Nouveautés en matière de droit patrimonial de la famille

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La gestion discrétionnaire va bien au-delà de la simple définition de votre profil d’investisseur. La constitution, le développement et la transmission d’un patrimoine – trois moments clés de la vie – soulèvent souvent une multitude de questions juridiques auxquelles votre gestionnaire pourra vous répondre de manière adéquate. Ainsi, ces dernières années, le droit patrimonial de la famille a subi de profondes transformations. Vous avez dès lors tout intérêt à reconsidérer les opérations effectuées précédemment.

Le droit patrimonial de la famille regroupe différentes branches du droit telles que le droit des régimes matrimoniaux, le droit des successions, le droit fiscal et bien d’autres encore. Ces dernières années, le droit patrimonial de la famille a connu de multiples évolutions. Luc Blomme, gérant-consultant fiscal chez Moreau & Blomme Estate Consultants, revient sur les principaux changements.

Notre droit successoral trouve ses racines dans le Code Napoléon de 1804 mais cette branche du droit a connu récemment des changements majeurs.

Luc Blomme : “Ces changements répondent aux nouveaux souhaits et besoins d’une société en profonde mutation. L’émergence rapide de familles recomposées en est un bel exemple. Actuellement, vous ne pouvez disposer librement que d’une partie limitée de votre succession parce que certains héritiers ont droit à une part minimale. À partir du 1er septembre 2018, la quotité disponible augmentera dans la plupart des cas. Les possibilités de conclure de son vivant des pactes sur succession future ont également été sensiblement élargies, ce qui constitue un autre pas dans la bonne direction.”

L’Europe a également réformé le droit des successions. Quelle en est la principale implication ?

Luc Blomme : “Grâce à la nouvelle législation européenne, il est devenu plus simple de liquider une succession comportant des critères de rattachement internationaux, comme par exemple une seconde résidence. Depuis 2015, le Règlement européen en matière de droit successoral donne, sous certaines conditions, la possibilité aux résidents de la plupart des États membres de l’Union européenne de choisir eux-mêmes le régime successoral applicable. Ce régime successoral est d’ailleurs indissociable du droit patrimonial des couples et, dans ce cas aussi, l’Europe procurera, dès 2019, aux conjoints et aux partenaires enregistrés davantage d’uniformité et de sécurité juridique. Tous les pays n’ont pas suivi mais les pays prisés par les Belges l’ont fait. Nous pensons par exemple à nos voisins, mais aussi à l’Italie, l’Espagne et le Portugal.”

Au niveau international, les choses bougent également sur d’autres plans.

Luc Blomme, gérant-consultant fiscal chez Moreau & Blomme Estate Consultants.
Luc Blomme, gérant-consultant fiscal chez Moreau & Blomme Estate Consultants.

Luc Blomme : “En effet, en matière de transparence internationale concernant les biens étrangers – comme les assurances vie et les avoirs en compte – on observe de moins en moins de résistance, y compris pour les biens qui se trouvent loin de l’Union européenne. C’est une conséquence de la lutte contre le terrorisme, qui a rapidement dissipé le brouillard entourant le secret bancaire et des assurances. Bien plus rapidement que bon nombre ne l’auraient cru possible.”

Dans notre pays, le droit patrimonial des couples est en passe d’être réformé.

Luc Blomme : “Le Ministre de la Justice, Koen Geens, souhaite en effet réformer le droit patrimonial des couples. Ce droit régit les implications juridiques patrimoniales du début et de la fin d’une relation. Il envisage de faire jouer par défaut la clause de compensation finale pour les conjoints qui souhaitent se marier sous le régime de la séparation de biens – c’est actuellement le cas d’un mariage sur quatre. Autrement dit, chaque conjoint continue d’accumuler son propre patrimoine durant le mariage mais, en cas de divorce ou de décès, une compensation relative aux avoirs propres des époux interviendra afin que le partenaire resté au foyer et/ou le plus faible financièrement puisse néanmoins bénéficier des acquêts de l’autre conjoint. Il sera toujours possible d’exclure ce principe dans le contrat de mariage.”

L’évolution qui a le plus d’impact est sans doute la fameuse disposition générale anti-abus, qui lutte contre les constructions et opérations qui sont considérées comme un abus fiscal.

Luc Blomme : “Depuis le 1er juin 2012, le fisc peut, en matière de droit patrimonial de la famille, rejeter un acte juridique s’il estime qu’il est contraire à l’objectif spécifique d’une législation fiscale. Il en va de même quand une personne prétend à un avantage fiscal dont l’octroi, selon l’administration fiscale, est contraire à l’objectif de la loi. La charge de la preuve incombe toutefois, en première instance, à l’administration fiscale. Si elle réussit à appliquer avec succès la disposition anti-abus, l’administration fiscale pourra imposer le contribuable sur ce qu’il a cherché à éluder ou elle ne lui accordera pas l’avantage fiscal qu’il tentait d’obtenir.”

Quelle défense le contribuable peut-il encore faire valoir ?

Luc Blomme : “Le contribuable peut y échapper en démontrant qu’il ne viole pas l’objectif de la disposition fiscale en question ou en prouvant que sa manière d’agir est également dictée par d’autres motifs que purement fiscaux. Ce n’est pas toujours aussi simple. Une construction qui figure, par exemple, sur la liste noire du fisc (flamand) est celle où les époux scindent leur patrimoine commun en patrimoines propres respectifs puis se font une donation réciproque. En cas de décès de l’un des partenaires, l’autre n’est alors redevable d’aucuns droits de succession, immédiatement ou après trois ans selon les cas. Mais le fisc s’y oppose. Le fisc n’interprète d’ailleurs pas uniquement le concept ‘d’abus fiscal’ de manière assez large. D’autres dispositions contenues dans les différents codes sont également ” étendues “, dans une tentative de soumettre à l’une ou l’autre forme de taxation toute une série d’actes qui y échappent actuellement. Par cette démarche, le fisc vise à alimenter le Trésor fédéral ou régional.”

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