Alpro : sa stratégie au-delà du soja

Avec un lait aux amandes et une boisson aux noisettes, Alpro lance ce mois-ci ses premiers produits ne contenant pas de soja. Ces initiatives s’inscrivent dans la droite ligne de la nouvelle stratégie de croissance de la société, qui entend bien devenir un expert en produits d’origine végétale en général.

Le choix d’un nouveau logo exprime souvent un glissement de stratégie. Alpro n’échappe pas à la règle. Visuellement, le changement est minime : le terme “soja” est remplacé par le slogan “Enjoy plant power” et la fève de soja s’est muée en un soleil levant. Mais la transformation symbolise l’extension de la marque qui, ne voulant pas se concentrer exclusivement sur le soja, s’attaque aujourd’hui au marché des produits d’origine végétale en général. Et met en avant des notions de positivisme, de vie saine et de vitalité (le soleil). “À partir de cette année, la marque sera proactive et holistique, annonce Bernard Deryckere, CEO d’Alpro. En d’autres termes, nous allons l’étendre et souligner le fait que des produits sains d’origine végétale peuvent être savoureux et bons à la fois pour l’être humain et pour la planète.”

La société est née en 1980 ; à l’époque, elle fabriquait des produits laitiers à base de soja destinés à lutter contre la faim en Afrique. Rapidement, elle a étendu son terrain d’action à l’Europe occidentale, où elle a eu tôt fait de rallier les consommateurs allergiques au lait de vache. Les produits laitiers d’origine végétale s’étant aujourd’hui amplement généralisés, le temps est venu pour Alpro de franchir un nouveau pas : celui qui consiste à varier davantage son offre.

Production en sous-traitance

45 % des foyers belges détiennent au moins un produit de marque Alpro et selon l’institut d’études de marché GfK, un ménage moyen consomme 13,7 litres de produits Alpro par an. Mais la marque n’a pas l’intention de s’arrêter en si bon chemin. “Nos nouveaux produits, à base de noisettes et d’amandes, vont nous permettre d’introduire plus de variation dans la gamme. Nous les estimons capables de séduire les personnes qui n’aiment pas le soja, expose Bernard Deryckere. Nous visons les consommateurs qui se préoccupent de leur alimentation et de leur santé et font preuve d’ouverture d’esprit et de curiosité. Les boissons peuvent être consommées pures ou accompagner les céréales ou le café.”

Les nouvelles boissons aux amandes et aux noisettes seront progressivement introduites dans plusieurs pays européens. Ces prochaines années, la gamme sera étendue à des yaourts, desserts et autres denrées à base de l’un et l’autre de ces oléagineux, en fonction des préférences constatées au sein de chaque pays.

Par précaution, la production est confiée à un sous-traitant étranger et non pas à l’un des quatre sites dédiés au soja, dont celui de Wevelgem, qui est le plus grand. Alpro veut en effet éviter que des résidus de noisettes ou d’amandes, auxquelles certaines personnes sont allergiques, n’aboutissent dans les aliments au soja. Les nouvelles boissons ne sont du reste pas vouées à se substituer au lait de vache, comme ce fut le cas du lait au soja riche en protéines. Les boutiques d’alimentation naturelle belges proposent déjà des laits aux amandes, mais celui d’Alpro sera le premier à intégrer la grande distribution.

Un saut risqué

La mise sur le marché, ce mois-ci, des nouveaux produits, sera soutenue par une campagne marketing lancée en mars. Davantage que les précédents, le message fera la part belle au consommateur et à ses émotions tout en tentant de l’amener à s’intéresser à l’alimentation d’origine végétale. Les femmes entre 30 et 50 ans, sur qui reposent les décisions d’achat du ménage, constituent une part importante du public visé. “Lorsque nous organisons des dégustations, nous tenons compte de la situation géographique du groupe-cible, annonce Séverine Distave, international marketing manager brand equity. Outre la publicité télévisée, Alpro est bien implantée dans les médias sociaux ; en très peu de temps, nous sommes passés de 5000 à 52.000 fans sur Facebook”, se réjouit-elle. Si ce n’est qu’un nouveau site est en cours de préparation, Séverine Distave ne veut encore rien dévoiler au sujet des actions marketing à venir.

Compte tenu du caractère risqué du nouveau positionnement d’Alpro sur le marché, un soutien médiatique s’avérera effectivement indispensable. Il a fallu 30 ans à la société pour devenir la marque des produits au soja par excellence. Si elle entend bien conserver son statut, elle veut aussi faire savoir aux consommateurs qu’elle s’intéresse désormais à d’autres produits d’origine végétale. “Les aliments au soja resteront notre fer de lance, précise Séverine Deryckere. D’ailleurs, nous en mettons deux nouveaux sur le marché : une crème fraîche et un yaourt, beaucoup plus crémeux et fruité que ceux de la gamme actuelle.”

Le changement de cap inaugure un nouveau plan triennal, expose le CEO de l’entreprise. “Nous avons l’intention de maintenir notre croissance exponentielle. Bien que la crise l’ait quelque peu ralentie, nous continuons de prévoir une progression vigoureuse à long terme. C’est la raison pour laquelle nous ne cessons d’investir dans le marketing et les nouveaux produits.”

Benny Debruyne

Alpro en chiffres

– 1980 : naissance d’Alpro au sein du groupe Vandemoortele, au titre de département spécialisé dans l’alimentation à base de soja.

– 90 % des fèves de soja sont utilisées pour l’alimentation animale. Mais Bernard Deryckere, le CEO de la société, avait constaté que commencer par produire du lait de vache constituait un détour inutile. “Fabriquer d’emblée du lait de soja permettait de nourrir six fois plus de gens”, calcule-t-il.

– 0 % d’émission de CO2, tel est l’objectif poursuivi par Alpro pour 2020. Entre 2008 et 2012, la société a réduit ses émissions de 11 %, alors même que ses volumes produits augmentaient d’autant. Alpro est la première entreprise alimentaire européenne à avoir reçu le label “Climate Saver” décerné par le WWF.

– 265 millions d’euros, le chiffre d’affaires sur lequel la société a clos l’exercice 2011, contre 100 millions d’euros en 2001.

– L’entreprise emploie 785 collaborateurs, dont quelque 400 en Belgique.

– 70 % : c’est la part de marché moyenne d’Alpro en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et au Royaume-Uni. Sa part de marché pour toute l’Europe est de 40 %.

– 325 millions d’euros, le montant mis sur la table par Dean Foods, leader américain des produits laitiers et au soja, pour acquérir Alpro en 2009. Le groupe Vandemoortele avait été contraint de s’en défaire après le rachat, onéreux, du spécialiste de la boulangerie français Panavi.

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