Splendeurs et misères des courtiers : entre réalité et cinéma
Le Loup de Wall Street retrace la vie de Jordan Belfort. Commercial surdoué, il pénètre à Wall Street en 1987 par le bas de l’échelle, comme assistant trader chez LF Rotschild. Un an plus tard, à 25 ans, il fonde sa propre société de courtage, Stratton Oakmont, qui devient rapidement incontournable sur la place financière new-yorkaise. L’homme s’entoure d’une armada de traders pas très futés mais doués, chargés de “harceler” leurs clients jusqu’à ce qu’ils leur transmettent leurs ordres d’achat selon le mot d’ordre buy or die, “acheter ou mourir”. La magouille fonctionne à plein régime pendant une décennie durant laquelle Belfort empoche plus de 50 millions de dollars par an.
Qualifié à l’époque par le magazine Forbes de “Robin des Bois dégénéré qui confisque les riches pour donner à lui-même et à sa joyeuse bande de brokers”, Belfort finit par attirer l’attention des autorités financières. La SEC (la FSMA américaine), alertée par des investisseurs lésés, s’intéresse à son cas, suivie du FBI. C’est finalement le transfert en Suisse de sommes colossales amassées par le trader et sa bande qui signeront la fin de l’aventure. N’hésitant pas à trahir ses compères pour réduire sa peine, Jordan Belfort écope d’une peine de prison de deux ans à peine. Un séjour qu’il met à profit pour écrire son autobiographie, Le Loup de Wall Street. Aujourd’hui, Belfort s’est repenti. Il fait le tour du monde et dispense des conférences de coaching professionnel et des conseils de vente.
A la différence du célèbre Madoff, Jordan Belfort n’a pas eu recours à la pyramide de Ponzi, mais à la technique dite “de la bouilloire”. Le principe est simple : un fonds d’investissement décide d’acheter beaucoup d’actions d’une société inconnue au bataillon, peu liquide et sous-évaluée. Cela attire l’attention des investisseurs qui foncent sur ce titre à bas prix, appelé penny stock. Le cours augmente rapidement et la pression monte sur le titre… comme dans une bouilloire. Jusqu’à ce que le fonds revende ses actions au bon moment, en empochant gros, et que le cours se dégonfle aussi vite qu’il ne s’est gonflé, laissant les investisseurs avec un titre qu’ils ont payé beaucoup trop cher et dont la valeur ne reprendra jamais les couleurs séduisantes qui étaient dues uniquement à la spéculation.
Rappelez-vous, il y a eu Jérôme Kerviel, un opérateur de marché français. Salarié de la Société générale, il a été jugé responsable, à hauteur de 4,82 milliards d’euros, des pertes de la Société générale découvertes en janvier 2008, celles-ci résultant de ses prises de positions sur des contrats à terme sur indices d’actions s’élevant à cette époque à environ 50 milliards d’euros.
Fabrice Tourre, également un opérateur de marché français, spécialisé dans les produits exotiques. Il est à l’origine d’un scandale financier impliquant son employeur, Goldman Sachs. Le Français a été jugé coupable de fraude boursière il incarne désormais les errances de Wall Street ayant mené à la crise financière. Goldman Sachs a versé une lourde amende d’un demi-milliard de dollars à la SEC pour solder les poursuites, mettre fin à une avalanche de mauvaise presse et au risque d’être condamnée par un jury fédéral.
Adoré ou détesté, le moins qu’on puisse dire c’est que Le Loup de Wall Street suscite le débat. Parmi les détracteurs, il y a d’abord les clients floués à qui Belfort doit encore 100 millions de dollars — qu’il a commencé à rembourser avec ses royalties perçues pour le film, qu’on se rassure. Ceux-ci estiment qu’on glorifie le personnage et ses pratiques douteuses qui ont “mis l’Amérique à genoux”. Il y a ensuite les âmes bien pensantes, dénonçant ce film “honteux”, “malsain”, “misogyne”, “violent” et même “pornographique”. Et enfin il y a les financiers qui, admettant certains excès durant ces années-là, prétendent que la fraude n’était pas aussi répandue dans le milieu que ne le laisse croire Martin Scorsese… Le réalisateur se défend de la polémique en rappelant que son film est avant tout “une mise en garde (…) à propos de ces pratiques et de ces gens toxiques”.
100 MILLIONS DE DOLLARS : Le budget de réalisation du film. 22 MILLIONS DE DOLLARS : Les recettes du film durant les 48 heures qui ont suivi sa sortie aux Etats-Unis. Depuis lors, elles ont atteint près de 100 millions au total, diffusion à l’étranger y compris. En Belgique, le film est sorti le 8 janvier et a rapidement pris la tête du box-office. 522 “FUCK” : Le mot est employé comme un élément de ponctuation. Le film durant 179 minutes, cela donne un f-word toutes les 20 secondes environ.
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