie automobile qui, d’après ces militants radicaux, cherche à laver son image à l’aide voiture électrique. Carlos Taveres, le patron de Stellantis dans une interview au Parisien appelle cela “l’autophobie” d’une partie de la population.

Pendant ce temps, un sondage réalisé par l’organisme de crédit Cetelem auprès de 18 pays montre que près des deux tiers des personnes interrogées craignent ne plus avoir les moyens de posséder un véhicule à l’avenir. Le sondage montre aussi que 6 personnes sur 10 ont déjà renoncé à se déplacer en raison du coût. Pour les commanditaires de ce sondage, cette tendance va s’accélérer au cours des prochaines années, avec le risque que la voiture devienne un objet de luxe, inaccessible, “rejetant à la marge les personnes qui en ont le plus besoin dans leur vie quotidienne”. Ce qui est vrai, car ce sont les personnes qu’on appelait essentielles durant le covid qui sont souvent le plus besoin d’une voiture, alors que les cadres et autres cols blancs peuvent pratiquer le télétravail à domicile.

L’idée, bien entendu, n’est pas de revenir sur la décision d’interdire la vente de voitures à moteur thermique après 2035 comme l’a décidé, un peu à l’aveugle la Commission européenne. Ni d’ailleurs de remettre en cause le rôle de la voiture dans le réchauffement climatique. L’idée est juste de rappeler que pareille décision entraine des conséquences qui n’ont pas été calculées. Il faudra donc bien rectifier le tir pour éviter le coup de pied de l’âne. Aujourd’hui, les voitures électriques présentes au mondial de l’automobile de Paris étaient majoritairement chinoises. France 24 y a consacré un reportage. Durant ce salon qui vient de fermer ses portes, les stars de ce mondial de l’auto ne s’appelaient pas Volkswagen, Fiat, Mercedes et Citroën. D’ailleurs, les géants allemands, sud-coréens et certaines marques françaises n’étaient pas présentes à ce salon. En revanche, des tas de marques chinoises dont les noms sont inconnus étaient bien présentes, grâce à leurs voitures électriques. Peu de gens le savent, mais plus de la moitié du Top 10 mondial des constructeurs de voitures électriques sont des marques chinoises. Ce que je veux dire par là, c’est que l’interdiction des moteurs thermiques à horizon 2035 va permettre aux Chinois de débouler chez nous et de rafler la mise. Pour la simple raison que les batteries concentrent entre 30 et 50% de la valeur d’un véhicule électrique. Or, la part de marché de l’Europe dans la construction des batteries est de 5% contre 50% pour nos amis chinois comme le rappelle la lettre d’info TTSO

Donc, oui, il faut lutter contre le réchauffement climatique. Personne ne discute de cet objectif. Mais peut-être pas avec des idées simplistes, sans quoi, nous allons avoir une partie de la population déjà malmenée qui va se retrouver reléguée tout en bas de l’échelle sociale et pour qui la voiture devient un luxe impayable. Et puis, il y a ceux et celles qui peuvent se payer une voiture électrique, mais qui rouleront avec une marque chinoise. Comme le disait le philosophe, “pour chaque problème, il y a une solution qui est simple, claire et fausse”.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content